Un couac de plus dans l’histoire déjà très controversée de ce tarif dit "de première nécessité" (TPN) créé par le gouvernement Jospin en 2000, mais qui aura mis des années à voir le jour.
Paru en avril 2004, le décret instituant le TPN au 1er janvier 2005 permet aux personnes en difficulté assujetties à la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) ou justifiant de ressources annuelles inférieures ou égales à son plafond, de bénéficier d’une réduction de 30% à 50% sur une partie de leur facture d’électricité. La réduction s'élève en moyenne à 70 € par an.
Mais sur les quelque 3 millions [1] de titulaires de la CMU-C, seuls 20% ont l’obtenu. Pis, le nombre de bénéficiaires est en chute libre : il est passé de 940.000, fin 2009, à 650.000 à la mi-2010.
Décrocher le TPN n'est pas une sinécure. «Les ayants-droit ont de moins en moins tendance à entreprendre les démarches», reconnaissait EDF en juillet. Début août, UFC-Que Choisir tirait le signal d'alarme : «Aujourd'hui, seuls 31% des ayant-droits en bénéficient car il est peu connu et le système pour l'obtenir et le conserver est un vrai parcours du combattant.»
Une erreur d’interprétation
Mais une autre raison, relevée par le médiateur de l’énergie saisi par des plaintes d’usagers, explique l’inefficacité du dispositif. Au terme du décret de 2004, le calcul du montant du TPN devait se faire sur la base d’un abonnement simple ou heures creuses et pleines d’une puissance maximale de 9 kVa. Or, EDF a interprété le décret de telle façon qu’il a décidé d’exclure du TPN les usagers ayant souscrit un abonnement plus cher de type Tempo, ou d’une puissance supérieure à 9 kVa. D’où le rappel à l’ordre du médiateur dans sa recommandation : «La puissance et le tarif souscrits ne sont pas des conditions d’attribution du TPN mais seulement des données à prendre en compte dans son calcul.»
En transformant une simple règle de calcul en motif d’exclusion du TPN, EDF reconnaît avoir privé 30.000 ayants-droit du tarif social, soit 6.000 foyers par an depuis 5 ans. Dans sa réponse au médiateur, EDF fait son mea culpa et promet de rectifier au plus vite les choses. Mais, n'étant autorisée à garder les fichiers des demandeurs que pendant un an, seuls «6.000 d'entre eux environ seront donc indemnisés sous forme d'un "geste commercial"».
Reste à savoir pourquoi l’entreprise s’est livrée à ce tour de passe-passe ? La réponse est peut-être à rechercher du côté du coût de ce tarif social. Selon les prévisions de la Commission de régulation de l’énergie (CRE), il aurait dû bénéficier en 2010 à 950.000 personnes et peser à hauteur de 73,4 millions d’euros dans les comptes d’EDF, soit une hausse de près de 30% en deux ans. De là à penser qu’EDF a voulu réduire le poids de la charge...
(Source : Le Parisien)
NDLR : Ces explications demeurent insuffisantes. Ce ne sont pas 30.000 mais 300.000 bénéficiaires du TPN qui se sont volatisés non pas en cinq ans, mais depuis le début de l'année. Où sont passés tous les autres ? Denis Merville, le médiateur national de l'énergie, serait bien inspiré d'approfondir sérieusement son enquête...
[1] Au 31 mars, selon le Fonds-CMU, ils étaient 4,22 millions de bénéficiaires et non "quelque 3 millions". Ces personnes ont justifié auprès de la CPAM d'un revenu mensuel inférieur à 634,25 € pour une personne seule sur les douze derniers mois.
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