L'Unedic était déjà optimiste pour 2011 en annonçant quelque 128.000 bouches à nourrir en moins... Un arbre qui cache la forêt. La face cachée de l'iceberg. Car on le répète : l'assurance chômage ne tient compte que du nombre de personnes qu'elle indemnise (soit 2,5 millions à fin novembre sur les 4,6 millions d'inscrits à Pôle Emploi), mais pas des invisibles qui restent sur le carreau. Et, on le sait, plus d'un chômeur sur deux n'est pas couvert par le régime.
Ce reflux escompté de 128.000 bénéficiaires s'explique aisément : le volume d'allocataires dont les droits vont expirer courant 2011 équivaudra à celui de 2010 (quelque 800.000; sauf que, cette année, aucun "plan rebond", aussi minable soit-il, n'est prévu. Donc personne ne s'en souciera)... On rappelle que le nombre de chômeurs de longue durée, directement frappés par la crise et inscrits depuis un an et plus à Pôle Emploi, dépasse actuellement 1,5 million et représente 38% des effectifs dans les seules catégories ABC. Ce qui attend ces personnes, c'est le RSA, l'ASS, ou rien du tout.
Puisqu'environ 800.000 d'entre elles vont sortir du régime cette année et que l'Unedic n'envisage qu'un modeste repli de 128.000 chômeurs indemnisés, cela signifie, au contraire, que le nombre d'entrants ne diminuera pas. Donc que la décrue du chômage sera toute relative. Ce qui corrobore l'avis des économistes qui réfutent toute amélioration sur le front de l'emploi en 2011.
Un recul du chômage purement statistique
Sur la base de ses dernières projections qualifiées de "prudentes", l'Unedic annonce quelque 345.000 demandeurs d'emploi en moins d'ici 2015 dans les catégories ABC, ce qui ramènera leurs effectifs à 3,7 millions (contre plus de 4 millions aujourd'hui). Mais en réalité, la baisse du nombre de chômeurs indemnisés entre 2012 et 2014 n'est évaluée qu'à 235.000, auxquels il faut ajouter les 128.000 de 2011. Soit, sur quatre ans, 363.000 bouches à nourrir en moins : avouons que c'est peu.
Parmi elles, certaines auront peut-être retrouvé un emploi de qualité. Mais d'ici là, une majorité va subir la précarité et le déclassement — des économistes constatent une précarisation structurelle de l'emploi accentuée par la crise, et le Conseil d'analyse stratégique a récemment estimé qu'il faudra cinq ans pour revenir à la normale —, ou aura sombré dans la pauvreté et l'exclusion.
Mais s'il est "encourageant" pour les finances de l'Unedic dont le déficit cumulé s'élèvera tout de même à 11 milliards d'euros à la fin de l'année, ce tableau optimiste (mais qui, on le voit, élude une partie de la réalité du chômage en France) aura un effet positif dans l'immédiat : à la perspective d'un possible rééquilibrage des comptes — le déficit cumulé devrait se redresser à 6,7 milliards fin 2014 —, les "partenaires sociaux", conscients que la crise n'est pas encore terminée, seront doublement tentés par le statu quo lors de la renégociation de la convention qui commence lundi. Ce qui devrait nous éviter le pire.
SH
Articles les plus récents :
- 01/02/2011 10:13 - Les Egyptiens pris en otage par des grévistes !
- 28/01/2011 13:54 - Régime des intermittents : un faux procès
- 27/01/2011 08:37 - Chômage de 2010 : l'heure de vérité
- 26/01/2011 04:16 - Création d'entreprise ne signifie pas création d'emplois
- 21/01/2011 06:06 - Décidément, travailler est une bien piètre façon de gagner sa vie
Articles les plus anciens :
- 20/01/2011 03:51 - ASS 2011 : 15,37 € par jour
- 15/01/2011 04:45 - Pierre Méhaignerie et les allocations chômage : voici venue l'ère des "Rantanplan" de la politique
- 12/01/2011 01:02 - Les derniers chiffres du RSA
- 11/01/2011 05:14 - Sois belle et cherche un emploi
- 07/01/2011 17:09 - Semaine de 4 jours : le débat doit reprendre... ou plutôt commencer