Cette loi visait à faciliter le recours en justice des salariés en étendant les motifs sanctionnables dans le Code du travail (origine, sexe, appartenance syndicale…) à l'orientation sexuelle, l'apparence physique, le patronyme et l'âge. Elle a bousculé les pratiques en aménageant la charge de la preuve : jusqu'alors, en cas de litige, c'était au salarié de prouver qu'il était victime de discrimination. Désormais, c'est à l'employeur de se justifier.
Au Parlement, ses opposants avaient prédit un "engorgement des tribunaux" et estimé qu'on allait "transformer l'employeur en bouc-émissaire". Cinq ans après, si le contentieux civil a légèrement augmenté, c'est principalement pour des plaintes liées à l'appartenance syndicale. "Ce sont des procès menés souvent de façon collective, qui ont une visibilité, et les syndicats ont maintenant une grande maîtrise en ce domaine", explique Manuela Grévy.
Mais parmi les décisions de justice civile et pénale, "la loi n'a pas permis, loin de là, de faire émerger toutes les discriminations qu'on pressent dans les entreprises, notamment raciales", ajoute-t-elle. Les procès en ce domaine restent peu nombreux, car les victimes n'osent pas porter plainte individuellement. Beaucoup de ces affaires de discrimination ethnique sont soutenues par des associations anti-racistes : "Cela restreint leur nombre", estime Manuela Grévy qui ajoute cependant que les syndicats "semblent commencer à monter au créneau sur les affaires concernant les femmes". Ces discriminations, qui concernent surtout les inégalités salariales, n'ont pas vraiment profité de la loi. Et les nouveaux motifs de discrimination sont "quasiment absents" des tribunaux.
Concernant les sanctions, le rapport souligne une petite évolution : les juges au civil hésitent moins à ordonner non plus seulement une indemnité mais le rétablissement de la victime dans ses droits, avec rattrapage dans la hiérarchie de l'entreprise ou dans le salaire. En revanche, alors qu'elle a une valeur symbolique et une portée médiatique plus importante, la sanction pénale "est discréditée par l'insignifiance des peines prononcées", estiment les deux juristes. Le rapport dénonce "l'inertie des acteurs de la chaîne pénale, de certains inspecteurs du travail jusqu'aux magistrats du parquet comme du siège".
Patrick Aubert, de la Direction des populations et migrations au ministère du Travail, pense que cette loi "n'est pas assez connue" et estime essentiel de "sensibiliser syndicats, associations, conseillers prud'homaux, barreaux, pour que tous s'en emparent". Selon lui, la HALDE (Haute autorité de lutte contre les discriminations), récemment mise en place, devrait jouer un rôle en ce sens... En ce qui concerne notre plainte du 25 Mars 2005 contre 70 entreprises ayant diffusé 40 annonces contenant des mentions d'âge discriminatoires, le Parquet de Paris nous a dit qu'elle était toujours "en attente de décision".
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