Rappel des faits : mercredi, l'annexe Eugène Varlin de la Bourse du Travail, rue Charlot à Paris 3e, squattée depuis quatorze mois par un collectif de travailleurs sans papiers, a été évacuée manu militari… non pas par la police, mais par le service d'ordre de la CGT => lire en commentaire. Depuis, les expulsés campent dehors, le long du bâtiment. L'indignation fut grande du côté de certains partis de gauche (les Verts) et d'associations comme le CRAN ou le DAL, vite tombés dans le panneau tandis que les détracteurs du syndicalisme — et de la CGT en particulier —, s'en donnaient à cœur joie. Quant aux militants cégétistes de France et de Navarre, ils sont perplexes...
Des accusations injustes
D'abord, il faut rappeler qu'avec l'association Droits Devant!, la CGT fut le seul syndicat à avoir soutenu leur combat. Les Sans Papiers travailleurs isolés de la Coordination 75 (ou CSP 75) occupaient ces locaux depuis le 2 mai 2008 afin d'obtenir leur régularisation, en vertu de l'article 40 de la loi Hortefeux qui permet la régularisation par le travail sous couvert d'une promesse d’embauche. Ils étaient entre 200 et 300 personnes à y dormir chaque nuit. Au total, 1.300 à occuper le lieu.
La CGT les a longuement soutenus dans cette démarche, mais en vain : les régularisations espérées ne sont jamais (ou peu) venues. Puis la situation s'est enlisée, l'occupation devenant stérile et la cohabitation de plus en plus difficile, limite ingérable, jusqu'à entraver l'activité syndicale en pleine période de crise.
Diviser pour mieux régner : un classique !
Le gouvernement a donc laissé pourrir une situation qui ne pouvait que dégénérer et se transformer en conflit entre la CGT et ces travailleurs. Le gouvernement applique son programme discriminatoire (recommandations de l'OCDE) qui consiste à se ménager le soutien d'une partie de l'opinion en pénalisant certains groupes. Par son refus et le pourrissement de la régularisation des sans-papiers, il a réussi à faire en sorte que la CGT et leur collectif s'affrontent. Il les a affaiblis, a cassé le front qui les unissait tout en provoquant des réactions de l'opinion défavorables à la CGT et aux sans-papiers eux-mêmes. Et pendant ce temps, nombre de patrons indélicats continue d'exploiter sans scrupules cette main d'œuvre isolée et précaire, en toute impunité.
Un mal pour un bien ?
Finalement, cette évacuation musclée et contestée aura peut-être le mérite de débloquer la situation. En effet, en jetant sur le trottoir du boulevard du Temple quelque 180 personnes, la CGT a redonné de la visibilité à leur combat et, surtout, mis la mairie de Paris — propriétaire de la Bourse du Travail — et l'Etat devant leurs responsabilités. Par le biais de la préfecture, 700 dossiers de régularisation présentés par la CSP 75 ont été transmis au ministère de l'Immigration, qui devrait prendre (enfin !) une décision ces jours-ci.
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