Le modèle anglo-saxon a du plomb dans l'aile.
En Irlande, pays ruiné par ses banques, le taux de chômage s'élevait à 14,7% de sa population active au 4e trimestre 2010. Fin février 2011, 439.200 Irlandais étaient inscrits au FÁS (Training and Employment Authority, l'équivalent de notre Pôle Emploi) sur une population totale d'environ 4,4 millions d'habitants. Plus de la moitié d'entre eux sont sans emploi depuis plus d'un an : la durée de versement des prestations de chômage étant limitée à 12 mois, ils ne sont plus indemnisés. Quant aux autres, ils se contentent d'une allocation moyenne de 150 €/semaine, hors supplément pour enfant ou adulte à charge.
Au Royaume-Uni, fin janvier 2011, le chômage touchait officiellement 8% de la population active, soit 2,53 millions de personnes dont 974.000 jeunes, sur une population totale d'environ 61 millions d'habitants. En parallèle, le nombre de bénéficiaires de l'allocation-chômage a reculé : ils ne sont que 1,45 million à survivre avec 80 €/semaine, 60 € s'ils ont moins de 25 ans, et ce pendant 6 mois maximum.
Le plan d'austérité du gouvernement du Premier ministre conservateur David Cameron devrait entraîner la disparition de 330.000 emplois publics sur quatre ans. De quoi obliger les chômeurs britanniques à travailler gratuitement pour la collectivité, soi-disant afin de «casser le cycle de la dépendance» et mettre fin à la «culture de l'assistanat»... isn't it ?
SH
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La crise n’a pas tué Billy Memiry, mais c’est tout comme. Cet Irlandais de 51 ans, qui en paraît dix de plus, a perdu son boulot de recouvreur après l’éclatement de la bulle immobilière en 2007, comme les deux tiers des ouvriers en bâtiment. Impossible d’en retrouver un : le secteur de la construction, qui fut l’un des piliers de l’économie irlandaise, a été le plus durement frappé par la crise et reste aujourd’hui totalement sinistré.
Billy survit grâce aux aides sociales – 188 euros par semaine contre 800 lorsqu’il travaillait. Le chômage a eu raison de son couple. Depuis sa séparation, ce père de trois enfants squatte chez un ami, et traîne dans la rue le jour, «pour ne pas l’embêter». «Je ne vois aucun futur pour moi», lâche-t-il, avouant avoir pensé au suicide. Difficile de compter sur le soutien d’amis ou d’anciens collègues : «On est tous dans le même bateau, alors c’est chacun pour soi», regrette-t-il. Il a dû renoncer à tout – les vacances, la vie sociale, même les soins chez le médecin. Ne lui reste que la colère. Contre «les politiciens, les banquiers et les spéculateurs, les responsables de tout ce merdier». Des «criminels» que cet ouvrier espère voir punis un jour, sans trop y croire.
Piège
Au début des années 2000, ce sont eux qui ont alimenté la folie immobilière. Les banques octroyaient des prêts astronomiques et les maisons se construisaient à tour de bras – en moyenne 18 pour 1000 habitants en 2007, contre 5,3 dans le reste de l’Europe. La bulle a fini par éclater, faisant de l’Irlande le premier pays européen à entrer en récession.
Aujourd’hui, le piège continue de se refermer sur les victimes de la crise. Après avoir perdu son travail de conducteur de chantier, William Purcell va désormais perdre sa maison. «Je ne peux plus rembourser mon prêt immobilier. Je me bats, mais c’est perdu d’avance», dit-il d’une voix blanche. Sans emploi depuis quatre ans, il consacre «tout son temps à [ses] enfants» qu’il amène et ramène de l’école chaque jour, et tente de meubler sans devenir fou les heures qui s’étirent entre les deux. A 44 ans, il n’envisage pas de reconversion: «Je ne sais rien faire d’autre».
«Rester compétitif»
Pour tenter de retrouver du travail, tous ont sacrifié leur salaire. Darren Fagan, charpentier, n’ose pas dire de combien. On saura juste que c’est «largement plus de la moitié», ce qui lui permet de «rester compétitif» et d’avoir quelques chantiers ici et là, quitte à travailler à perte.
Pour beaucoup, l’émigration semble désormais la seule issue. Faute d’avoir retrouvé du travail en Irlande, Ken Long et Edward Murfy, 28 et 25 ans, vont ainsi partir en Norvège. Un contrat d’un à deux ans les y attend, avec lequel ils gagneront presque autant qu’avant la crise. Quand ils le peuvent, de plus en plus d’ouvriers font ce choix. Le prix à payer ? Des familles éclatées, avec une femme et des enfants que l’on ne voit plus qu’une fois par an, pour les fêtes.
«C’est une génération détruite, se désole Constantin Gurdgiev, économiste au Trinity College de Dublin. Et même s’il reprend, le secteur de la construction ne sera jamais comme avant. Seul un quart des ouvriers retrouveront du travail». Pire, malgré une hausse des exportations, l’économie irlandaise continue de décliner, tandis qu’un ralentissement européen menace tout début de reprise.
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