Ils ne savent rien. Rien de rien. Laurence Parisot, présidente du Medef, n’en a, promet-elle, jamais entendu parler. Frédéric Saint-Geours, dirigeant de l’Union des industries et métiers de la métallurgie, n’en connaissait pas, jure-t-il, l’existence. Même Denis Gautier-Sauvagnac, son prédécesseur à la tête de la principale fédération patronale, mis en examen pour «abus de confiance» dans l’affaire des retraits d’argent en liquide sur les comptes de l’UIMM, se paie le luxe de faire dire, par le biais de son avocat, qu’il en ignorait absolument tout et qu’il ne s’en explique pas la raison d’être.
Chez PSA, l’un des acteurs les plus importants des organisations professionnelles de la métallurgie et, on s’en souvient, bien placé au palmarès des ultimes bénéficiaires de la caisse «antigrève» de l’UIMM (le constructeur automobile a reconnu avoir touché, à l’issue du long conflit social à Aulnay en 2007, 550.000 € du fonds dit d’«entraide professionnelle des industries de la métallurgie» ou Epim), on «tombe des nues», paraît-il.
Révélée mardi par Le Parisien, la double affaire du compte suisse et du magot de plus de 100 millions d’euros de «réserves» détenus par le GIM (Groupe des industries métallurgiques de la région parisienne), l’une des branches les plus importantes de l’UIMM, relance le grand bal des amnésiques du petit milieu patronal.
À Neuilly, l’UIMM roule sur l’or
Après le déclenchement du scandale, fin 2007, l’UIMM a dû admettre qu’elle disposait de plus de 600 millions d’euros de trésorerie émanant, selon elle, des excédents de sa «caisse antigrève». Et aujourd’hui, d’après les informations de nos confrères confirmées depuis par Étienne Bernard, le président du GIM depuis 2004, cette structure territoriale de l’UIMM, sise dans un immeuble cossu de Neuilly-sur-Seine et comptant parmi ses adhérents quelques-unes des plus grandes entreprises industrielles françaises implantées en Île-de-France (Renault, PSA, Dassault, EADS, Areva, Thales, Safran, IBM, etc.), bénéficie de fonds propres évalués à 112 millions d’euros. Ce qui équivaut, pour cette «simple» déclinaison locale d’une «banale» fédération patronale, à une trésorerie plus de trois fois supérieure au budget annuel de fonctionnement déclaré par le Medef lui-même...
Autre élément de ces révélations, les barons de la métallurgie de la région parisienne réunis au sein du GIM ont, admettent-ils aujourd’hui, tablé sur le secret bancaire en Suisse. Selon eux, au printemps 1968, dans le contexte pour le moins agité des grèves ouvrières et du mouvement étudiant, une opération confidentielle aurait conduit les têtes pensantes du GIM à «mettre suffisamment d’argent à l’abri pour pouvoir repartir de zéro, là-bas (à Genève - NDLR), si la maison tombait en France». Et ce n’est qu’à la fin de l’année dernière que le GIM se serait décidé à clôturer ce compte secret en Suisse. D’après Étienne Bernard, interrogé mardi par Le Parisien, il n’était plus doté que de 3 millions d’euros et il «n’a fait l’objet d’aucun mouvement, ni dépôt ni retrait, depuis au moins dix ans». Dans l’édition d’hier, Jean-Loup Giros, président d’honneur du GIM et ancien trésorier de la Fédération des industries mécaniques (FIM), affirme, «faute d’avoir réussi à convaincre Étienne Bernard de la nécessité de rapatrier ces fonds», avoir pris seul ses responsabilités à l’hiver 2008 : «J’ai moi-même rapatrié l’argent déposé en Suisse en novembre dernier», lance-t-il. Au passage, Jean-Loup Giros admet sans fard en avoir transporté une partie en liquide.
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