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La décomposition par secteur d'activité accentue les inquiétudes car non seulement l'industrie reste sur la mauvaise pente (77.600 postes en moins cette année… au total 2,17 millions de destructions d'emplois nettes dans l'industrie manufacturière depuis 1974), mais la majeure partie des créations d'emploi du 3e trimestre 2006 sont à mettre au compte du BTP où une baisse de régime est attendue par plusieurs économistes...
Les «experts» se réveillent
"Mou", "intrigant"… Les économistes n'ont pas manqué de réagir aujourd'hui, même s'ils n'attendaient pas de miracle après la déception réservée par les chiffres du PIB à savoir une croissance zéro au 3e trimestre : Thierry Breton peut, lui aussi, jeter sa boule de cristal. "Les entreprises ont mis les deux pieds sur le frein (de l'embauche) au deuxième trimestre et sont instantanément ajustés à la conjoncture, même dans le secteur des services", relève Nicolas Bouzou, économiste chez Asteres. La perspective d'un fléchissement de croissance en 2007 ajoute aux craintes pesant sur "le cercle vertueux" de la baisse du chômage, dans lequel notre Jean-Louis Borloo national assurait récemment que la France était rentrée !
"Une question s'impose : comment le chômage peut-il baisser aussi fortement avec si peu de créations d'emploi ?", s'interroge enfin Marc Touati, économiste chez Natexis Banques populaires. Certaines explications, à ce que certains de ses confrères qualifient de "trou statistique", est à chercher du côté de la démographie, des départs en retraite et de l'emploi aidé : "Seul un tiers de la baisse du chômage est dû à de véritables créations d'emplois. Les deux autres tiers sont dus au papy-boom, à la plus grande rigueur dans la comptabilisation du nombre de chômeurs, et au traitement social du chômage au travers des emplois subventionnés, des stages, contrats de formation, etc…", estime-t-il.
"On se laisse un peu griser par une baisse du chômage extraordinaire et on pense que ces chiffres correspondent à des créations d'emploi mais en réalité, ils tiennent au fait que la population active progresse moins qu'au début des années 2000", juge de son côté Eric Heyer, de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).
Economiste : une sacrée bonne planque ?
Vu le temps qu'ils ont mis à se poser les bonnes questions, on se demande comment ces économistes justifient leur salaire. Seule leur explication sur le traitement social du chômage est juste, même s'ils ne pipent mot sur cette nouvelle forme de sous-emploi forcé dont l'instabilité et la faible rémunération contribuent aux inégalités en France, a pourtant affirmé Jacques Delors dans sa présentation du dernier rapport du CERC sur l'emploi et les revenus.
Mais pour le reste, c'est zéro pointé !
Ils continuent de se tromper quand ils disent que le papy-boom contribue à la baisse du chômage alors qu'il n'en est rien : sur les 600.000 départs annuels à la retraite actuels et escomptés pour les années à venir, seul un tiers des postes seraient visiblement maintenus, les autres ayant été supprimés ou délocalisés. Pour un tiers des entreprises, le papy-boom est surtout une occasion rêvée de réduire les effectifs.
Leurs élucubrations sur "la plus grande rigueur dans la comptabilisation du nombre de chômeurs" sont particulièrement indignes quand on sait que les chômeurs officiels de catégorie 1 ne représentent que 57% de tous les inscrits à l'ANPE, que 60% des 1,26 million de RMIstes ne pointe pas à l'ANPE et que les 47% de demandeurs d'emploi qui ne sont pas indemnisés par l'assurance-chômage demeurent également invisibles.
Quant à la progression de la population active, on voit que l'INSEE est revenu sur ses prévisions de 2001 et qu'elle continuera d'augmenter jusqu'en 2014...
Je ferais bien économiste, moi !
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Commentaires
Mou c’est mou ! Une semaine après la croissance zéro du troisième trimestre, c’est au tour de l’emploi de décevoir. Ainsi, au cours de cette même période, l’emploi salarié n’a progressé que de 0,1%. Et encore, cette «performance» n’a pu être obtenue que grâce à l’augmentation massive de l’emploi dans la construction (+ 0,8%).
En revanche, dans les services, la hausse n’a été que de 0,2% et surtout, dans l’industrie manufacturière, l’emploi a reculé de 0,6%.
Il s’agit donc du vingt-deuxième trimestre consécutif de baisse de l’emploi industriel dans l’Hexagone. Au cours de cette triste période, les effectifs de ce secteur ont été réduits de 473.000 personnes. Depuis le deuxième trimestre 1974, on dénombre ainsi 2,17 millions de destructions d’emplois nettes dans l’industrie manufacturière.
Le plus problématique réside dans le fait qu’à l’exclusion de la construction, les services sont de moins en moins pourvoyeurs d’emplois. Pis, cette faiblesse de l’emploi national va de pair avec le maintien de pénuries de main-d’œuvre tant dans l’industrie que dans la construction et les services. Selon nos estimations, il y aurait ainsi aujourd’hui près de 400.000 offres d’emplois non satisfaites en France (1). Autrement dit, l’économie française crée déjà peu d’emplois et lorsqu’elle veut en créer, elle ne trouve pas «preneur», notamment par manque de qualification ou de motivation (2).
Dans ce cadre de mollesse structurelle de l’emploi, une question s’impose : comment le chômage peut-il baisser aussi fortement avec si peu de créations d’emplois ? La réponse est malheureusement simple : seul un tiers de la baisse du chômage est dû à de véritables créations d’emplois. Les deux autres tiers sont dus au papy-boom, à la plus grande rigueur dans la comptabilisatio n du nombre de chômeurs et au traitement social du chômage, notamment au travers des emplois subventionnés, des stages, des contrats de formation… Si la baisse du chômage est indubitablement une bonne nouvelle, elle ne va donc malheureusement pas de pair avec une forte hausse de l’emploi et du pouvoir d’achat.
Autrement dit, la faiblesse de l’emploi confirme que l’économie française reste fragile. Après avoir atteint au mieux 2,1% cette année, sa croissance sera d’environ 1,8% l’an prochain. Sur le marché du travail, cette croissance molle se traduira par une hausse de l’emploi de seulement 0,7% cette année et 0,5% en 2007. Aïe…
Si, la semaine dernière, nous avions une pensée émue pour M. Breton, il nous font encore procéder au même exercice cette semaine en y ajoutant M. Borloo, mais aussi le futur ou la future Président(e) de la France qui, s’il (elle) n’engage pas le pays dans une profonde réforme fiscale et du marché du travail (3), devra affronter une grave crise sociale.
(1) NDLR : nous ne savons pas sur quoi M. Touati se base pour avancer ce chiffre…
(2) NDLR : manque de motivation ??? Encore ces chômeurs fainéants ??? M. Touati, qui doit bien gagner sa vie à ne pas faire grand'chose d'utile pour la société, élude les salaires misérables et les conditions de travail dégradées qui sont le lot d'une majorité de salariés aujourd'hui dans ces secteurs : si ces employeurs ne trouvent pas preneurs, qu'ils apprennent d'abord à mieux considérer leur personnel !
(3) NDLR : dans la tête de M. Touati, bien au chaud dans son bureau, il s'agit sûrement de supprimer les cotisations sociales des employeurs ainsi que l'impôt sur les sociétés, voire de supprimer le Code du travail… je me trompe ? Répondre | Répondre avec citation |