La prime pour l'emploi, créée en mai 2001, est un crédit d'impôt limité aux foyers dont les revenus du travail rentrent dans une certaine fourchette, et dont le revenu fiscal de référence ne dépasse pas un certain plafond. Elle est déduite de l'impôt sur le revenu à payer ou versée directement au bénéficiaire s'il n'est pas imposable. Cliquez ici pour en savoir plus...
A l'époque son objectif, totalement imbécile, consistait à «inciter au retour à l'emploi ou au maintien de l'activité» des travailleurs «modestes», alors que c'est bel et bien l'existence d'emplois en nombre suffisant qui permet de remplir le premier critère, et le bon vouloir des employeurs en ce qui concerne la nature et la pérennité des contrats pour remplir le second.
Or les emplois sont de plus en plus rares, si ce n'est de plus en plus précaires et mal payés. Vendue sous son aspect «carotte à chômeurs» supposés fainéants, la PPE est un leurre, de la même façon qu'on prétend que la «dispense de recherche d'emploi» (DRE) accordée aux chômeurs «âgés» ne les incite pas à retourner au boulot alors qu'à la base ce sont les employeurs qui les foutent dehors et, ensuite, les discriminent à l'embauche !
Qu'on se le dise : à une écrasante majorité, les gens veulent travailler et pouvoir vivre de leur travail. Le reste (PPE, RSA…) n'est qu'escroquerie intellectuelle et, une fois de plus, c'est l'argent public qui colmate les fuites, et la collectivité toute entière qui supporte les choix des entreprises et les aberrations de notre système économique.
Amortisseur de la crise
Par contre, si la PPE n'a pu qu'échouer sur la situation de l'emploi en France, en temps de crise elle joue un rôle d'«amortisseur» non négligeable, selon le bilan publié par la Direction générale du Trésor et de la politique économique (DGTPE) du ministère de l'Economie. En effet, la PPE a concerné 8,9 millions de ménages en 2008 (contre 8,7 millions en 2001 : le pourcentage de foyers fiscaux la percevant restant stable à 25%). Surtout, suite à plusieurs retouches, le montant moyen perçu par ménage est passé de 288 à 502 €, coûtant l'année dernière quelque 4,5 milliards d’€ à l'Etat (contre 2,5 à sa création). Ce que le gouvernement voit forcément d'un mauvais œil en cette période de déficits publics.
Pourtant, la PPE est un crédit d'impôt redistributif. Certes, elle ne concerne quasiment pas les 10% de foyers les plus pauvres (car pour beaucoup sans emploi), mais elle bénéficie principalement aux petits salaires et aux classes moyennes basses. «Pour la PPE 2008 versée sur les revenus de 2007, près de 65% des bénéficiaires ont un revenu d'activité annualisé situé entre 1 et 1,4 Smic et plus de 10% ont un revenu d'activité annualisé compris entre 1,4 et 2,1 Smic», note l'étude de la DGTPE. Les jeunes travailleurs (un tiers des déclarants a moins de 30 ans), les non qualifiés et peu diplômés (plus des deux tiers des déclarants sont employés ou ouvriers), bref : ceux qui souffrent le plus de la crise actuellement, en bénéficient.
Signe de la stagnation des situations professionnelles : 70% des bénéficiaires de la PPE sont toujours éligibles au dispositif l'année suivante. La DGTPE parle d’«inertie» de la PPE : c'est quand même un peu fort de café alors que ce sont les entreprises qui, crise ou pas et depuis de nombreuses années malgré les milliards d'aides publiques et d'allègements de «charges» dont elles se goinfrent, sont, elles, plus qu'inertes - pour ne pas dire totalement défaillantes - en matière salariale et, surtout, en matière de propositions d'emplois qui permettent de vivre décemment !
Encore 4 milliards à rogner
Avec l'instauration du RSA et les projets du gouvernement consistant à limiter les niches fiscales (73 milliards d’€ de manque à gagner annuel pour l'Etat, mais surtout pas question de toucher au «bouclier» des plus riches qui, lui, coûte 14 milliards !), les détracteurs de la PPE la convoitent et souhaitent la remettre en cause, tant il est plus facile de faire payer les pauvres.
Déjà, le projet de loi généralisant le Revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion disait clairement que «le RSA "chapeau" vient ainsi en déduction de la PPE. Ce mécanisme devrait permettre de réduire de 700 millions d'euros le coût de la prime pour l'emploi en régime de croisière. [...] Une autre mesure d'économie est également prévue, au titre de la PPE, sans toutefois remettre en cause ses modalités générales d'attribution. En effet, il est prévu de ne pas indexer les seuils et les limites d'attribution de la PPE, ce qui devrait permettre de réaliser une économie d'environ 400 millions d'euros». Résultat : 1,1 million de bénéficiaires en moins.
Enfin, il faut savoir que l'attribution de la PPE bénéficie d'une sorte de «sélection naturelle» puisque, chaque année, 2 à 2,5 millions de foyers sortent du dispositif soit parce qu'ils dépassent le plafond de ressources, soit parce que leur revenu d'activité est devenu insuffisant. Avec la montée en puissance du chômage, ce dernier motif va inévitablement prendre de l'ampleur.
Grâce à ces subterfuges, le coût estimé de la PPE est déjà redescendu à 3,9 milliards en 2009. Malgré cela gageons que, dès la rentrée, de nouvelles pistes vont s'ouvrir afin de diminuer encore le nombre des bénéficiaires ainsi que les montants versés : il n'y a pas de petites économies ! Affaire à suivre.
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