Si l’on en croit les statistiques officielles, le Royaume-Uni ne compterait, en effet, que 1.540.000 chômeurs, et le taux de chômage n’y serait que de 5% contre 9% en France.
Pour la droite, la faiblesse de ce taux s’expliquerait par la «flexibilité» du marché du travail : précarité de l’emploi, licenciements sans formalités, multiplication des travailleurs à temps partiel et des travailleurs pauvres... Exactement ce que Sarkozy veut imposer aux salariés français.
La «flexibilité» du travail est (hélas !) bien une réalité au Royaume Uni, mais le chômage n’y a baissé que dans les statistiques :
• les conservateurs au pouvoir entre 1979 et 1995 ont changé 17 fois le mode de calcul du chômage. Blair a gardé tout l’héritage des conservateurs : leurs lois anti-grève aussi bien que leurs méthodes statistiques.
• le Royaume Uni compte aujourd’hui 2.700.000 «invalides du travail» alors qu’ils n’étaient que 600.000 en 1981 ! C’est donc 2.100.000 «invalides du travail» qu’il faudrait ajouter aux statistiques britanniques pour commencer à avoir une idée du taux de chômage réel en Grande-Bretagne.
Le nombre de chômeurs s’élèverait donc à 3.640.000, et le taux de chômage à 11,8%.
Mais cela n’est pas tout. En Grande-Bretagne, l’allocation chômage plafonne à l’équivalent de 80 € par semaine quelque soit le salaire antérieur, et l’indemnisation cesse automatiquement au bout de 13 semaines ou en cas de refus d’accepter un emploi, quel qu’il soit. Si le conjoint d’un chômeur a un emploi, son allocation sera réduite ou supprimée. Des centaines de milliers de chômeurs sont ainsi dissuadés de s’inscrire ou de continuer à s’inscrire comme demandeur d’emplois. Ils ne sont donc pas pris en compte dans les statistiques du chômage.
Les conditions draconiennes d’inscription en dissuadent des centaines de milliers d’autres. Ce mode de calcul touche particulièrement la population féminine. Selon Margaret Maruani ("Les mécomptes du chômage" - Bayard 2002), c’est la moitié des femmes au chômage qui sont chassées des statistiques par ces conditions d’inscriptions draconiennes.
Au Royaume Uni, les statistiques annoncent le plein emploi mais le chômage réel, toujours aussi massif, continue de peser de tout son poids sur les salaires et les conditions de travail.
On comprend pourquoi Sarkozy a fini par en rêver tout éveillé...
Jean-Jacques Chavigné pour www.democratie-socialisme.org
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