La spirale du chômage happe un nombre croissant d’entre nous. Plus de 5 millions de personnes (15% de la population active au bas mot) pointent chez Pôle Emploi, sans compter tous ceux qui, découragés, n’y sont plus inscrits n’y voyant aucun intérêt.
Nous sommes donc de plus en plus nombreux à être touchés, à un moment ou un autre de notre parcours professionnel, par des périodes d’inactivité forcées et subies, qui s’allongent à mesure que les offres d’emploi se raréfient.
Chaque année, des dizaines de milliers de chômeurs basculent en fin de droits après avoir épuisé leurs allocations. Les plus «chanceux» se retrouvent à l’ASS, sous réserve d’avoir travaillé 5 ans lors des 10 dernières années. Les moins chanceux, au RSA. Des minima sociaux qui, malgré ce qu’en disent certains (comme Sarkozy), ne sont pas acquis. Leur versement dépend des ressources et/ou des économies du foyer. Ainsi, beaucoup se retrouvent sans rien et doivent accepter la situation humiliante de survivre aux crochets de leur conjoint ou de leur conjointe.
Et comme un bonheur n’arrive jamais seul, cette situation de dépendance financière et de troubles liés à l’inactivité exacerbe souvent les conflits familiaux, pouvant conduire à des séparations pénibles et onéreuses.
Ceux qui estiment que les chômeurs profitent d’un système trop généreux (ils sont nombreux dans la population et dans la classe dirigeante, y compris chez les socialistes) oublient que le chômage est une souffrance au quotidien qui se traduit par une perte d’estime de soi et un déclassement social dont on ne sort pas indemne. Quand on en sort…
Comme nous l’avons vu, la pénurie d’offres hypothèque plus encore le retour à la normale. Arrive rapidement le moment où l’employabilité du chômeur est réduite à néant, tant les «trous» dans son CV sont récurrents et longs.
Les forums d’Actuchomage déborde de témoignages de personnes qui ne savent plus comment s'en sortir, en dépit des efforts déployés. Il n’est pas rare que de lourds problèmes psychologiques et médicaux se surajoutent à leur désespérance professionnelle.
Cette galère au quotidien nous ferait presque oublier celle qui se profile à l’horizon. Après des années d’activité en dents de scie, de passages par la casse chômage longue durée et de basculements dans «l’enviable statut» de RSaste, l’âge de la retraite sonne. Les choses vont alors encore se compliquer !
On peut considérer qu’aujourd’hui la plupart des retraités ont connu des parcours professionnels plutôt stables, ouvrant droit à des pensions leur permettant de vivre convenablement, même si le chômage de masse ne date pas d’hier. Les autres se contentent du minimum retraite et de conditions de vie au rabais.
Mais la dégradation constante de l’activité économique depuis une trentaine d’années et ses corollaires, chômage longue durée et basculement au RMI/RSA, nous préparent une génération de retraités pauvres, faute d’avoir assez cotisé et de s'être constitué un petit bas de laine.
Voilà un phénomène massif que l’on oublie trop souvent de mentionner et d’analyser dans les études d’impact : la double peine pour les chômeurs et précaires.
Au parcours professionnel chaotique et anxiogène succèdera une vieillesse misérable pour un nombre incalculable d’entre nous.
Il s’agit ici d’une injustice sociale insupportable !
Un grand nombre de salariés ont connu des carrières exemptes de périodes d’inactivité, leur permettant de partir en retraite dans les meilleures conditions. Ils disposeront par ailleurs, le plus souvent, d’un confortable matelas d’économies et de placements qui leur sera bien utile pour se distraire, pour voyager, pour se prémunir d’un pépin de santé ou donner un coup de main à leurs enfants et petits-enfants…
Il n’est pas dans notre intention de pointer du doigt ces «privilégiés» qui, pour beaucoup, se sont ouverts des droits à la sueur de leur front. Nous constatons simplement que celles et ceux qui ont vécu des parcours professionnels chaotiques, conditionnés par un environnement économique sur lequel ils n’ont pas de prise, se trouveront de nouveau sanctionnés à l’heure de la retraite.
C’est aspect préoccupant est généralement complètement occulté par celles et ceux qui stigmatisent les «pauvres » et les chômeurs longue durée qui se complairaient dans leur statut d’assistés.
Quand on est jeune et au chômage, on arrive généralement à se débrouiller avec les moyens du bord. Mais quand on est vieux et pauvre (donc sujet aux complications médicales et autres inconvénients de la vieillesse), là, ça sent le Sapin ! (jeu de mots douteux, en référence au patronyme de notre ministre des Finances et des Comptes publics) .
Il est donc probable que l’espérance de vie marque le pas, voire se contracte, dans les décennies qui viennent. L’avenir le dira.
Si cela devait se confirmer, ce phénomène serait une conséquence supplémentaire du chômage qui brise prématurément les parcours de vie d’un nombre croissant d’entre nous.
Que messieurs Sarkozy, Macron, Valls et consorts ne l’oublient pas.
Yves Barraud
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