La politique d’austérité implacable adoptée par l’élite politique européenne a provoqué une hausse du chômage à des niveaux record à travers tout le continent, comme le montrent les données publiées mardi 8 janvier par l’agence de statistiques Eurostat.
Dans les 17 pays européens formant la zone euro, le chômage a grimpé en novembre à 11,8% et le nombre de travailleurs sans emploi a atteint 18,8 millions : c’est le chiffre le plus élevé depuis l’introduction de la monnaie unique en 1999. Dans les 27 Etats membres de l’Union européenne, le chômage s’est établi à 10,7% en atteignant pour la première fois 26 millions de personnes, soit l’équivalent que la population du Benelux.
La plus forte augmentation a eu lieu dans les pays qui ont été sélectionnés par le Fonds monétaire international (FMI) et l’Union européenne pour subir un traitement de choc économique. En Grèce, le chômage a grimpé en flèche à 26,8% en octobre, une hausse de plus 7% depuis septembre 2011. Le chef de file européen du chômage est toutefois la quatrième économie du continent, l’Espagne, où 26,6% de sa population active était inscrite au chômage en novembre.
En commentant les plus récentes statistiques européennes, Graeme Leach, chef économiste du British Institute of Directors (un groupe patronal), a dit : «Il est évident que l’implosion économique de plusieurs Etats membres continue à un rythme préoccupant… Les chiffres clé sont une mauvaise nouvelle et ceci est exacerbé par l’impact politique et humain des niveaux effrayants du chômage des jeunes en Espagne, en Grèce et en Italie.» Selon les chiffres d’Eurostat, le chômage des jeunes se situe actuellement aux environs de 50% en Grèce et en Espagne, et arrive à 30% en Italie.
Tous les principaux indicateurs économiques signalent une aggravation de la situation économique en Europe et une nouvelle hausse du chômage en 2013. Mais ces statistiques ne révèlent pas la souffrance et le désespoir énorme qui frappent des dizaines de millions de familles à travers tout le continent. La conséquence inévitable de niveaux de chômage record est, dans certaines des économies les plus développées en Europe, un niveau de pauvreté jamais vus depuis les années 1930.
Dans un récent rapport, l’organisme caritatif Oxfam a averti que les mesures d’austérité introduites à la fin de l’année dernière par le gouvernement espagnol et qui comprennent des coupes sévères des allocations de chômage pourraient faire passer, au cours des dix prochaines années, à 18 millions, soit 40% de la population, le nombre de personnes considérées comme vivant dans la pauvreté.
Selon les estimations officielles, après cinq ans de récession, plus d’un tiers de la population vit actuellement sous le seuil de pauvreté en Grèce. Les soupes populaires sont maintenant devenues chose courante dans les grandes villes, et des marchés de troc sont organisés dans certaines parties du pays pour permettre aux personnes sans revenus d’échanger des produits. Fin janvier, une série de réductions des revenus des retraités et des fonctionnaires entrera en vigueur en tant que partie intégrante du dernier plan de coupes approuvé par le gouvernement à Athènes. Les revenus d’un grand nombre de travailleurs qui ont déjà diminué de 40% ces dernières années, baisseront encore davantage.
Aliki Mouriki, sociologue au Centre national pour la Recherche sociale, a mis en garde contre les conséquences politiques de la politique d’austérité imposée par l’UE et le FMI : «Le chômage continuera d’augmenter, la récession s’aggravera, davantage d’entreprises fermeront leur porte. La grande question est la suivante : Qui survivra ?… La colère et le désespoir s’accumulent… Cela va exploser si les gens ne voient pas un moyen de sortir de cette situation déplorable.»
En fait, le chômage de masse et la pauvreté généralisée ont été pris en compte par l’élite dirigeante européenne lors de l’élaboration des plans qu’un commentateur économique a qualifié d’«austérité permanente». A la fin de l’année, la chancelière allemande Angela Merkel a suggéré que, lorsqu’il s’agissait de déterminer les salaires et les conditions sociales des travailleurs européens, la Chine était la référence. Une énorme armée de chômeurs vivant au bord de l’indigence est créée dans le but de tirer vers le bas les salaires de ceux qui ont encore un emploi et d’atteindre les niveaux de surexploitation en vigueur dans les zones franches en Chine. Les niveaux extrêmes de dévastation sociale et de pauvreté qui règnent en Grèce, en Espagne et en Italie vont être exportés partout sur le continent.
Le propre gouvernement de Merkel est en train d’établir des plans pour introduire en 2014 en Allemagne, après les élections fédérales de cet automne, des mesures d’austérité drastique. La récente adoption du frein à l’endettement allemand visant à strictement limiter le niveau de la dette obligera tous les autres pays de la zone euro à emprunter la même voie. A l’extérieur de la zone euro, le premier ministre britannique David Cameron a clairement fait comprendre que le gouvernement de Londres entendait bien maintenir son propre programme de coupes budgétaires au moins jusqu’en 2018. Figure notamment, parmi les coupes prévues cette année par la coalition gouvernementale entre les conservateurs et les libéraux démocrates, l’introduction d’un plafond pour les prestations sociales, ce qui signifiera une réduction massive des revenus des couches les plus pauvres de la société.
Toutes ces attaques perpétrées en Europe ont été possibles du fait de la docilité des syndicats qui soutiennent la politique de la classe dirigeante européenne. Cette politique consiste à réduire les salaires et les conditions de travail afin de combler le fossé de l’exploitation des travailleurs qui existe encore entre l’Europe et la Chine.
(Source : La Vidure)
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