En juillet dernier, nous avions noté que l'article 4 de la loi n°2008-758 du 1er août 2008, relative aux droits et aux devoirs des demandeurs d'emploi, imposait au gouvernement de déposer au Parlement, «avant le 30 juin 2011», «un rapport concernant l'impact sur le retour à l'emploi des intéressés de la suppression progressive de la dispense de recherche d'emploi (DRE) et, le cas échéant, au vu de ces éléments», ledit rapport devait avancer des préconisations «sur l'opportunité d'un aménagement de la législation»...
Les années Sarko : un acharnement inégalé contre les seniors
Lundi, la dispense de recherche d'emploi des chômeurs âgés n'existera plus. On rappelle que, depuis janvier 2009, l'accès à la DRE a été progressivement réduit jusqu'à extinction complète du dispositif au 1er janvier 2012. «A 57 ans et demi, on n'est pas fichu, on peut retrouver un emploi», disait alors Christine Lagarde... La crise économique a totalement anéanti ces délires idéologiques. Non seulement le chômage des seniors n'a jamais été aussi élevé, mais il progresse bien plus vite que celui des autres tranches d'âge. Signalons en passant que leur éviction du marché du travail a été grandement facilitée par le dispositif de rupture conventionnelle, qui cartonne depuis sa création en juin 2008...
La DRE bénéficiait surtout aux ouvriers et aux employés. Une fois supprimée, les plus âgés sont soumis au suivi mensuel personnalisé jusqu'à l'absurde, certains collectionnant les prestations occupationnelles (un vrai gâchis !), d'autres subissant des pressions (incitation à se déclarer en longue maladie, menaces de radiation…). Comment les agents de Pôle Emploi, déjà débordés, pourraient-ils leur trouver du travail alors qu'ils n'y arrivent pas non plus pour les jeunes ? Ces seniors dont les entreprises ne veulent pas finissent dans le noyau dur des chômeurs de longue durée en attendant un départ à la retraite repoussé de deux ans. Cerise sur le gâteau, l'AER (allocation équivalent retraite) a également été supprimée : transformée pour deux ans en ATS (allocation transitoire de solidarité), ses conditions d'accès ont été restreintes. Les seniors sont non seulement condamnés au chômage et au flicage, mais à la grande pauvreté.
Face à une telle situation, il est légitime de s'interroger. La suppression de la DRE a-t-elle été bénéfique ou non ? Mais où est donc ce rapport ?
La chasse au rapport fantôme
Nous avons contacté nos députés respectifs pour savoir s'il avait bien été déposé. Triste constat : sur les quatre élu(e)s sollicité(e)s avec insistance, seuls deux ont daigné répondre et une seule y donner suite. Nous remercions Mme Françoise Branget, députée du Doubs qui a rempli honorablement sa fonction, car être député ne consiste pas qu'à voter des lois à l'Assemblée mais aussi être à l'écoute de ses concitoyens.
Mme Branget a interrogé successivement le Ministère du Travail, le Président de la commission des Affaires sociales, Pierre Méhaignerie, ainsi que les administrateurs relevant de cette commission, pour leur demander les suites relatives à la parution de ce document, mais elle n'a toujours pas obtenu de réponse. C'est pourquoi, le 25 octobre, elle a finalement posé une question écrite au Journal Officiel (n°120477) auprès du Ministre du Travail et de l'Emploi, Monsieur Xavier Bertrand, afin qu'il lui indique l'état d'avancement de la rédaction de ce rapport qui, à ce jour, ne semble pas avoir été publié.
Selon la réglementation en vigueur, Xavier Bertrand disposait d'un délai de deux mois pour y répondre, soit jusqu'au 25 décembre. Or, Xavier Bertrand s'est drapé dans son mutisme. A défaut de réponse et en guise de relance sont prévues dans la procédure "les questions signalées", mais ces dernières ne peuvent être effectuées que par les Présidents de groupe à l'Assemblée nationale. Le 9 décembre, notre adhérent du Doubs qui était en contact avec Mme Branget s'est donc tourné vers le secrétaire départemental du PS, le priant de saisir Monsieur Jean-Marc Ayrault, président du groupe socialiste, afin qu'il interpelle le ministre Xavier Bertrand, ce dernier devant fournir une réponse dans un délai de dix jours comme le prévoit la réglementation.
EN VAIN.
Monsieur Nicolas Bodin, secrétaire départemental du PS pour le Doubs, n'a pas donné suite.
Moralité : Notre gouvernement, qui n'a que «la France des droits et des devoirs» à la bouche et martèle que les chômeurs ont surtout des devoirs, ne se sent aucune obligation, voire aucun courage d'appliquer les devoirs qu'il s'impose à lui-même. Face à l'échec de ses politiques de l'emploi dont les chiffres du chômage, notamment celui des seniors, se révèlent particulièrement accusateurs à la veille des élections présidentielles, l'UMP ne peut qu'escamoter tout ce qui est gênant… comme un rapport qui serait un énième constat d'échec.
Quant à nos élus, quand ils ne sont pas intouchables, ils n'en ont visiblement cure.
Pourtant, d'un point de vue statistique, le rétablissement de la DRE (qui ne coûterait pas un rond) réduira les chiffres du chômage de quelques dizaines de milliers. Mais l'UMP, enferrée dans ses idéologies, reste droit dans ses bottes. Pour l'UMP, lutter contre le chômage a toujours consisté à lutter contre les chômeurs.
Maintenant, nous savons que ce bilan d'étape n'a jamais été déposé au Parlement.
Et nous nous demandons s'il a seulement été réalisé...
SH
A suivre...
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