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Contrat de génération : écoper la mer avec une petite cuillère ?

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Mesure phare du programme de François Hollande, elle est censée lutter contre le chômage des jeunes et des seniors.

Le contrat de génération est la mesure phare du programme présidentiel de François Hollande, celle qu'il a défendu bec et ongles face à ses adversaires socialistes lors de la primaire, il y a un an, et qui symbolise son engagement envers la jeunesse. Accélération du calendrier oblige, le gouvernement veut un projet de loi ficelé et soumis au Parlement avant la fin de l'année. Le ministre du Travail Michel Sapin a adressé hier aux partenaires sociaux un document de cadrage des négociations. Syndicats et patronat ont donc quatre mois pour définir les modalités précises d'application de ce dispositif.

Quel est l'objectif du contrat de génération ?

L'idée est de faciliter l'embauche de jeunes en CDI tout en maintenant les seniors dans l'entreprise. Ce dispositif vise donc à répondre aux deux principales victimes du chômage en France : les jeunes de moins de 25 ans et les seniors de plus de 57 ans [1].

Selon une enquête récente du Cereq, un jeune sur deux a été au moins une fois au chômage au cours de ses trois premières années de vie active et 70% des premiers emplois sont des CDD. 22% des jeunes Français de moins de 25 ans sont au chômage, selon l'Insee. De l'autre côté de l'échelle des âges, seuls 43,5% des 55-64 ans sont en emploi.

Quels sont les avantages pour les entreprises ?

Ils varient en fonction de leur taille. Le dispositif cible en priorité les PME. Les entreprises de moins de 300 salariés seront incitées à signer des contrats de génération entre un jeune embauché en CDI et un salarié senior en poste, nommément désignés, par une aide forfaitaire annuelle de 2.000 euros par salariés, soit 4.000 euros au total. Cette aide sera versée pendant trois ans pour les jeunes et jusqu'à la retraite pour les seniors. Elle viendra s'ajouter aux allégements de charges existants sur les salaires inférieurs à 1,6 Smic.

D'ores et déjà, les petites entreprises sont satisfaites.

Les entreprises de plus de 300 salariés ne pourront pas bénéficier de cette aide. Elles seront néanmoins contraintes de négocier d'ici au 30 septembre 2013 un accord collectif "contrat de génération". A défaut, elles se verront appliquer une pénalité équivalente à 1% de leur masse salariale et perdront une partie des allègements de charges sur les bas salaires dits "allègements Fillon", qui coûtent au total 21 milliards d'euros par an à l'Etat. Cet accord d'entreprise devra préciser la stratégie et les engagements sur l'emploi des jeunes et des seniors.

Quelles modalités reste-t-il à négocier ?

Les partenaires sociaux sont invités à négocier sur les modalités d'application du contrat de génération (l'accompagnement des jeunes, la formation professionnelle, la valorisation du tutorat par l'entreprise, l'égalité hommes-femmes, etc). Plus précisément, dans les grandes entreprises, les organisations représentatives des salariés devront négocier, avec la direction, la teneur de l'accord collectif "contrat de génération" : objectif de recrutements de jeunes en CDI, politique de formation des jeunes, conditions de travail des seniors, aménagement des fins de carrière, transmission des compétences, etc.

Combien cela va-t-il coûter ?

Le gouvernement prévoit de créer 500.000 contrats de générations sur cinq ans, soit 100.000 par an, pour un coût estimé initialement entre 2 et 3 milliards par an. Néanmoins, en raison de l'absence d'aides financières pour les grandes entreprises, le coût sera "bien inférieur à 2,5 milliards", affirme un proche de Michel Sapin.

Est-ce une mesure efficace contre le chômage ?

"Sur le principe, et si l'on part du constat que les jeunes et les seniors sont les plus touchés par le chômage, c'est une bonne chose", note Eric Heyer, économiste à l'OFCE. "Mais il risque d'y avoir d'importants effets d'aubaine et de substitution", avertit-il. En clair : les entreprises vont recruter en contrat de génération des jeunes qu'elles prévoyaient de toute façon embaucher. Ainsi, un millions de jeunes ont signé des CDI l'an dernier, majoritairement dans des grands groupes, dans le secteur industriel et avec des profils très qualifiés. En ciblant le dispositif sur les PME, le gouvernement gomme au moins cet effet d'aubaine. Mais pour qu'il soit le plus efficace, il faudrait également le cibler sur les jeunes peu ou pas qualifiés.

Même en gommant tous les effets d'aubaine, ces contrats de génération ne suffiront pas à faire reculer le chômage. Selon l'OFCE, le nombre d'emplois nets créés grâce à ce dispositif ne devrait pas dépasser 21.000 au total sur le quinquennat. En effet, la population active croît d'environ 150.000 actifs chaque année. Et avec une croissance attendue à moins de 1% l'an prochain, on peut s'attendre à 100.000 destructions d'emplois. Il faudrait donc plus de 250.000 emplois aidés pour ne serait-ce que stabiliser la courbe du chômage. Même avec les 100.000 emplois d'avenir prévus en 2013, le compte n'y est pas.

(Source : L'Expansion)


[1] Et les seniors de 50 à 57 ans, on s'en tape ?
Rappel des chiffres : Le nombre des chômeurs de plus de 50 ans inscrits fin juillet dans les catégories ABC de Pôle Emploi s'élevait à 932.300 dont plus de la moitié (484.800) sont des femmes. Progression annuelle : +15,3% (et +16,3% pour les seniors de catégorie A, sans aucune activité). En comparaison, les moins de 25 ans inscrits fin juillet dans les catégories ABC de Pôle Emploi étaient 671.200 (+6,7% sur l'année).
De même, la durée moyenne d'inscription des sortants en ABC était stable à 143 jours pour les moins de 25 ans, tandis qu'elle s'élèvait à 408 jours pour les plus de 50 ans (+10 jours sur un an). Donc, les plus touchés par le chômage ne sont pas les jeunes, mais les seniors… et les femmes.

Si le contrat de génération limitera vaguement la casse de l'emploi des plus de 57 ans, maintenus en poste jusqu'à 60 ans par cette carotte de 6.000 euros offerte à l'entreprise (2.000 € par an pendant trois ans), il ne pourra rien faire pour ceux — et surtout celles — qui ont massivement été exclu(e)s du monde du travail et croupissent aux minimas sociaux ou sans aucun revenu de remplacement.



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