Déniché sur Eco89, ce premier article tout à fait intéressant :
Quand le consommateur travaille gratis sans le savoir
Régler ses achats à une caisse automatique, enregistrer ses bagages, suivre les instructions d'une boîte vocale pour changer de forfait téléphonique, participer à des tests de produits, poster des vidéos sur Youtube : le consommateur bosse à l'œil sans le savoir. C'est la thèse de Marie-Anne Dujarier, sociologue et auteur de «Le Travail du consommateur, de McDo à eBay» (La Découverte - 2008), lit-on en introduction.
En effet, grâce à l'extension du self-service, on assiste à une externalisation — très insidieuse — de tâches simples vers le consommateur. Pour les entreprises qui usent de cette forme rampante de «travail dissimulé», les consommateurs sont vus comme une main d'œuvre gratuite, abondante et parfois enthousiaste à la tâche… qui leur permet de réduire leur masse salariale. Consommateurs qui, par leur égoïsme ordinaire, participent donc activement à la disparition de certains emplois et sont aussi, en majorité, les premiers à insulter les chômeurs, qu'ils considèrent comme des fainéants sur l'air de «Du boulot, il y en a, mais il faut se lever tôt et se retrousser les manches» ! Seule compensation : la création de nouveaux emplois axés sur la conception, la maintenance et… le contrôle.
Lu dans Contre-Info, pour l'économiste américain Robert Reich,
Le progrès technique est la cause réelle de la désindustrialisation
Les avancées technologiques étaient censées libérer l'homme des tâches routinière et asservissantes, et nous rapprocher d'une société où une quantité de travail humain moindre permettrait de subvenir aux besoins de tous. Au tournant des années 80, le cercle vertueux dans lequel les gains de productivités se transformaient en gains de revenus et en diminution du temps de travail pour la majeure partie de la population a été rompu dans l'ensemble du monde occidental. Depuis lors, l'industrie, grande pourvoyeuse d’emplois, a peu à peu décliné, laissant place à des emplois de service, tandis que s'installaient le chômage de masse et la précarité.
Le progrès technique et informatique, en supprimant les tâches routinières, a détruit quantité d'emplois qui, dans le modèle fordiste, étaient générateurs de valeur ajoutée, auxquels se sont substitués une petite cohorte d'experts et de techniciens hautement spécialisés, largement rémunérés, et une grande masse d'emplois de services déqualifiés, peu producteurs de valeur ajoutée, mal rémunérés, et dans lesquels la plupart des gains de productivité ne peuvent être obtenus qu'au prix d'un durcissement des conditions de travail. Ainsi, la redistribution des richesses est passée à la trappe, et la question sociale avec...
Enfin, pour continuer sur l'évolution technologique et finir sur une touche d'espoir, dans un dossier consacré à l'innovation, Télérama a interrogé le philosophe Bernard Stiegler :
Seule l'intelligence collective permettra une économie innovante
C'est un échec : le système capitaliste consumériste, à force d'avoir détourné le désir et la création en pulsions d'achat, a fabriqué des sociétés démotivées, individualistes et autodestructrices. Mais quelque chose d'autre est en train de naître : une innovation non plus conçue par le haut, par des ingénieurs et du marketing, mais émergeant de réseaux, d'échanges de savoirs, d'amateurs passionnés, qu'il appelle une «économie de la contribution».
Bernard Stiegler revient sur le regretté fordisme, ce modèle industriel qui, en inventant la figure du consommateur, a permis de résoudre - très provisoirement - le problème du chômage par une production de masse profitant à tout le monde, y compris aux travailleurs. Puis ouvert la porte à une économie libidinale où tout est devenu marché et où le chômage de masse est réapparu.
Alors que des millions d'actifs sont éjectés par cette machine infernale, si, irrésistiblement, le volume d'emplois est voué à se réduire, faut-il considérer ces exclus comme inutiles, voire nuisibles, et les euthanasier ? Nous retiendrons la conclusion du philosophe : «Je soutiens une vieille idée défendue par le plus libéral des libéraux, Milton Friedman : le revenu minimum d'existence. Idée qui a été relancée par André Gorz et que promeuvent en ce moment Olivier Aubert, Maurizio Lazzarato et Yann Moulier-Boutang. Ils prennent l'exemple de l'abeille, qui produit du miel, mais dont la valeur tient bien plus à sa fonction de pollinisation, qui permet la reproduction des végétaux, la nourriture des animaux et notre propre survie... Aujourd'hui, de plus en plus de contributeurs créent une valeur qui ne s'évalue pas sur le marché mais permet aux autres activités économiques de se développer. Cette "pollinisation" doit être rémunérée et mutualisée. Einstein aurait dit que l'humanité mourra d'avoir détruit les abeilles. Devenons collectivement plus intelligents pour ne pas en arriver là.»
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