Face à un Etat à la recherche de ressources pour assainir les finances publiques, le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), instance rattachée à la Cour des comptes, apporte une contribution de poids. A l'occasion de la remise de son rapport, hier, à la commission des Finances de l'Assemblée nationale sur les niches fiscales et sociales bénéficiant aux entreprises, son président, Didier Migaud, a proposé une refonte qui permettrait à l'Etat de réaliser «entre 15 et 29 milliards d'euros» d’«économies budgétaires».
Au total, niches fiscales, sociales et «mesures particulières» relevant désormais du calcul normal de l'impôt totalisent cette année plus de 172 milliards d'euros (sans compter les mesures relevant des collectivités territoriales), estime le CPO qui critique au passage le flou des définitions de ces dispositifs.
Ces montants ne manqueront en tout cas pas d'agacer le patronat, qui dénonce à l'inverse et à l'envi le poids des prélèvements fiscaux et sociaux français.
[...] Sans débattre du niveau des prélèvements sur les entreprises, le CPO juge que les niches fiscales et sociales «ont connu un développement rapide et difficilement maîtrisable, ce qui nuit au nécessaire encadrement de la dépense publique». Et si certaines d'entre elles «peuvent être utiles», elles souffrent, notamment à l'aune de comparaisons internationales, d'une série de maux justifiant des économies : les niches, pointe le rapport, sont souvent génératrices d'effet d'aubaine (plus-values à long terme sur la cession de titres de participation), voire d'optimisation (bénéfice mondial consolidé, intéressement, exonération des plus-values professionnelles), trop coûteuses au regard de leur efficacité (TVA restauration, heures supplémentaires, régime «mère-filles», déductibilité des intérêts d'emprunt, «ISF PME») ou contradictoires avec d'autres priorités (exonérations de TIPP).
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NDLR : En 2005, le montant des aides publiques versées aux entreprises s'élevait à 65 milliards d'euros et représentait 4% du PIB. Depuis, aucun nouveau chiffre n'a été publié, et aucune mesure n'a bien évidemment été prise pour réévaluer ces dispositifs en vue de réduire toute cette gabegie.
C'est grâce aux «dispositions dérogatoires» que la Société Générale a pu récupérer 1,7 milliard sur les 4,9 perdus par Jérôme Kerviel : en effet, toute entreprise française peut répercuter de manière rétroactive ses pertes d'une année sur les bénéfices des années précédentes afin de faire baisser son impôt sur les sociétés. Ces dérogations fiscales au titre du report de déficits «auraient permis de diminuer de 8 milliards d'euros le montant de l'impôt sur les sociétés», selon le CPO qui note que la France est particulièrement généreuse puisqu'elle «fait partie des quatre pays de l’OCDE (avec l’Irlande, le Royaume-Uni et la Norvège) qui offrent un régime […] sans aucun plafonnement». D'après Libération, les entreprises du CAC 40 bénéficient d'une cinquantaine de «dispositions dérogatoires» avec une efficacité impressionnante : à l'arrivée, les 40 plus grandes entreprises françaises ne paieraient que 8% d'impôt sur les sociétés, bien loin du taux normal de 33%.
En France, les plus «assistés» sont bien les entreprises et non ceux qu'elles ont appauvri en gelant leurs salaires ou en supprimant/précarisant leurs emplois, contraints de survivre avec les allocations de la CAF ou de l'Unedic, puis stigmatisés. Et pendant que le patronat s'en met plein les fouilles sur le dos de la collectivité, le chômage de masse prive notre protection sociale (maladie, chômage, retraite…) de précieuses recettes. Honte à ce gouvernement !
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