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Banquiers, chômeurs : des «cibles parfaites»

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On a déjà vu que Nicolas Sarkozy, qui adore les victimes, peut se montrer plein de compassion envers elles, quitte à légiférer sur le coup de l'émotion mais, attention : sa miséricorde est hautement sélective !

Nicolas Sarkozy estime que le renoncement des banquiers à la part variable de leur rémunération sur les résultats de 2008 serait «la moindre des choses» en contrepartie des efforts de l'Etat (enfin, des contribuables…) français qui a déjà accordé à six de ses établissements [1] une première tranche de prêts de 10,5 milliards d'euros en décembre. Aucune étude n'est venue montrer que ces sommes colossales, alors distribuées sous forme de fonds propres à ces innocentes victimes des tristes évènements que nous connaissons, ont servi à quelque chose. Qu'à cela ne tienne : le gouvernement va réitérer son geste bienveillant d'ici la fin du premier trimestre !

Les critiques fusent, beaucoup voyant en ces «cadeaux aux banques» une dilapidation pure et simple de l'argent public, puisque l'Etat ne s'est même pas donné les moyens… d'en contrôler l'utilisation. C'est donc pour cela que l'UMP s'agite autour des bonus des banquiers : une façon de noyer le poisson afin de faire croire à l'opinion qu'il y a bien des «contreparties». Pourtant, ici non plus, il n'existe aucun moyen légal de contraindre ces dirigeants à renoncer à leurs bonus... Tout cela n'est que du vent et n'effraie nullement les vautours. D'ailleurs le directeur général du Crédit Agricole, Georges Pauget, a ainsi réagi à la pression du gouvernement : «Dans les périodes de grand stress, comme c’est le cas actuellement, un mouvement naturel est de chercher un bouc émissaire. De ce point de vue, nous sommes des cibles parfaites».

Une «question de morale» ?

Pour les chômeurs, véritables innocentes victimes des tristes évènements que nous connaissons, le traitement n'est pas du tout le même : traités de fainéants ou de profiteurs, constamment suspectés de fraude, il y a longtemps que le gouvernement les a «désignés à l'opinion publique» en tant que «cibles parfaites» pour éviter d'avouer que le chômage, conséquence directe du libéralisme économique, est un outil précieux qui fait baisser les salaires, installe une peur bénéfique au cœur du salariat tout en contenant l'inflation. L'Etat, qui ne contribue en rien à l'assurance-chômage puisque c'est l'Unedic qui la finance après s'être chargée de collecter les cotisations salariales et patronales afférentes [2], se permet d'exiger de sérieuses «contreparties» à ceux que leurs patrons ont foutu à la porte.

Ainsi, il s'est empressé d'édicter une loi qui fixe leurs «droits» et, surtout, leurs «devoirs». Même la charmante Annie Thomas, de la CFDT de l'Unedic, a déclaré que «l'assurance-chômage n'est pas une rente de situation versée parce qu'on a cotisé toute sa vie. Les demandeurs d'emploi font souvent cette erreur. Les chômeurs s'imaginent qu'ils ont le droit de toucher des allocations parce qu'ils ont cotisé, et qu'ils ont du temps devant eux». Et de rajouter : «Un demandeur d'emploi a le devoir d'accepter un salaire même inférieur à 25 ou 30% de son salaire antérieur, parce qu'il doit faire le deuil de son ancien emploi et se projeter»… avec déclassement et déqualification à la clé.

Malgré «la crise«, aucun coup de pouce ne sera apporté à l'assurance-chômage alors que Bruxelles, dans le cadre de son plan de relance pour faire face à la récession, avait préconisé aux gouvernements européens d'augmenter temporairement le montant des allocations ou d'allonger temporairement leur durée.

Mais revenons aux «boucs émissaires« du moment. Heureusement pour l'UMP que les deux plus hauts dirigeants de BNP-Paribas ont donné l'exemple, renonçant à leurs bonus 2008, soit 875.000 € pour son président, Michel Pébereau, et 2,27 millions d'euros pour son directeur général, Baudoin Prot. Ces deux hommes, qui ne risquent ni chômage ni déclassement ni déqualification, gagnent déjà autour de 800.000 € par an : on ne va pas les plaindre.


[1] Crédit Agricole, BNP-Paribas, Société Générale, Crédit Mutuel, Caisse d’Epargne et Banque Populaire.

[2] Le budget annuel de l'Unedic, c'est environ 30 milliards d’€ dont 24 sont consacrés à l'indemnisation de 2,1 millions d'allocataires, le montant moyen de l'allocation chômage étant de 950 € par mois.

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Mis à jour ( Mardi, 20 Janvier 2009 03:11 )  

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