Prévue sur trois ans, la baisse de 1% des cotisations chômage (- 0,3% en 2009, - 0,4% en 2010 et - 0,3% en 2011) avait été fixée par François Fillon en juillet dernier «pour augmenter à due concurrence les cotisations retraites» [1]. Laurence Parisot en avait également fait «l’enjeu numéro un» de la nouvelle convention Unedic.
En dépit des perspectives catastrophiques sur le front de l'emploi martelées par les syndicats et confirmées par l'INSEE, l'ACOSS et l'Unedic elle-même, le patronat s'enlisait dans une obstination aveugle : on ne sait pas encore ce qui a motivé ce retour à la raison… et, surtout, ce qu'il recèle.
Il n'y aura donc pas de baisse de la cotisation chômage au 1er janvier prochain. Ce changement de stratégie sera inscrit dans le nouvel avant-projet patronal envoyé aujourd'hui aux syndicats. Reste à savoir si le ventre mou du syndicalisme (CFDT, CFTC et FO), qui a payé son sens de la compromission en essuyant un premier avertissement aux élections prud’homales, laissera ouverte la boîte de Pandore en se pliant à cette nouvelle concession : autoriser tout de même la baisse des cotisations à partir de fin 2009 si la situation du chômage et les finances de l'Unedic s'améliorent...
Filière inique
En attendant, le patronat a proposé d'instaurer une «filière unique» où l'ouverture des droits se ferait plus tôt — au bout de quatre mois de travail au lieu de six — contre un raccourcissement drastique de la durée d'indemnisation — à 30 mois (contre 36 à ce jour) pour les chômeurs âgés, dont l'âge minimum serait relevé de 50 à 55 ans, et à 18 mois (contre 23) pour les autres —, ce qui aurait pour effet de priver de couverture entre 179.000 et 377.000 personnes par rapport au système actuel. Un saupoudrage qui, sous prétexte d'intégrer des demandeurs d’emploi supplémentaires, en «recalculera» des milliers d'autres avec, toujours, le même objectif : permettre au régime de revenir à l'équilibre sur le dos des victimes de la crise, malgré les préconisations de Bruxelles.
Le bras de fer promet d'être serré. Les «partenaires sociaux» de l'Unedic vont se réunir demain pour la sixième et (peut-être) avant-dernière fois : ils seront accueillis par un rassemblement de syndicats et d'associations de défense des chômeurs, intermittents et précaires en colère, lassés qu'on statue sur leur sort en les sacrifiant. Et si, au 23 décembre, aucun accord n'est conclu, les négociations pourraient jouer les prolongations en janvier, au grand dam de Nicolas Sarkozy qui exhortait patronat et syndicats à faire vite.
[1] «Le système des vases communicants est la grande ressource de ceux qui veulent ne pas faire grand chose en réalité, tout en donnant l’impression qu’ils s’activent et résolvent les problèmes : ils bouchent un trou en en creusant un autre», a réagi l'économiste Jacques Bichot sur ce projet de transfert de cotisations consistant à déshabiller les chômeurs pour habiller les retraités, tandis que les racines du déficit de la protection sociale, elles, sont ailleurs...
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Commentaires
Une première rédaction de l'article 8 consacré aux cotisations, qui était jusque-là réservé, va venir alimenter les discussions. Et, sauf changement de dernière minute, le patronat ne devrait pas choisir d'afficher un objectif de baisse immédiate des cotisations. Les révisions successives à la baisse des prévisions de croissance et des perspectives d'emploi imposent une grande prudence. Aussi s'oriente-t-on vers un scénario ressemblant à celui de la précédente négociation sur l'assurance-chômage en 2005 : l'affichage d'un calendrier de baisse des cotisations sous réserve de l'évolution de la conjoncture, et donc de l'évolution de la situation financière du régime. Une baisse dont on voit mal qu'elle puisse intervenir avant 2010, au mieux.
Le patronat devrait aussi faire un geste d'ouverture sur les paramétrages de la filière unique d'indemnisation qu'il propose, et notamment le rapport entre le nombre de jours cotisés et le nombre de jours indemnisés (il proposait initialement 0,8 contre 1 pour les syndicats), ainsi que sur la durée maximale d'indemnisation, qu'il fixait jusque-là à 18 mois, et de la période de référence pour le calcul des droits. Il ne devrait en revanche pas, en tout cas pour l'heure, descendre le minimum de cotisation à 4 mois (au lieu de 5).
Mais la négociation s'annonce serrée pour une raison simple : si la baisse de cotisations peut être différée, la réforme ne devra pas coûter 1 euro, estime le Medef.
(Source : Les Echos)
Parallèlement, lors de sa conférence de presse mensuelle, Laurence Parisot a indiqué qu'en contrepartie, elle demandait au Premier ministre François Fillon "de suspendre également son projet d'augmenter les cotisations retraite". Répondre | Répondre avec citation |
"Ils comptent aborder les annexes 8 et 10 à l'issue de la conclusion, le 23 décembre, de la nouvelle convention. Les annexes 8 et 10 seront certainement abordées début janvier, mais nous savons que les règles du régime général vont avoir des conséquences sur elles", a-t-il dit.
Et d'ajouter : "On va vers une mise à mal de l'ensemble des dispositions de protection sociale des salariés privés d'emploi". Répondre | Répondre avec citation |