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Au premier jour des négociations avec une représentante du gouvernement, l'inter-syndicale CFDT-CGT-FO du personnel a maintenu sa demande d'une prime "supra-légale" sans condition, après avoir toutefois revu son montant à la baisse : 25.000 € par personne.
"L'Etat et le Conseil général sont prêts à apporter une aide financière, mais cette somme n'est pas suffisante par rapport à ce qu'ils demandent", a indiqué la Préfecture qui a ajouté : "L'aide ne sera versée qu'à condition que les salariés rentrent dans le CTP".
Effectivement, Charleville-Mézières et sa région (13% de chômage) sont l'un des sept "bassins d'emplois" test pour expérimenter le Contrat de transition professionnelle de Jean-Louis Borloo, dispositif de reclassement passé en force (c'est-à-dire à la dernière minute et sans concertation dans le cadre d'un projet de loi sans rapport direct avec la mesure) par le gouvernement en début d'année. Celui-ci consiste à verser 80% du salaire brut pendant un an au bénéficiaire qui s'engage à chercher un emploi, suivre une formation ou faire preuve de mobilité, en échange d'un suivi renforcé. En dépit du rejet des partenaires sociaux et de l'UNEDIC, Jean-Louis Borloo compte progressivement substituer le CTP à la CRP (Convention de reclassement personnalisé), autre dispositif douteux déjà entré en vigueur depuis juin 2005.
Un but avéré : escamoter des statistiques les chômeurs fraîchement licenciés
L'Etat propose un "CTP avec un ticket d'entrée à 8.000 €" et "6.000 € en ticket de sortie avec un emploi", a détaillé un porte-parole de l'intersyndicale CFDT. Mais les Thomé-Génot demandent "20.000 € pour tout le monde avec ou sans CTP, et 5.000 € pour celui qui prendra le CTP".
Le bras de fer se poursuit, les salariés souhaitant l'entrée dans la négociation du Conseil régional : son président PS Jean-Paul Bachy a soutenu lundi leur demande d'une prime de 30.000 €. Entre 100 et 150 personnes se sont rassemblées mardi matin devant la Préfecture en brûlant des pneus, sans bloquer l'entrée du bâtiment.
Le Contrat de Transition Professionnelle, tout comme la Convention de reclassement personnalisé, n'offre rien de plus solide que le dispositif classique (PARE - Plan d'aide au retour à l'emploi), mais il a l'immense avantage de transformer le nouveau demandeur d'emploi en «salarié en transition» (doux euphémisme !) qui va le propulser directement en catégorie 4 - stagiaires de la formation professionnelle, non comptabilisés dans les statistiques du chômage. Ainsi, des dizaines de milliers de licenciés n'apparaissent pas dans les chiffres officiels. Ce chantage à la CTP dans le conflit Thomé-Génot est symptomatique du mépris des pouvoirs publics face à la détresse des privés d'emploi dont on bafoue la dignité, au nom des "bons résultats" du gouvernement.
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Au terme de la réunion, vendredi, avec les six parlementaires ardennais (cinq UMP et un PS), les ministères de l’Emploi et de l’Industrie ont, dans un communiqué commun, rendu public leur «dispositif exceptionnel» pour les 320 ouvriers victimes de la liquidation judiciaire de l’équipementier automobile : l’objectif, d’après le gouvernement, c’est «zéro chômeur», mais on peut se demander si le quotidien régional l’Union, qui rebaptise, dans un lapsus, le plan «zéro emploi», n’est pas plus proche de la vérité.
Les pouvoirs publics concentrent leur action sur le contrat de transition professionnel (CTP), un dispositif expérimenté depuis avril 2006, entre autres, dans le bassin de Charleville-Mézières : il s’agit d’une forme de contractualisat ion pour les licenciés qui ont le droit de toucher un revenu équivalent à 80% de leur salaire brut pendant un an, mais aussi les devoirs d’accepter une «mobilité géographique et professionnelle », de prendre des formations ou des emplois en dessous de leurs qualifications. Pour les Thomé-Genot, l’État promet «en cas de reclassement dans un emploi moins rémunéré» de compenser les pertes de salaires pendant deux ans au maximum.
Il n’est donc pas question, pour l’heure, d’une quelconque prime pour préjudice moral. «Il n’y aurait rien de plus dévastateur que de se contenter d’une somme donnée aux salariés, considère d’ailleurs au micro de France 3 Benoît Huré, sénateur UMP et président du conseil général des Ardennes. Car on sait où ça mène, ce sont des feux de paille !» Mais dimanche matin, la droite panique et tente de recadrer le propos : dans les colonnes du journal local, la députée UMP Bérengère Poletti parle tout d’un coup, mais dans des termes toujours aussi byzantins, d’une enveloppe financière de 59.600 euros pour le reclassement de chaque métallo licencié. De son côté, Boris Ravignon, chargé de mission auprès de Nicolas Sarkozy et futur candidat UMP aux législatives, affirme avoir trouvé un repreneur. «Il est prêt à redémarrer l’activité pour arriver au bout d’un an, si tout va bien, à un volant d’une cinquantaine de salariés.» Royale, cette «reprise» : 50 salariés sur 320, et encore ! C’est «au bout d’un an, si tout va bien», n’est-ce pas ?
(Source : L'Humanité) Répondre | Répondre avec citation |
Acquise par le groupe américain Catalina en 2004, la société Thomé-Génot a été mise en liquidation le 24 octobre après avoir, selon les syndicalistes, été pillée par le groupe qui lui aurait facturé à prix d'or des frais de gestion et de formation.
Cathy, 39 ans, ouvrière depuis 13 ans à Nouzonville, raconte sa version des faits :
(…) Comment en est-on arrivé là ?
On s'est fait mener en bateau par les Américains. On avait eu un petit espoir quand ils nous ont achetés en 2004, et puis c'est parti en lambeaux. Une usine qui existait depuis 1836. Ils n'ont rien investi, ils ont pris l'argent, ils sont partis avec. Même l'argent du comité d'entreprise, avec le Noël des gosses. Quand ils ont acheté, ils nous ont offert le champagne et les petits fours. J'étais venue avec mon mari, qui travaille aussi dans l'usine, et mon fils. Le patron a levé le pouce quand il nous a vus : «Moi aime la famille !» Le show à l'américaine…
Après le rachat, ils ont embauché 80 personnes. Puis quelques mois plus tard, ils en ont licencié 50. On a laissé faire. Ils nous ont bourrés le mou en disant que cela permettrait à l'usine d'aller mieux, d'acheter du métal. Et puis fin octobre, en une semaine, tout s'est déclenché. La boîte a fermé, les patrons sont partis. Ils disent que c'est Valeo qui ne voulait pas augmenter le prix de la pièce. Les délégués avaient demandé une réunion avec la préfète parce que d'après le patron américain, Greg Willis, tout allait bien. Pourtant, depuis une semaine, les gens des forges ne travaillaient plus, faute de métal. Les gars glandaient pendant huit heures. Le directeur du site disait qu'il n'en savait pas plus que nous. Il était sur le site jusqu'à mardi, maintenant, on ne sait pas où il est.
(…) Y a-t-il une chance que l'usine continue à vivre ?
Certains parlent de reprise avec 50 ouvriers. C'est se moquer du monde. Et les autres, ils feront quoi ? J'ai pas d'attachement spécifique à Thomé-Génot, mais c'était notre entreprise. On nous jette. Comme des morceaux de papier à la poubelle. Il va falloir que je me recycle encore dans autre chose, il faut bien donner à manger à mon gamin. Pourtant, des pôles d'alternateur, il en faudra toujours, non ?
(Source : Libération) Répondre | Répondre avec citation |
"Afin de manifester sa solidarité, la région se propose de débloquer de façon exceptionnelle et dérogatoire une somme de 10.000 € par salarié, venant s'ajouter à celle engagée par l'Etat et le conseil général des Ardennes", a indiqué le Conseil régional vendredi dans un communiqué.
Le président PS de la région Jean-Paul Bachy a rencontré jeudi soir les syndicats de l'équipementier automobile du site de Nouzonville et la médiatrice nommée par le gouvernement. Les quelque 300 ex-Thomé-Génot (294 à Nouzonville et environ 25 sur un autre site dans l'Eure), qui demandaient au départ une prime sans condition de 30.000 € par personne, restaient cependant mobilisés vendredi plus de trois semaines après leur liquidation le 24 octobre : "La négociatrice est partie à Paris pour établir un protocole d'accord et nous le soumettre sans passer par la négociation. On veut qu'il soit fait avec nous", a dénoncé le représentant de la CGT Yannick Langrenez, sans exclure de nouvelles actions devant la préfecture dans l'après-midi. Par ailleurs, toutes les aides "sont pour le CTP", expérimenté dans les Ardennes où le taux de chômage atteint 13%, a-t-il rappelé. Ce qui signifie que les 25 salariés de l'Eure ne sont pas concernés par la prime, puisque situés hors d'une zone d'expérimentation du CTP contrairement au bassin d'emploi de Charleville-Mézières. Répondre | Répondre avec citation |
Les salariés de Thomé-Génot ont finalement cédé hier, et accepté l'accord prévoyant une prime de 25.000 euros contre leur engagement dans le Contrat de transition professionnelle .
Dix mille euros seront versés lors de la signature par le département, 10.000 euros six mois plus tard versés par la région, et 5.000 par l'Etat lors de la sortie du CTP… s'ils trouvent un emploi !
No comment.
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C'est le ministre délégué à l'Emploi Gérard Larcher qui a demandé hier au procureur de la République de Charleville-Mézières de "mener des investigations afin de déterminer si d'éventuelles infractions pénales ont été commises par la direction" de l'équipementier automobile Thomé-Génot : "La solidarité des pouvoirs publics ne dédouane pas pour autant l'employeur des ATG (Ateliers Thomé-Génot) de ses reponsabilités vis-à-vis de ses créanciers et surtout de ses salariés". Il faut que celles-ci "soient clarifiées dans ce drame économique, social et humain". Une enquête judiciaire a donc été ouverte à l'encontre du fonds d'investissements américain Catalina, soupçonné de malversations et d'avoir pillé l'usine après sa reprise en 2004.
Gérard Larcher, qui déclare ensuite faire de "la redynamisation économique" des Ardennes une "priorité"… Répondre | Répondre avec citation |