Menées «au pas de charge» (à peine trois mois de travail avec les syndicats, puis 50 heures de débat à l'Assemblée qui se sont conclues par une levée de séance autoritaire), la manière dont les négociations françaises sont menées nous distingue gravement de nos voisins européens.
[...] Moins de quatre mois se sont en effet écoulés entre la présentation aux partenaires sociaux des premiers éléments de la réforme, et le vote du texte en première lecture. Mais le lancement du sujet remonte au 15 février. Les organisations syndicales sont alors conviées à l'Elysée pour un «sommet social» au cours duquel Nicolas Sarkozy promet des «négociations avec les partenaires sociaux» sur la réforme des retraite. Et le président de la République d'insister : «Nous prendrons tout le temps nécessaire pour dialoguer, pour que les positions de chacun soient parfaitement comprises, pour que les Français soient clairement informés des enjeux et des solutions».
La méthode choisie pour cette négociation est celle des rencontres bilatérales, ministre du Travail ou chef de cabinet du ministre et organisation syndicale. Ces rencontres ont commencé à la mi-avril, une fois le nouveau ministre du Travail, Eric Woerth, entré en fonction. A l'arrivée, les syndicats totalisent six ou sept réunions chacun.
Un mode opératoire bien différent de celui à l'œuvre en 2003 pour la réforme Fillon, si l'on en croit Bernard Devy, chargé des retraites à Force ouvrière (FO) : «A l'époque il y avait eu concertation avec l'ensemble des parties prenantes, syndicats et patronats, et non des bilatérales. Mais surtout, François Fillon avait conduit la réforme du début jusqu'à la fin, et nous avions une idée précise du projet de loi avant son dépôt à l'Assemblée. Cette fois-ci, nous n'avons jamais reçu le texte définitif qui allait être présenté au Parlement».
Les organisations syndicales n'obtiennent pas de réponses à leurs interrogations, en particulier sur le financement du système. Le tout avec le désagréable sentiment que tout est écrit d'avance, sauf peut-être sur des sujets «négociables» comme la pénibilité. Il ne se passera qu'un mois entre les premières annonces gouvernementales et la présentation du projet de loi. Les syndicats ne recevront aucun élément en amont sur les ajustements finaux du texte, annoncés directement par Nicolas Sarkozy après la mobilisation du 7 septembre.
Ce pilotage par l'exécutif doit-il être mis sur le compte d'une spécificité française ? Bernard Vivier dirige l'Institut français du travail : «En France, tout vient de l'Etat et de l'exécutif, donc tout converge vers lui. L'impulsion des réformes vient de l'Etat, la réaction va contre lui. La classe politique dans son ensemble est dans une logique qui consiste à vouloir distribuer les rôles alors que dans les autres pays européens, les parties prenantes, Etat-patronat-syndicats, décident ensemble de leur action. Ce qui conduit souvent syndicats et patronats à être les vrais auteurs des réformes, après discussion. Nous avons en France une loi qui autorise les partenaires sociaux à être une force de proposition autonome : cette loi est un vœu pieu. Les syndicats sont réduits à la réaction et ne peuvent être dans la construction. Quand ce n'est pas l'autorité légitime pour le faire qui se saisit d'une réforme, il ne s'agit pas de négociation ni de concertation mais de confiscation du dialogue social».
Pour ce spécialiste, ce serait aux partenaires sociaux d'organiser la discussion sur de tels sujets. Apparemment, la France en est loin.
(Source : Eco89)
Au Parlement européen, on rit des méthodes de notre gouvernement :
(C'est un canular… criant de vérité)
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