L'intersyndicale CGT, CFDT, FO et Sud de l'INSEE (Institut National de la Statistique et des Études Économiques) et l'intersyndicale CGT, Unsa, CFDT, SNU et Sud de la DARES (Direction de l'Animation de la Recherche, des Études et des Statistiques du ministère de l'Emploi) expriment officiellement leur colère face au dénigrement de leur travail exercé par le gouvernement. Car ce dernier explique la baisse du chômage par le dynamisme des créations d'emplois dopées par le contrat nouvelle embauche, les contrats aidés, et le plan de développement des services à la personne. Mais les résultats chiffrés de la DARES et de l'INSEE le contredisent : seulement 64.800 postes ont été créés dans le secteur marchand en 2005 alors que le nombre de chômeurs a reculé de 126.800…
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"Améliorer la qualité des chiffres : bien sûr. Les dénaturer : jamais !"
Pour les syndicats de statisticiens, ces formulations agressives vis-à-vis de leur travail sont dirigées vers l’opinion publique, le gouvernement cherchant à "décrédibiliser les statistiques actuellement disponibles, tant qu'elles ne confirment pas son credo". Ils affirment qu'il est inexact de dire que les chiffres de l'INSEE et de la DARES n'intègrent pas les entreprises de moins de 10 salariés ou le secteur médico-social. Certes, le processus est long et il faut affiner les statistiques plusieurs fois dans l'année : "Nous aurons des résultats beaucoup plus précis en mars mais à l'heure actuelle, aucun spécialiste, quel qu'il soit, ne peut prétendre qu'il y a une création massive d'emplois", affirme la CGT de l'INSEE.
Les syndicats de la DARES dénoncent d'autres types de "pressions", comme les délais de publication de leurs études "anormalement longs" et "l'enlisement" de plusieurs d'entre elles (des «Premières Synthèses» sur les licenciements, les effets du PARE, les 35 heures…) "jugées peu opportunes sur le plan de la communication ministérielle". Le ministère du Non-Emploi lorgne également du côté du nouveau directeur de la DARES, qui vient d'entrer en fonction et doit prendre "le temps d'évaluer ce qui est publié"... "Sur l'évaluation de la création d'emploi, on n'est pas bons. Globalement, notre appareil statistique doit progresser" et des groupes de travail ont d'ailleurs été mis en place à cet effet, a-t-il indiqué, en réfutant bien sûr toute intention "d'attaquer" l'INSEE et la DARES...
Il n'empêche que le vase est en train de déborder !
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Le secteur concurrentiel a créé 64.800 emplois en 2005, un chiffre certes supérieur à 2004 (+ 5.000 emplois), mais jugé "décevant" par les économistes.
C'est la construction qui a principalement tiré l'emploi l'année dernière, avec 36.800 postes créés (+2,8%), alors que l'industrie a continué à détruire les siens (- 87.700).
"Le secteur volatile de la construction explique plus de la moitié des créations, c'est bien fragile et décevant", a commenté Nicolas Bouzou, de l'Institut d'études économiques Xerfi, qui "ne voit pas de rupture dans les comportements d'embauche, en dépit de l'instauration du contrat nouvelle embauche", créé en août dernier par le gouvernement pour les entreprises de 20 salariés ou moins. Les "intentions d'embauche" en CNE dépassent aujourd'hui la barre des 300.000, "mais s'il y avait vraiment changement de comportement, cela se verrait dans les chiffres", estime l'économiste.
Pour Marc Touati, économiste chez Natexis Banques populaires, la faible progression de l'emploi salarié au dernier trimestre de 2005 "confirme que l'emploi est bien entré dans une phase de faiblesse chronique".
Et la faiblesse de la croissance en 2005 (+1,4%, selon les dernières estimations de l'INSEE) ne pousse pas les experts à l'optimisme pour l'année 2006. Si le ministre des Finances Thierry Breton maintient sa prévision d'une croissance entre 2 et 2,5% cette année, d'autres spécialistes estiment qu'elle atteindra "difficilement" les 2%.
Eric Heyer, de l'Office français des conjonctures économiques (OFCE), fait d'ailleurs remarquer qu'au regard de la croissance de 2005, les résultats de l'emploi "ne sont pas si mauvais". "Compte tenu du décalage de plusieurs mois entre la croissance et l'emploi, on a bénéficié en fait, surtout au premier semestre 2005, de la croissance de 2% de l'année 2004", souligne-t-il.
Les estimations publiées vendredi ne vont sans doute pas calmer la polémique sur les causes de la baisse du chômage. Selon M. Heyer, la création d'emplois en 2005 "explique à peine la moitié de la baisse du chômage dans l'année". "D'où vient le reste ?", interroge-t-il, excluant les emplois aidés, dont le nombre de créations a seulement compensé le nombre d'emplois supprimés.
"L'autre hypothèse est que les chiffres étant provisoires, ils peuvent être révisés", souligne-t-il, sans exclure une possible correction à la hausse du taux de chômage en 2005 lors des résultats définitifs de l'enquête emploi en mars. Elle révélera "peut-être" un taux de chômage pour 2005 "à 9,7% et pas 9,5%", avance même M. Heyer.
Le ministre délégué à l'Emploi, Gérard Larcher, a cependant rétorqué vendredi sur Europe 1 : "Aujourd'hui, à ceux qui disaient : il y a moins de chômeurs et on ne crée pas d'emplois, la réponse est là, on a créé au moins 65.000 emplois". D'autant, estime le gouvernement, que l'INSEE prend peu en compte dans ses statistiques sur l'emploi salarié les petites entreprises et les services à la personne, selon lui très dynamiques.
"Si les chiffres publiés ne montrent pas d'accélération de l'emploi" dans ces secteurs, ont répondu les syndicats de l'INSEE dans un communiqué, "c'est parce qu'aucune des sources existantes ne montre pour l'instant le moindre frémissement en la matière". Répondre | Répondre avec citation |