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Assurance-chômage : les seniors, dindons de la farce

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Lorsque François Chérèque prétend que «l’accord sur l’assurance-chômage renforce les sécurités contre une aggravation de la précarité. Il constitue une avancée importante des droits pour les salariés et demandeurs d’emploi», il choisit d’occulter délibérément la catégorie qui va subir la plus forte régression de ses droits : celle des plus de 50 ans.

Les communiqués repris dans la plupart des médias laisseraient même à penser que les seniors y bénéficieraient d’un traitement de faveur : «La durée maximale d'indemnisation serait de 24 mois, à raison d'un jour travaillé un jour indemnisé, contre 23 mois aujourd'hui, sauf pour les plus de 50 ans où elle resterait de 36 mois. L'indemnisation serait maintenue à 57,4% du dernier salaire». Même discours fallacieux du côté de Matignon qui fait valoir qu’«il serait incompréhensible que, dans la situation de crise actuelle, les syndicats ne s’engagent pas sur une nouvelle convention plus favorable aux chômeurs que la précédente»...

Or, ce qui attend les plus de 50 ans est loin d’être enviable. Y compris sur la question de la durée maximale d’indemnisation de 36 mois, puisque seuls les primo-accédants au chômage ont une chance d’en bénéficier : le projet d’accord stipule en effet qu’il faut avoir cotisé 36 mois (contre 27 jusqu’à présent) sur une période de référence elle-même limitée à 36 mois.

Si, à titre individuel, quel que soit l'âge, la filière unique se traduit par des pertes ou des gains de mois d'indemnisation susceptibles de se compenser au sein d’une même catégorie, l'ampleur de la diminution de période d’indemnisation qui touche la catégorie des seniors dans son ensemble est d'un niveau inédit. Quand on considère plus particulièrement le cas de ceux qui, âgés de 57 ans ou plus en 2008, disposeraient d’une période d'affiliation de 16 ou 23 mois, cette amputation est aussi indécente que brutale.

A titre de comparaison :

Convention 2006-2008
Une personne privée d’emploi en décembre 2008 alors qu’elle est âgée de 57 ans relève de la convention 2006. Si elle dispose d’une période d’affiliation de 27 mois dans les 36 derniers mois, elle est susceptible d'être indemnisée pendant une période de 36 mois. Dispensée de recherche d’emploi à partir de son 58e anniversaire, elle sera prise en charge à l’âge de 60 ans et demi jusqu’à l’âge de la liquidation de sa retraite. Ainsi, elle bénéficiera selon la durée d’un préavis et d’un délai de carence juxtaposés, soit d’une jonction parfaite soit d’un recours à une activité, réduite ou pas, de 3 à 6 mois.

Convention 2009-2010
La personne du même âge, qui, perdant son emploi en 2009, relève de ce projet d’accord, ne bénéficiera dans le même contexte que de 27 mois d’indemnisation, sous réserve de surcroît qu’elle ne perde pas ses droits entre-temps en raison, soit de conditions plus contraignantes (non encore dévoilées) d’indemnisation en cas d’activité réduite, soit d’une radiation suivie d’une réinscription.

Par ailleurs, avec le recul de 60 ans et demi à 61 à compter de 2010 de la jonction avec la liquidation de sa retraite prévu dans le cadre de cette même convention, 6 autres mois viendront encore à manquer. Ceci, dans l’hypothèse favorable où cette limite d’âge lui serait acquise au-delà de la convention 2009-2010, car elle passera selon toute vraisemblance à 62 ans en 2011.

Ainsi donc, aux effets de seuil découlant de la coexistence de plusieurs filières dont la suppression est devenue, dans le cadre des négociations de la convention 2009-2010, une fin en soi, est préféré un effet de seuil immensément plus brutal lié aux dispositions des conventions elles-mêmes.

Toutes choses étant égales par ailleurs, force est de constater que 9 mois d’un côté (27 mois au lieu de 36) et 6 mois de l’autre (61 ans au lieu de 60 ans et demi), c’est 15 mois d’indemnisation en moins si la perte d’emploi est actée après la date en vigueur de la convention chômage, soit une différence de 56%. Idem pour la réduction des 7 mois pour la filière accessible aux chômeurs de tous âges (16 mois au lieu de 23) auxquels les chômeurs nés avant le 1er janvier 1952 sont fondés à ajouter les 6 mois à l’autre bout, soit un manque de 13 mois (16 au lieu de 29 qui correspondant à une différence de 81% !).

Non seulement il n’est pas équitable de faire supporter à une catégorie de chômeurs le poids d’une meilleure prise en charge au profit d’autres catégories, mais cet effet des vases communicants aux dépens des seniors est d’autant plus contestable qu’ils ont, en leur temps, contribué généreusement au financement des régimes sociaux. Après avoir supporté un principe de «solidarité intergénérationnelle» envers leurs aînés, ils se la verraient imposer cette fois au profit des entrants dans la vie active alors qu’ils sont déjà, en temps normal, les grandes victimes du chômage. Dans le contexte d’une crise qui va se traduire par une intensification des mises à l’écart anticipées des plus de 50 ans, un discours et une attitude «négationnistes» devant une régression annoncée, et non officiellement admise, de leurs conditions d’indemnisation sont d’autant plus insupportables.

Par ailleurs, la CFTC souhaite rouvrir le débat sur ce que le Medef qualifiait, dans le cadre des récentes négociations, de «droits rechargeables» ; en palliant en effet les invalidations en boucle de périodes travaillées de 6 mois ou plus, qui, bien que cotisées, ne profitent pas aux intéressés, cette mesure constituerait une vraie avancée en faveur des chômeurs et lèverait de surcroît des freins à des reprises d’activité précaires qui, paradoxalement, peuvent induire un raccourcissement des périodes indemnisées. Si, étonnamment, aucun dispositif de ce genre ne figure dans la version du projet d’accord de la nuit du 23 au 24 décembre, il n’est pas trop tard pour que l’ensemble des représentants syndicaux obtiennent d’en rouvrir le débat, en même temps que la suppression annoncée des cotisations chômage en juillet 2009 et une meilleure préservation des droits des chômeurs les plus âgés.

Martine

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Mis à jour ( Mercredi, 25 Mars 2009 14:40 )  

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