Jugé trop vieux par la Ligue nationale du football professionnel (sa charte prévoit qu'un entraîneur ne peut exercer que jusqu'à 65 ans), Guy Roux, bientôt 69 ans, s'est vu invalider son dernier contrat avec le Racing Club de Lens. Il a donc fait appel devant le Comité National Olympique et Sportif Français, persuadé que celui-ci, qui est régi par la loi européenne et non la charte professionnelle, lui donnera raison : «Aucune discrimination n’est permise, ni pour le sexe ni pour l’âge ni pour la religion. Et la loi européenne dit la même chose. Donc, je pense que dans l’étape juridique suivante, c’est à dire le CNOSF, on me rendra justice», a déclaré l'entraîneur.
Récupération. A première vue, cette histoire peut paraître effectivement scandaleuse : pourquoi se priver des compétences d'une personne talentueuse à cause d'une limite d'âge ? C'est ainsi que Christine Lagarde, puis Nicolas Sarkozy, ont réagi. Le nouveau président de la République a considéré que «c'est plus la règle qui est vieille que Guy Roux» (la charte de la LFP date de 1974 et a été élaborée collectivement entre joueurs, clubs, et dirigeants de la Ligue et de la Fédération). La nouvelle ministre de l'Economie a dit qu'il est «stupide de dire à quelqu'un de bon et de compétent : "Vous ne pouvez pas travailler parce que vous êtes trop vieux". Ces limites d'âge, ces barres fatidiques, il faut réfléchir pour les supprimer». Et lundi après-midi Roselyne Bachelot, la nouvelle ministre des Sports, recevra personnellement la star du foot...
Tout cela est parfait : un senior célèbre au service d'un sport national (la touche pipole est là pour parfaire le style sarkozyen…) et voilà notre Guy Roux propulsé au rang de symbole de l'éviction prématurée des salariés âgés du monde du travail !

«Sur ce sujet, nous allons être intraitables ! Il y aura une pression qui va être mise sur les entreprises pour qu’elles gardent les salariés jusqu’à l’âge de la retraite», a déclaré François Fillon il y a quelques semaines alors que depuis cinq ans, l'UMP au pouvoir a échoué sur ce point. A l'instar du chômage de masse, le problème de l’emploi des seniors reste récurrent voire structurel, malgré le plan national d'action concerté lancé en juin 2006 - une mascarade marketing qui a coûté la bagatelle de 5 millions d'euros - et qui a succédé à l'accord interprofessionnel entre syndicats & patronat signé au mois de mars 2006. Autre mascarade pour Annie Thomas, présidente CFDT de l'Unedic qui dénonça alors «le double langage d'un patronat qui négocie un accord (en faveur de l'emploi des seniors) d'un côté, mais agit différemment dans les entreprises. [...] Les chefs d'entreprise se séparent en premier lieu des seniors. Les salariés, bien souvent, s'en accommodent et parfois, les syndicats utilisent ce dispositif pour régler des situations difficiles, lors de plans sociaux par exemple». Et d'ajouter qu'à ses yeux «la politique de maintien dans l'emploi des seniors reste très virtuelle»...
Hypocrites. Que pensent Nicolas Sarkozy et Christine Lagarde des licenciements de solidarité, un nouveau concept fumeux qui justifie qu'on se débarrasse de ses salariés âgés pour maintenir l'emploi des salariés plus jeunes ? Que pensent Nicolas Sarkozy et Christine Lagarde de la dérogation exceptionnelle de l'Elysée dans le cas Jallatte où l'âge des préretraites, légalement prévu à 57 ans, a été ramené à 55 ans pour faciliter le plan social ? Qui, dans ce gouvernement, ose d'ailleurs s'opposer aux massives suppressions de postes "sans licenciements" qui poussent vers la porte des milliers de salariés âgés bien avant l'heure, et qu'on ne remplacera même pas par des jeunes ?
Alors tant mieux pour ceux qui, contraints ou non, sont sûrs de percevoir une retraite. Mais qui s'inquiète des "seniors" de moins de 55 ans qui goûtent désormais au chômage et à la précarité, et ont bien du souci à se faire pour leurs vieux jours puisqu'ils se sont même pas sûrs de pouvoir travailler jusqu'à 65 ans ? Savez-vous ce que leur a concocté le gouvernement précédent afin de les rendre plus "attractifs" auprès des employeurs qui les discriminent ? Des contrats d'avenir spécifiques et un CDD senior au rabais... Drôle de façon de reconnaître leurs compétences et de les payer à leur juste valeur.
Privilège. Aujourd'hui, travailler longtemps après l'âge légal de la retraite est réservé à quelques rares métiers : ceux qui ne sont pas trop fatigants (professions intellectuelles), ceux qui procurent une passion éternelle (musicien, entraîneur de foot) ou ceux qui ont trait au pouvoir et au prestige (chef d'entreprise, homme politique). Guy Roux fait partie de ces exceptions et il est fort bien rémunéré, qu'il entraîne des joueurs ou qu'il apparaisse dans des spots de pub, alors que la plupart des seniors qui souhaitent poursuivre une activité après 60 ans seront, à la rigueur, acceptés comme bénévoles, parfois comme bouche-trous, ou largement sous-payés dans le cadre du cumul emploi-retraite (encore une aubaine pour les employeurs)...
Guy Roux est un privilégié et, en cela, n'est absolument pas représentatif de la majorité des seniors. Le problème de Guy Roux n'est donc pas celui des seniors : que ce gouvernement cherche à l'accaparer comme symbole pour se faire mousser est une vaste imposture. Et les petits arrangements qu'on s'apprête à lui trouver ne profiteront qu'à lui seul tandis que les autres, tous ceux qui aimeraient bien travailler pour avoir droit à une pension décente, resteront encore longtemps sur le banc de touche.
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Commentaires
En quelques années, Guy Roux s’est retourné contre lui-même. A l’origine de la charte du football professionnel qui fixe à 65 ans l’âge limite pour pouvoir entraîner un club de l’élite au motif qu’il fallait laisser la place aux jeunes, le coach emblématique d’Auxerre est victime aujourd’hui de sa propre initiative. Source
OUI : place aux jeunes !!! Répondre | Répondre avec citation |
S'il ne conteste pas le droit de l'intéressé de rester entraîneur, le patron du syndicat des joueurs estime en effet que lorsqu'il officiait à Auxerre, Guy Roux n'a eu de cesse de bafouer ce droit de travail pour bloquer les joueurs en fin de contrat.
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La nouvelle locataire de Bercy annonce que le gouvernement "va défendre toute une panoplie de mesures fiscales pour encourager le travail tout au long de la vie".
Après avoir défendu Guy Roux, Christine Lagarde considère dans Le Parisien qu’"il y a une réflexion à mener dans le cadre de la réforme des retraites prévue en 2008. (…) Pourquoi ne pas permettre à ceux qui le veulent de travailler plus longtemps ? Pourquoi s'arrêter à 60 ans voire 65 ans ?", lance la ministre de l'Economie. "Quand les gens sont bons dans leur travail, pourquoi les priver d'exercer leur talent ? Le principe du couperet qui voudrait qu'à 65 ans on s'arrête n'est pas une bonne idée. Je lui préfère le principe de la qualité et du mérite". Répondre | Répondre avec citation |
Mr Fillon veut etre intraitable: Il l'a été avec les chômeurs recalculés en 2004, mais on attend toujours une mesure aussi musclée contre les employeurs qui discriminent ouvertement sans finalement risquer grand-chose.
Puisqu'il est 1er ministre, à la tête d'une majorité confortable au parlement, qu'attend Mr Fillon pour modifier la loi qui réprime toutes les discriminations dans l'emploi ?
Je rappelle que, même si la discrimination est prouvée, un plaignant ne peut obtenir de dommages et intérêts, et l'employeur, souvent de très grosses entreprises, ou des recruteurs professionnels, sont condamnés- quand ils sont poursuivis - à des amendes plutôt symboliques sur réquisition des procureurs qui ne semblent pas bien "méchants" pour ce genre de délit.
Dans ce contexte. Il n'y a donc aucune raison que cela change.
Mr Fillon, VOUS avez le pouvoir ! Changez la loi, prévoyez des dommages et intérêts musclés aux discriminés qui en font la preuve, vous verrez, ça change vite quand on frappe au portemonnaie …
Et la méthode ne devrait pas déplaire à votre président, lui qui adore les US doit savoir comment ça se passe la-bas . Un employeur convaincu de discrimination sait ce que ça lui coute… Répondre | Répondre avec citation |
«Le Bureau, à la majorité de ses membres, a accepté la proposition de conciliation du CNOSF proposant l'homologation du contrat de Guy Roux à titre dérogatoire», a annoncé la LFP. La décision a été prise «compte-tenu des doutes exprimés sur la légalité de la limite d'âge imposée aux entraîneurs et de l'expérience professionnelle remarquable de l'intéressé», précise l'instance. «Dans le même temps, le président de la LFP, Frédéric Thiriez, demande aux partenaires sociaux d'entamer dans les meilleurs délais le nécessaire travail d'actualisation de la Charte du Football Professionnel.» Répondre | Répondre avec citation |
«Je n'ai plus la formidable "grinta" qui m'a permis de remporter tant de matches», a lâché Guy Roux samedi pour expliquer sa démission de son poste d'entraîneur de Lens. Une décision qui a résonné comme un coup de tonnerre sur la 5e journée de L1.
Recrue la plus spectaculaire sur les bancs de Ligue 1 cet été, celui qu'on n'imaginait pas ailleurs qu'à Auxerre, qu'il a entraîné pendant 43 ans, ne s'y voyait pas non plus, finalement. «C’est plus honnête de ma part de partir. C’est sans doute la fin de ma carrière», a-t-il expliqué avec un brin de tristesse dans la voix.
Le départ plus que poussif du Racing n'est donc pour rien dans sa décision, puisque le sorcier bourguignon (né à Colmar) fait état d'une «impossibilité dans les moments décisifs de hausser le ton, non pas de la voix, mais hausser le ton moral de la psychologie qui fait la force d'un entraîneur». Autrement dit, Guy n'a plus l'envie d'avoir envie. Son témoignage sincère fait disparaître l'autre soupçon d'un départ pour cause de désaccord contractuel en matière de sponsoring. Il y a trois semaines, Guy Roux aurait d'ailleurs déjà eu une petite alerte (lors du match contre le PSG).
«Ce qu’il y a à faire dans ces cas-là, c’est écouter, a dit Gervais Martel. Guy Roux est venu me voir, et il m’a expliqué pourquoi il ne pourrait pas continuer avec nous. C’est quelqu’un que je respecte beaucoup, et je le crois quand il me dit qu’il ne se sentait pas capable d’aller plus loin».
Le président du RCL a finalement confirmé, après l'avoir nié, la venue de Jean-Pierre Papin pour succéder à Guy Roux. Au cours d'une conférence de presse, le président a indiqué que JPP serait à la Gaillette lundi matin pour une présentation officielle en présence de son prédécesseur. L'ex-entraîneur lensois effectuera la transition avec son successeur, détaillera les forces de l'effectif et donnera des renseignements sur l'équipe de Berne que l'équipe affrontera jeudi en match retour du 2e tour préliminaire de la Coupe de l'UEFA. Le président lensois a en outre indiqué que le mercato n'était pas terminé pour Lens, précisant qu'«une à deux arrivées» sont encore programmées.
(Source : 20 Minutes) Répondre | Répondre avec citation |
Guy Roux ne pouvait entraîner une autre équipe que l'AJ Auxerre, club dans lequel il avait pratiquement tous les pouvoirs (du choix des recrues, aux salaires des joueurs… y compris aller les chercher en boîte de nuit quand ceux-ci faisaient la noce après match).
Bref, Roux était le seul maître à bord à l'AJA.
En entraînant Lens, il s'est retrouvé dans un club "normal", où l'entraîneur doit rester à sa place (celle d'entraîneur), le vrai pouvoir se trouvant chez le Président du club et dans son staff managérial.
C'est donc plus une question d'ego qu'une question d'âge, croyez-moi.
À Auxerre, dans l'Yonne, sur le terrain sportif, financier et même politique, Roux était le "roi".
Mais le "roi" d'Auxerre est aujourd’hui un "bouffon".
L'erreur de Roux, c'est d'avoir "abandonné" l'AJ Auxerre (qui depuis se traîne dans le classement) alors qu'il n'y était pas contraint.
Puis, d'avoir joué les "discriminés" pour entraîner Lens…
Pour finalement se retirer d'une manière "humiliante" comme il le concède. Répondre | Répondre avec citation |