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Accueil Social, économie et politique Semaine de 4 jours : le débat doit reprendre... ou plutôt commencer

Semaine de 4 jours : le débat doit reprendre... ou plutôt commencer

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Plutôt que polémiquer sur des 35 heures complètement dénaturées et continuer à les défendre, pourquoi ne pas remettre sur le tapis la semaine de quatre jours à la carte et à temps plein proposée depuis dix-sept ans par l'économiste Pierre Larrouturou ?

Fin 1975, sous Giscard, le cap du million de chômeurs est franchi. En 1978, la commission Giraudet rendait ses conclusions au premier ministre Raymond Barre, affirmant qu'il fallait baisser le temps de travail de 10%.

1993 : le chômage passe la barre des 3 millions. En octobre 1995, sous Chirac, le rapport de la commission Boissonnat (créée par Edouard Balladur) préconisa une réduction du temps de travail de 20% à 25% en 20 ans, ouvrant ainsi la voie à la semaine de 32 heures et à la semaine de 4 jours, modulable sur l'année. Le 11 juin 1996, la loi Robien (co-rédigée par le député UDF Gilles de Robien et un certain Pierre Larrouturou, économiste) est votée : elle propose des allègements de "charges" aux entreprises qui baissent le temps de travail moyen de leur effectif d'au moins 10% et réalisent un nombre d'embauches équivalant à 10% de leur effectif. Ces allègements peuvent ainsi compenser la baisse de salaire des employés dont le temps de travail a diminué, suivant les accords signés aux seins des entreprises. Parmi les bénéficiaires de cette loi, on trouve le Crédit Lyonnais.

A l'arrivée de la gauche au pouvoir, Martine Aubry, ministre du Travail, est chargée de mettre en place les 35 heures, idée initialement proposée par Dominique Strauss-Kahn. Entraînant la non-reconduction des accords Robien sur les 32 heures, les lois "Aubry I" puis "Aubry II", votées entre 1998 et 2000, ont fixé la durée légale du travail à 35 heures et prévu des allègements fiscaux pour les entreprises qui embauchent ou préservent des emplois.

Une loi vidée de sa substance

Mais, comme l'explique l'économiste Jean-Marie Harribey, «dès la seconde "loi Aubry", le ver avait été introduit dans le fruit, puisque le Medef avait obtenu la suppression de la clause faisant obligation aux entreprises de créer 6% d’embauches pour pouvoir bénéficier des allègements de cotisations sociales attribués en compensation de la RTT pour les entreprises. Dès lors, l’effet de création d’emplois permise par la RTT était considérablement amoindri, puisque les gains de productivité absorbaient le passage aux 35 heures. Mais l’arrivée au pouvoir en 2002 du gouvernement Raffarin, suite à la seconde élection de Chirac à la présidence de la République, allait aggraver les choses de plusieurs manières»... Lire la suite ici.

Ainsi, les 35 heures sont-elles devenues inefficaces en matière de lutte contre le chômage et ruineuses pour l'Etat : chaque année, 15 milliards d'euros vont dans la poche des entreprises sans contrepartie sur la création d'emplois, en quantité comme en qualité. En outre, la loi "Aubry II" a annualisé le temps de travail (ce qui a flexibilisé les salariés) et autorisé l'exclusion des temps de pause de son calcul.

Dès 1998, Pierre Larrouturou revient à la charge. Détectant les multiples failles et concessions au patronat des lois Aubry, il publie “35 heures : le double piège”, qui deviendra “Pour la Semaine de 4 Jours – Sortir du piège des 35 heures” (La Découverte - 1999).

1,6 millions d'emplois

Pierre Larrouturou fut adhérent au Parti socialiste de 2002 à 2009. Lassé de l'attitude de ses dirigeants, il anime aujourd'hui les discussions sur le temps de travail à Europe Ecologie-Les Verts. Conseiller régional en Ile-de-France, il défend toujours la semaine de 4 jours à la carte, qui suppose de passer à une moyenne de 32 heures de travail hebdomadaire tout en maintenant le taux d'activité de l'entreprise. Pour cela, elle doit embaucher en CDI l'équivalent d'au moins 10% de ses effectifs, ce qui lui permet de continuer à tourner 5 jours et d'être exonérée de cotisation chômage, soit 8% de sa masse salariale. Une exonération qui compense le coût des embauches. Donc une manœuvre qui ne coûte rien à l'entreprise… ni aux caisses d'assurance chômage, qui n'ont plus à verser les indemnités des chômeurs embauchés. Actuellement, la semaine de 4 jours est une réalité pour quelque 400 PME françaises.

En plus d'avoir un coût nul et un effet direct sur l'emploi, cette mesure, si elle avait été généralisée, aurait eu un effet positif sur la consommation, sur l'entreprise, sur les finances publiques et même l'environnement. Selon une étude du ministère du Travail de 1997, elle pourrait créer 1,6 millions d'emplois.

La réduction du temps de travail et la hausse exponentielle des gains de productivité sont une tendance fondamentale des pays développés. Comme le rappelle sans cesse Gérard Filoche, ce sont les pays les plus pauvres qui ont les durées du travail les plus longues. Or, depuis trente ans, cette productivité profite de plus en plus aux actionnaires; de moins en moins à l'investissement et, surtout, aux travailleurs eux-mêmes. Rétablir une plus juste répartition des richesses est crucial : baisser le temps de travail sans perte de revenu fait partie du processus. Et à l'instar du salaire à vie défendu par l'économiste Bernard Friot, la semaine de 4 jours n'est pas une lubie de "gentils allumés" mais un enjeu civilisationnel avant-gardiste, porté par des individus plus éclairés que la moyenne.

SH

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Mis à jour ( Lundi, 04 Juillet 2011 13:09 )  

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