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Accueil Social, économie et politique La télévision publique aux ordres de l'UMP

La télévision publique aux ordres de l'UMP

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Le nouveau magazine de France 3 «Comme un vendredi», malgré un ton qui se veut malicieux, est affreusement superficiel et, surtout, participe activement à la propagande gouvernementale.

L'invité de ce vendredi était Jean-François Copé qui a, au passage, déclaré qu'il n'était «pas du tout hostile» à l'idée d'un allongement «ponctuel» de la durée de l'indemnisation du chômage dans ce contexte de crise économique, sans plus de précisions. On rappelle que cette bonne idée, qui fait d'ailleurs partie des propositions aux gouvernements émises par Bruxelles, fin novembre 2008, dans le cadre du plan de relance concocté par la Commission européenne, entre en contradiction avec les dispositions de la nouvelle convention Unedic que doit agréer Matignon.

«SOS emploi : derrière le guichet», tel était le titre du premier reportage. L'ambiance dans cette ANPE (pardon, Pôle Emploi) parisienne est lourde, entre conseillers déboussolés et privés d'emploi désespérés. Puis, rapidement, on se met à casser du chômeur, soupçonné «de ne pas chercher à plein temps du travail». Emplois précaires et mal payés sont au menu, mais «il ne faut pas faire son difficile». L'ombre des fameuses «200.000 offres non pourvues» plane toujours, les fameux «devoirs» des demandeurs d'emploi sont une réalité, sanctions et radiations à la clé.

VOIR L'ÉMISSION EN LIGNE

Cet état des lieux de l'ex-ANPE montre des agents pas assez formés, confrontés à la misère humaine, obligés de se blinder et pris en sandwich entre la politique répressive de l'Etat, les exigences abusives des employeurs et la motivation fluctuante des chômeurs.

Le reportage, qui n'a duré que 12 minutes et s'est donc révélé très réducteur, a mis en scène le jeune qui veut pas bosser (soi-disant car on entend, certes mal, qu'il n'a pas de voiture…), confortant un Copé — qui jubile — dans la politique répressive du gouvernement envers les chômeurs, ou bien le senior qui a bossé toute sa vie et qu'on voit maintenant arriver à Pôle Emploi (comme si, avant, il n'y avait que les glandeurs qui y étaient inscrits)...

Une chose nous échappe : où a-t-on encore dégoté ce chiffre de 200.000 emplois non pourvus ? Alors que le nombre des offres disponibles sur le site anpe.fr tourne autour de 100 à 130.000 actuellement ?!? Vous pouvez aller vérifier.

Le téléspectateur ne sait pas que Pôle Emploi filtre presque toutes les candidatures sur demande des entreprises, justement pour ne pas crouler sous les CV... Les réponses, par ailleurs, se font rares. Quand on remarque une offre qui est là depuis longtemps et pour laquelle on n'aurait pas candidaté (diplôme ou expérience inadéquats, par exemple), on n'a pas plus de succès qu'avec les autres. On peut aisément en conclure que les employeurs sont particulièrement sélectifs.

La manipulation par l'image

L'histoire des 166 candidats sélectionnés soi-disant «sur leur expérience» et à qui Pôle Emploi a adressé un SMS (il faut donc avoir un téléphone portable pour mieux se faire siffler) nous aurait beaucoup amusée si l'image du chômeur glandeur n'était pas encore véhiculée. Le reportage montre que 8 demandeurs d'emploi seulement sur les 166 «invités» se sont présentés à cette réunion d'information, ouvrant un boulevard à M. Copé.

Pourtant, si le commentateur et l'agent concerné évoquent d'une sélection par l'expérience, la réunion met en évidence qu'aucun n'en avait dans ce domaine. Et grâce au visionnage par internet, on peut après coup faire des arrêts sur images, ce que ne peuvent faire ni le téléspectateur… ni le maire de Meaux.

Si l'on fait pause sur celle de l'écran d'ordinateur de l'agent au moment de sa sélection (qui dure 20 secondes… 20 secondes de tri automatique : on peut s'interroger sur l'efficacité de cette pratique), on voit : 2 DE en catégorie 6 (personnes sans emploi non immédiatement disponibles, tenues d'accomplir des actes positifs de recherche d'emploi, à la recherche d'un emploi à durée indéterminée à temps plein), un de catégorie 8 (personnes sans emploi non immédiatement disponibles, tenues d'accomplir des actes positifs de recherche d'emploi, à la recherche d'un emploi à durée déterminée, temporaire ou saisonnier), 3 personnes inscrites depuis moins de 6 mois (cat. 1 ?) et 2 autres dont la catégorie n'est pas précisée (changement de référent et fin de suivi délégué de prestation ?). Bon, déjà 3 personnes sur 8 non disponibles immédiatement, et donc probablement pas libres pour se présenter à cette réunion. Trois personnes inscrites depuis moins de 6 mois, voire peut-être depuis moins de 15 jours, et dont on ne connaît pas la catégorie. Si c'est un gringalet, faut-il qu'il postule aussi ?

Et si l'on refait pause pour bien lire le SMS, alors que les commentaires du journaliste et de l'agent laissent penser qu'il y a UNE réunion, on s'aperçoit qu'en réalité il y en a quatre : «Pour des vacations d'agent de sécurité au Parc des Princes, présentez-vous au Pôle Emploi Bel Air le 13/01 à 14h ou 15h30 ou le 16/01 à 9h30 ou 11h». Combien d'autres personnes se sont présentées aux trois autres ? On ne vous le dit pas. Les chômeurs se font traiter de fainéants, c'est tout. Il y a réelle volonté de désinformer, et c'est grave !

La promotion du sous-emploi de masse

En outre l'employeur, un jeune cravateux probablement sorti d'une grande école de commerce à qui on voit encore couler du lait sur le menton, conforte cette calomnie. Mais que propose-t-il, ce petit patron ? Des postes d'agent de sécurité au Parc des Princes (mission de filtrage), quelques heures le mercredi ou le samedi à 9,34 € brut de l'heure sans prime de risque. De qui se moque-t-on, franchement ? Eut égard aux rétributions de certains joueurs et des recettes faramineuses lors des matchs, du risque encouru pendant ces manifestations, de la totale précarité de ce pseudo emploi aux horaires décalés, il pourrait franchement au moins proposer un revenu attractif, ne serait-ce que pour permettre au salarié de «soigner sa présentation» !

Concernant ces réunions d'employeurs, il arrive souvent que ce soient des réunions régulières, mensuelles même, qui recrutent en permanence du fait d'un puissant turn-over. Souvent, la plupart des candidats ont déjà participé à des réunions du même type, et il ne serait pas étonnant que certaines des personnes convoquées aient déjà expérimenté les «emplois» de ces mêmes entreprises. D'où leur absence, l'arnaque étant connue.

L'incontournable REC+AR

Quant à la personne qui ne se présente pas à une convocation et qui ne s'en excuserait pas, nous savons par expérience que si vous êtes dans l'impossibilité de vous déplacer ce jour-là (par exemple, ici le SMS est envoyé vendredi pour le mardi d'après) et que si vous vous contentez de 3 mails, 2 coups de téléphone et une lettre simple pour justifier votre absence, vous avez toutes les chances qu'on vous dise que vous n'avez pas prévenu, donc de recevoir une notification de radiation (quand vous avez la chance de la recevoir à temps pour engager un recours…).

Seule solution pour éviter ce genre de déconvenue : se justifier par lettre recommandée avec accusé de réception, soit claquer 5 €. Aujourd'hui, les chômeurs échaudés savent qu'ils ne peuvent plus échanger avec Pôle Emploi que par ce biais, non pas par défi mais pour se préserver.

Chercher un emploi coûte de plus en plus cher : des frais postaux qui s'alourdissent, le téléphone portable pour être joint en permanence, l'ordinateur et sa connexion internet, une garde-robe à la hauteur, une voiture (beaucoup d'annonces ne spécifient pas qu'il vaut mieux posséder un véhicule, pourtant c'est le chômeur non mobile qui est blâmé)... On fait comme si tout cela allait de soi mais quand on a perdu 30% de son revenu, puis quand on se retrouve aux minima sociaux, non, cela n'est pas évident.

Zéro partialité

On voit donc que cette émission ne prétend pas faire preuve de rigueur, surfant au contraire sur un mode «zapping» aggravé. Pire : son positionnement politique est clair.

On remarque que le traitement réservé à l'invité Jean-François Copé diffère totalement de celui, par exemple, infligé deux semaines auparavant à Olivier Besancenot. Samuel Etienne n'a ni coupé la parole (façon Fogiel) ni chicané avec condescendance le président du groupe UMP à l'Assemblée nationale. Quant à Mariette Darrigrand, la sémiologue à 0,50 € qui sert de caution intellectuelle à cet affligeant magazine, elle lui a passé la brosse à reluire alors qu'elle comparait le discours du facteur de Neuilly, «allégorique» selon elle et dont «on se fiche un peu», à «Plus belle la vie»...

On pense à «France Europe Express» où le comportement de Christine Ockrent vis-à-vis de ses invités variait nettement selon qu'ils étaient de gauche, ou socialistes et de droite. Mais si la qualité informative de «France Europe Express» était honorable, celle de «Comme un vendredi» est quasi inexistante. Que France 3 se rassure : elle n'a rien à envier à France 2 où David Pujadas a les mêmes pratiques (sensationnalisme, superficialité, parole coupée), ni même à France 5 avec Serge Moati ou Paul Amar.

Sophie et Alpharad
Mis à jour ( Samedi, 31 Janvier 2009 17:56 )  

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