Fin janvier 2013, environ 300 millions d'euros — soit, par cas, 550 euros en moyenne — versés par erreur à des chômeurs n'avaient pas été recouverts. L'opérateur public distingue ces "allocations indument perçues" des fraudes avérées, car il s'agit d’"erreurs de bonne foi", imputables aux demandeurs d'emploi… ou aux agents de Pôle emploi.
Selon l'Unedic, l'organisme paritaire qui gère l'assurance-chômage, "ces indus représentent 2,5% à 3% des allocations versées, un ratio à peu près stable sur 10 ans". Ils relèvent, dans 80% des cas, de courtes périodes de travail non déclarées ou déclarées trop tard (en intérim notamment) par les inscrits à Pôle emploi. Le reste peut relever d'erreurs lors du calcul des droits à indemnisation, ou encore de la méconnaissance des règles qui régissent le cumul d'une allocation avec d'autres revenus.
Pour les rembourser, des échéanciers sont proposés. Et certaines dettes peuvent être effacées, par Pôle emploi (en-dessous de 650 euros) ou des "instances paritaires régionales" qui tranchent de "manière discrétionnaire". Mais les chômeurs ne sont pas toujours informés de ces possibilités.
Un problème "central"
Les associations (MNCP, AC!, Apeis), reçues par Michel Sapin un peu plus d'un mois après l'immolation d'un demandeur d'emploi à Nantes, jugent ce problème "central". Soutenues par le SNU et SUD Pôle emploi, elles dénoncent des "conséquences catastrophiques", dans un contexte de précarisation croissante.
"On demande que soit pris le temps de réexaminer les dossiers car, dans une famille de chômeurs, c'est de l'argent dépensé : tout va à la nourriture ou à la résorption des dettes", argumente Malika Zediri de l'Apeis. "Il y a des situations ubuesques, avec parfois des conséquences dramatiques", reconnaît Colette Pronost (SNU) pour laquelle le cas du demandeur d'emploi de Nantes — qui était en train de rembourser un indu — n'est que "la face émergée de l'iceberg". Selon elle, l'explosion des "petits boulots" et de leur cumul avec une allocation, le manque de formation des agents et l'accumulation de dossiers, alors que le chômage est en hausse depuis 21 mois, sont en cause.
Les permanences et les forums internet des associations regorgent de témoignages de détresse de personnes à qui on réclame des sommes pouvant atteindre plusieurs milliers d'euros, parfois plus d'un an après les faits. En décembre 2010, un chômeur s'était suicidé après avoir reçu un recommandé du Pôle emploi lui enjoignant de rembourser un trop-perçu de 8.944,76 € : la plainte de sa famille a été classée sans suite.
Rose-Marie Péchallat, de Recours-radiation, estime que "ces trop-perçus sont devenus le cauchemar des chômeurs". Cette ex-conseillère de l'ANPE raconte notamment les nombreux cas de chômeurs qui ont pris le statut d'auto-entrepreneur et auxquels on réclame parfois plus de 10.000 euros car ils ont touché l'aide au retour à l'emploi (ARE) au-delà de la limite prévue de 15 mois. "Il n'y a même pas de verrou informatique pour arrêter les versements", s'énerve-t-elle.
Des SMS pour réclamer les indus
Au-delà, les associations estiment que certains "trop-perçus" ne seraient pas fondés. "Il y a beaucoup d'erreurs qui, après recalcul, laissent même apparaître une dette de Pôle emploi", note Mme Péchallat.
De son côté, l'opérateur public s'est récemment engagé dans un "plan d'action pour l'amélioration du taux de recouvrement des indus". La "cible" est fixé à 68% de dettes soldées, alors que le taux a baissé au fil de 2012 (65% en octobre contre 72,4% en janvier). Un "guide", diffusé en février aux managers, vise ainsi à "développer une culture autour des enjeux du recouvrement des indus". Conséquence : depuis peu, en Rhône-Alpes et en Aquitaine, certains demandeurs d'emploi reçoivent des SMS les enjoignant de rembourser leurs créances. Une méthode qui fait hurler syndicats et associations.
Le médiateur de Pôle emploi, Jean-Louis Walter, a annoncé travailler à un rapport sur le sujet, qu'il espère présenter "avant l'été". Le directeur général Jean Bassères "demande à comprendre ce que les associations font remonter", assure-t-il. M. Walter rappelle que "les 6,5 millions de dossiers traités annuellement par Pôle emploi génèrent 560.000 réclamations", en majorité pour des problèmes d'indemnisation. Pour le médiateur, "un indu, ça se rembourse, la question n'est pas là. Mais demander de rembourser à des gens qui n'ont rien, c'est dramatique".
(Source : Le Point)
NDLR : Pour info => INDUS, étapes et procédures (à consulter en pdf)
• La phase amiable
• La phase contentieuse
• L'indu solidarité-Etat (ASS/AER…)
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