Jean-Marc Boulanger, inspecteur général des affaires sociales, s'est penché sur les moyens d'améliorer le suivi des demandeurs d'emploi. Il propose, dans un premier temps, d'avancer la mise en œuvre du suivi mensuel personnalisé (SMP) dès le premier mois au lieu du quatrième afin de «maintenir la stimulation nécessaire» à la recherche d'un travail. Les conseillers ANPE, déjà fort éprouvés par la mise en place du SMP depuis 2006, apprécieront, d'autant plus que le rapport de M. Boulanger élude — étrangement — le renforcement du nombre d'agents — plusieurs milliers —, pourtant incontournable à la réussite de cette idée. Ensuite, il suggère de tripler le recours aux opérateurs privés, portant le nombre annuel de chômeurs accompagnés par leur biais de 36.000 à 100.000 => lire en commentaire...
C'est à la mode : sous prétexte que nos petits copains européens (ou même australiens !) se sont engouffrés dans la brêche de la privatisation du service public, il faudrait faire comme eux. Tel est, d'ailleurs, le discours qu'on nous assène quand il s'agit de dire que la France est "en retard" ou "moins bonne que les autres" afin d'imposer une libéralisation économique à tous les niveaux, même en dépit du bon sens, même là où les fluctuations du marché s'avèrent particulièrement néfastes. Même si nos petits copains, qui l'ont expérimenté avant nous (le réseau ferré des Britanniques, l'électricité des Australiens…), en savent quelque chose. Une fois de plus, aucune vision personnelle dans une course à la mondialisation où l'on copie aveuglément sur les voisins plutôt que d'inventer ses propres solutions. Comme ironise Anne Roumanoff : «1968, c'était l'imagination au pouvoir. 2008, c'est le pouvoir sans imagination.» On en regretterait presque le grand Charles.
Le vrai visage de la réforme
La concurrence du privé permet au public de «créer de nouveaux services, de modifier ses pratiques», justifie Jean-Marc Boulanger. Pourtant, il reconnaît lui-même que l'efficacité du secteur privé n'est absolument pas prouvée...
Alors qu'il est question de faire des économies tous azimuts, M. Boulanger tait un détail majeur : le coût du suivi des chômeurs par les opérateurs privés est nettement supérieur à celui du public. Et qui paie - au prix fort - pour cela ? L'assurance-chômage, bien évidemment. A l'heure où la pression supplémentaire exercée sur les demandeurs d'emploi va permettre de soulager encore un peu plus les finances de l'Unedic en coupant les vivres à ceux qu'on va sanctionner, à l'heure où il est aussi question de transférer une partie de ses «excédents» vers les caisses de retraite au détriment des chômeurs, déjà spoliés d'indemnisations et de formations décentes, M. Boulanger fait exceptionnellement fi de la rigueur ambiante en choisissant d'ouvrir aux cabinets privés de nouvelles perspectives de profit… grâce aux deniers publics !
On sait qu'il n'y a pas assez d'emplois pour tout le monde, mais on s'en prend à ceux qui en sont privés. On sait que tous les "accompagnements" et les "suivis" du monde, faute de matière première, ne sont qu'une gestion de la pénurie. Mais, dans la logique libérale, existe toujours la possibilité de créer un nouveau marché - artificiel, parasite et juteux - sur le dos d’une situation scandaleuse que le gouvernement minimise puisqu'il n'a nullement l'intention de l'assainir. Ainsi, mesdames et messieurs, grâce à la réforme du service public de l'emploi initiée par Nicolas Sarkozy, le chômage est enfin un business légitimé !
Le malheur des uns fait le bonheur des autres. Qui, à part les chômeurs, a réellement intérêt à ce que ça change ?
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Commentaires
Deux autres exemples :
• Crédits en promo à l'ANPE
Le chômeur qui souhaite créer son propre emploi ne manque de propositions… pour s'endetter, et enrichir les organismes de crédit.
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Réduire son ISF en faisant un don à une structure d’insertion par l’activité économique ou en investissant dans une PME d’insertion : un dispositif fiscal avantageux, présenté par le site… «Socialement Responsable.org» ! Répondre | Répondre avec citation |
Décidé à mieux contrôler les chômeurs, le gouvernement l'est tout autant à améliorer leur accompagnement et à faciliter les conditions de leur retour à l'emploi. Après avoir défini l'offre d'emploi ne pouvant être «raisonnablemen t» refusée, la ministre de l'Emploi Christine Lagarde et son secrétaire d'Etat Laurent Wauquiez explorent les moyens d'améliorer les prestations délivrées par l'organisme issu de la fusion ANPE-Assedic, connu sous le nom provisoire de «France Emploi». Le rapport qui leur a été remis par Jean-Marc Boulanger, inspecteur général des affaires sociales, montre que beaucoup reste à faire.
«Maintenir la stimulation nécessaire»
Aujourd'hui, le suivi individualisé ne s'enclenche qu'à partir du 4e mois de chômage. Ce n'est pas pénalisant pour le tiers des personnes, qui retrouvent un emploi dans les trois premiers mois. Mais, pour les autres, le délai de quatre mois ne permet pas de «maintenir la stimulation nécessaire» à la recherche d'emploi. Le rapport suggère donc d'avancer la mise en œuvre du suivi mensuel dès le premier mois de chômage. Cela supposerait de renforcer, de quelques milliers, le nombre d'agents en contact direct avec les chômeurs. Mais ce volet n'est pas évoqué précisément dans le rapport…
100.000 personnes par an
Pour compléter cette offre, Jean-Marc Boulanger suggère d'accroître le recours aux cabinets de placement privés (Altédia, Ingeus, BPI, etc…). Ceux-ci expérimentent déjà le suivi de 36.000 chômeurs par an, moyennant un financement assis sur les résultats. Leur contribution au suivi des chômeurs «doit désormais s'inscrire durablement dans le système d'accompagnement personnalisé piloté par le nouvel opérateur», estime Jean-Marc Boulanger. Il suggère que les cabinets privés puissent prendre en charge, par exemple, 100.000 demandeurs d'emploi par an, soit près de trois fois plus qu'aujourd'hui.
Rationalisation des agences
Paradoxalement, Jean-Marc Boulanger ajoute qu'il n'existe pas de «preuve générale» que le secteur privé soit plus efficace que le secteur public. Mais la concurrence du privé permet au public de «créer de nouveaux services, de modifier ses pratiques». La France accuse, en fait, un certain retard par rapport à ses voisins européens : aux Pays-Bas, 90% des prestations sont assurées par le privé. En Australie, ce taux atteint même 100%. Le recours au privé se développe aussi fortement en Grande-Bretagne, en Italie et en Allemagne, ajoute le rapport.
Jean-Marc Boulanger évoque aussi prudemment la question de la rationalisation des agences. Issu de la fusion de l'ANPE (860 agences) et des Assedic (640 agences), «France Emploi» dispose aujourd'hui de 1.500 points d'implantation. Dans certains cas, la proximité immédiate des lieux permettra des regroupements en un seul lieu. «Il ne faudra pas se priver de réaliser de telles opportunités», affirme le rapport. Des fermetures d'agence pourront avoir notamment lieu dans les zones urbaines denses où les questions de transport ne seront pas prégnantes, ajoute son auteur.
(Source : Les Echos) Répondre | Répondre avec citation |
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Si les salariés qui ont perdu leur emploi s'appauvrissent, grâce à eux nombre d'organismes, plus ou moins honnêtes ou compétents, pullulent et s'enrichissent. Tour d'horizon d'un business aussi rentable que concurrentiel.
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A Lille, Ingeus teste ses techniques de management sur les sans-emploi depuis 2005. Elle déroule le tapis rouge, vous offre le café et vous refile un contrat de quelques heures dans le nettoyage… Et se fait payer entre 3.000 et 6.000 € la «prestation»… par l’assurance chômage !
• Le chômage, un marché pour les opérateurs privés
La sous-traitance de l'ANPE par des organismes privés (agences d'intérim, associations d'aide à l'insertion, cabinets de recrutement… pour des opérations allant de l'orientation au placement), déjà en vigueur depuis quelques années, représente 500 millions d'euros sur un budget total de 1,9 milliard. Répondre | Répondre avec citation |
Leur contribution au suivi des chômeurs «doit désormais s'inscrire durablement dans le système d'accompagnement personnalisé piloté par le nouvel opérateur», estime Jean-Marc Boulanger.
Actuellement l'ASSEDIC peut obtenir des informations personnelles sur les demandeurs d'emploi. Notemment dans le cadre des contrôles.
Les opérateurs privés "sous traitants" de l'ANPE ne peuvent accéder au DUDE (Dossier Unique du Demandeur d'Emploi), celui-là même qui permet de radier d'un seul clic. Pour mémoire, ces organismes ne sont pas autorisés à demander le N° NIR (Votre N° de Sécurité Sociale).
M. Boulanger envisage-t-il d'autoriser ces incursions dans la vie privée par des opérateurs également privés ?
Possible que non, possible que oui.
Mais si c'est oui, alors les chômeurs auront à faire avec une organisation de contrôle et de répression privée, financée par un syndicat majoritaire aux ordres des mêmes intérêts privés. Littéralement …
une "milice". Répondre | Répondre avec citation |
• 15% l'ont même connu au moins trois fois
• 24% disent avoir toujours alterné périodes d'emploi et de chômage
• 31% ont vécu une période de chômage supérieure à un an
• 15% ont bénéficié au moins une fois dans leur vie d'un minima social
• 10% déclarent travailler ou avoir déjà travaillé sous contrat aidé
• 15% de ceux qui travaillent se considèrent «dans une situation professionnelle précaire ou très précaire»…
Au total, un tiers des 25-59 ans sont ou ont été au chômage depuis/pendant plus d'un an au cours de leur carrière, ou bien ont été allocataires d'un minimum social (RMI notamment), ou bien ont "bénéficié" d'un contrat aidé.
Pour finir, un «noyau dur» représentant 14% des 25-59 ans a connu de façon récurrente le recours à un ou plusieurs dispositifs d'aide, soit au moins trois épisodes de chômage ou de passage aux minima sociaux. Et parmi les allocataires de ces derniers, face aux difficultés de recherche d'emploi, 49% disent avoir été découragés «au point d'arrêter de chercher pendant plusieurs mois».
Rappelons que, selon une évaluation du Centre d'analyse stratégique datée de janvier 2008, il y aurait en France entre 1 et 3,5 millions de personnes en âge de travailler qui seraient en "difficulté structurelle" sur le marché de l'emploi. Répondre | Répondre avec citation |
Les spécialistes de l’outplacement et de l’accompagnemen t ont régulièrement recours à des «chargés de projet» et à des «consultants emploi» en CDD qui, au rythme des contrats, pilotent ou animent les antennes-emploi et autres cellules de reclassement.
Depuis le rapport Boulanger, des offres d’emploi alléchantes fleurissent sur le site de l'Apec… Startpeople USG Restart, BPI, Alerys, Adecco, Sodie recrutent des «Consultants Emploi ou Accompagnement» pour des missions auprès d’un public de demandeurs d’emploi. En CDD de 6 à 9 mois renouvelables. Salaire annoncé : environ 2.000 € bruts par mois.
Ainsi, des précaires vont s'occuper de chômeurs, le temps de sortir eux-mêmes des chiffres de l'ANPE, puis de retourner pointer à l'Assedic. LIRE ICI Répondre | Répondre avec citation |