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On ne vous présente plus les contrats aidés ou CUI, «réservés aux personnes éloignées de l'emploi depuis très longtemps». Cette année, le gouvernement a prévu d'en financer 440.000. Rarement à temps complet et mal payés, ils sont une aubaine pour les employeurs — publics, privés ou associatifs — que l'Etat subventionne à 70% à hauteur du Smic en échange de leur dévouement. C'est pourquoi leur impact en matière de réinsertion reste insuffisant. Par contre, leur impact statistique sur les chiffres du chômage est, lui, avéré.
L'autre idée, c'est d'orienter jeunes et "seniors" vers des contrats de professionnalisation. Là aussi, sous prétexte d'apporter au chômeur jugé "inemployable" une qualification, l'employeur qui se dévoue bénéficie de largesses, puisqu'il est exonéré des cotisations patronales de Sécurité sociale ainsi que des cotisations d'allocations familiales et d'accident du travail sur la partie du salaire ne dépassant pas le Smic (ce qui, là non plus, n'incite pas à payer plus). Comme pour les CUI, l'indemnité de précarité versée habituellement en fin de CDD n'est pas due. Et à la fin, rebelote : l'employeur peut reprendre aux mêmes conditions un autre pigeon pour 6 à 24 mois.
Des jobs qui ne permettent pas de vivre avec, à la clé, une hypothétique (ré)insertion professionnelle : voilà ce que l'Etat a sous la main pour ceux que le marché du travail rejette le plus, finançant à grands coups d'argent public (plusieurs milliards qui profitent directement aux employeurs) la précarisation structurelle de l'emploi.
Même chose pour le service civique
Créé en mars 2010 sous la houlette de Martin Hirsch, grand spécialiste de l'emploi bradé, ce dispositif consiste à proposer à des jeunes âgés de 16 à 25 ans, diplômés ou non, désœuvrés mais «volontaires» (quand on n'a pas le choix, on le devient), de travailler de 6 à 24 mois, entre 24 et 48 heures par semaine, dans une association ou une collectivité publique contre un pécule de… 542 € par mois : un fixe de 442 € versé par l'Etat + 100 € versés par la "structure d'accueil" pour les frais de transport, logement et nourriture. Le service civique n'étant pas un emploi salarié, il n'ouvre pas droit au chômage. Par contre, il ouvre des droits à la sécurité sociale et valide des trimestres pour la retraite, c'est déjà ça.
Un «engagement» non réciproque
Le dessein du service civique est de faire émerger «une jeunesse qui s'engage, une génération solidaire», et d'être «vecteur de lien social»… à durée déterminée. Car à ce tarif, si le jeune est fier de «s'engager» «de façon désintéressée», la réciproque n'est pas vraie.
La majorité des entreprises — dont on connaît le degré de citoyenneté — demande aussi à leurs jeunes stagiaires ou intérimaires de «s'engager» à fond, agitant la sempiternelle carotte du CDD ou du CDI pour, au final, les mettre dehors. Stage amélioré, censé ne pas se substituer à un emploi de fonctionnement (tu parles !), le service civique ne vaudra pas mieux : vu l'avantage procuré — seulement 100 €/mois de frais à sortir pendant un an —, il semble évident que les collectivités, au lieu d'embaucher, vont allègrement en user, le dispositif permettant, à moindre frais, de colmater les trous laissés par les destructions d'emplois publics programmées par le gouvernement. Quant aux associations désargentées, «missionner» un jeune en service civique est encore plus alléchant que recruter quelqu'un en CUI-CAE.
Coût pour l'Etat : «à peu près 9.000 euros par an en année pleine», selon Martin Hirsch qui en gagne autant chaque mois. Les 97 millions budgétés pour 2011 doivent permettre de couvrir un maximum de 15.000 contrats. Même à ce prix, l'opération demeure rentable. Et d'un point de vue statistique, elle le sera aussi : à l'horizon 2014, le gouvernement souhaite que le dispositif touche 75.000 jeunes citoyens rêvant de s'intégrer enfin dans une société qui les exploite et les méprise.
SH
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Commentaires
Transport + logement + nourriture ben m… alors, bientôt ce sera 10 € et il faut dire merci hein !!!
Franchement à quand une révolution en France ???? parce que vraiment ça commence à être très lourd d'être pris pour des c… à ce point. Répondre | Répondre avec citation |
Concernant le séniors, pourquoi une formation? Ne serait-il plus raisonnable de se servir de leurs connaissances, leurs savoir faire pour encadrer, former des jeunes? N'est pas là une meilleure solution Répondre | Répondre avec citation |
Dans son programme truffé du concept de «citoyenneté», DDV le présente comme «obligatoire [pour les jeunes] pour une période de douze mois», fractionnable, et quand même «ouvert à tous» («vieux» compris), pour «remplir des tâches d’intérêt général» en échange de son «revenu citoyen» de 850 €.
www.marianne2.fr/Villepin-service-civique-ou-travail-force_a205054.html Répondre | Répondre avec citation |
www.20minutes.fr/article/712041/economie-les-jeunes-plebiscitent-service-civique-trouver-emploi
www.lejdd.fr/Societe/Depeches/Le-service-civique-surtout-pour-un-emploi-302675/
www.challenges.fr/actualites/afp/20110422.AFP9993/le_service_civique__vu_surtout_comme_un_atout_pour_trou.html
Il s'agit du résultat d'une étude TNS-Sofres… pour l'Agence du service civique. Donc, du pognon investi dans la com’ (au lieu de servir à améliorer le sort de ceux qui en ont besoin).
Souvenons-nous que, l'année dernière, au moment de la réforme des retraites, la presse titrait : "Les Français sont prêts à travailler plus longtemps"… ouais ?
"Les Français" gna gna gna, "Les jeunes" gna gna gna… Remarquez comment on parle, à la place et en leur nom, des "Français" ou des "jeunes" en les prenant pour des cons. Tant va la cruche à l'eau, dit-on. Répondre | Répondre avec citation |
Vente Flash : un jeune à 350 €/mois !
Copé réinvente le service du travail obligatoire pour les jeunes, financé par leurs parents
Nouvelle idée tout droit sortie du brainstorming déglingué de Jean-François Copé : un remaniement du Service Civique. Ouvrez grands vos yeux et vos oreilles car la proposition est la suivante :
1. Transformer le Service Civique (volontaire) en un Service Obligatoire.
2. Verser une modique somme de 350 €/mois pendant 4 mois, soit 3 fois moins que le Smic.
A droite, la mode semble être la restauration du travail forcé. Après les travaux d'intérêt général de M. Wauquiez, Copé propose donc aux 25% de chômeurs chez les 18-25 ans de… travailler pour 1/3 du Smic !
Alors que Génération-Précaire se bat pour réguler les stages et développer l'apprentissage, les idiots utiles de l'UMP proposent la généralisation des boulots mal payés…
Rappelons ce qu’est le Service Civique dans son essence : "Le service civique est un engagement volontaire d'une durée continue de six à douze mois donnant lieu à une indemnisation prise en charge par l'Etat, ouvert aux personnes âgées de 16 à 25 ans, en faveur de missions d'intérêt général reconnues prioritaires pour la Nation" (article 8 de n° 2010-241 du 10 mars 2010 relative au service civique).
Sous Chirac, l'indemnisation était de 650 € pour 35h d'investissement dans une association (sur une période de 6 à 9 mois) pour les 18-25 ans, et sous Hirsch, à 540 € pour 24h-35h sur 6 à 9 mois. On est donc déjà bien en dessous du Smic horaire.
Rappelons également qu'à cette époque par contre, M. Copé cachetonnait à 20.000 € par mois pour un temps partiel (!) en louant son carnet d'adresse de député, président du groupe UMP à l'Assemblée, maire de Meaux et président de la communauté de Meaux (ouf !) à un des plus grands cabinet d'avocats, Gide Loyrette Nouel.
Un après après la nouvelle mouture du service civique, une étude TNS Sofres commandée par l'Agence du Service Civique estime que 42% des jeunes étant au Service Civique sont à la recherche d'un emploi tout en leur permettant d'acquérir une expérience professionnelle . La priorité de la jeunesse est donc d'abord et avant tout de trouver un emploi qui permette de se loger et de vivre correctement. Mais pour l'UMP, qu'importent les 23% de pauvreté chez les jeunes filles de 18-25 ans, interdites de RSA et condamnées à la "mendicité familiale" ou à la mendicité tout court… L'urgence c'est de flatter les nostalgiques du service militaire… en bradant la jeunesse au passage.
Malgré toutes les promesses, malgré toutes les commissions et études, le constat est amer : les coupes budgétaires sur la jeunesse se multiplient et les soldes se poursuivent. M. Copé travaille certainement trop pour prendre la mesure du problème. Alors, soucieux de son intégration, nous lui proposons amicalement d'abandonner quelques un de ses mandats et de vivre l'expérience enrichissante du Service Civique à 350 € pendant 4 mois.
De quoi peut-être le faire réfléchir et promouvoir les contrats de travail de droit commun pour tous et en particulier pour les 18-25 ans. Répondre | Répondre avec citation |
Il y en a plus qu'assez de ces réformes appauvrissantes et méprisantes !! Répondre | Répondre avec citation |
Avant d'écrire des phrases chocs et d'illustrer le tout avec une belle boite de mouchoir (pour pleurer on aura compris, la prochaine fois mettez une bassine… pour vomir, ça sera encore plus clair), il faut se renseigner un peu plus sur le sujet…
Certes, le dispositif du Service civique est perfectible, mais il est d'une grande utilité, demandez aux volontaires ce qu'ils en pensent, qui eux ne s'arretent pas juste aux 540 € meusuels. C'est peu oui, mais 80 % des jeunes que je recrute vivaient avec moins de 300 € / mois. Répondre | Répondre avec citation |
Il s'agit "juste" de Sophie Hancart, Rédactrice en chef du site Actuchomage, initiales SH (et non BB !).
Ceci en guise de précision sur la forme, pas sur le fond !
Merci
Yves Répondre | Répondre avec citation |
Alors, sous prétexte que 80% des jeunes que vous recrutez vivaient avec moins de 300 €/mois avant de vous rencontrer, vous considérez que leur donner 540 € contre un travail effectué à plein temps est un progrès, dans la logique du "C'est mieux que rien" qui, visiblement, autorise tout, grâce à une (fausse) pénurie d'emplois savamment entretenue.
Ce n'est, effectivement, pas une belle boîte de mouchoir mais bien une bassine pour vomir qu'il faut sortir devant tant de charité !
Sophie Hancart Répondre | Répondre avec citation |
Toujours est-il, qu'au nom des dizaines de jeunes qui font un service civique chaque année et en ressortent grandis, enrichis, plus solidaires et interpellés par notre société, davantage prêts à rentrer dans la vie active, je défend le SC.
J'aimerais vous inviter à rencontrer ces jeunes… Répondre | Répondre avec citation |
www.service-civique.gouv.fr/content/petit-objet-web-0
Autant faire un stage c'est moins bien payé mais on n'est pas obligé de s'investir 24h/24 et donner jusqu'à 40 heures semaines.
@Guil :
Quelle est donc la structure que vous connaissez si bien ?
Quelles missions avez-vous proposé ?
La démission d'un emploi pour le service civique est réputée légitime : combien de jeunes on démissionné pour faire un service civique ? Répondre | Répondre avec citation |
N'hésitez pas à nous faire parvenir vos réflexions à : contact@actucho mage.org
Nous les publierons dans leur intégralité.
Yves Répondre | Répondre avec citation |
J'ai postulé à des CDI (dans le milieu de la culture et en région parisienne), tous m'ont été refusés : trop peu d'expérience. J'ai donc postulé à des services civiques, j'ai été pris pour une mission d'un an sur le papier, au final de 6 mois renouvelables (des fois que je sois une mauvaise recrue, on ne sait jamais, il faut assurer ses arrières !). Mais pour moi rien ne change, je serai toujours dans l'obligation de me trouver un emploi en complément pour (sur)vivre. Répondre | Répondre avec citation |
Alors en attendant de trouver mieux et de pouvoir construire quelque chose de pérenne, je vais continuer à faire ce que je fais depuis maintenant près de 5 ans : assurer le jour-le-jour, et tenter d'économiser un peu pour la suite. Un jour, on comprendra (trop tard) que la jeunesse, dans sa volonté d'apprendre, de faire et de bien faire, était à même de se constituer en levier contre cette crise qui, au fond, n'emmerde et n'inquiète que ceux dont les projets ont déjà abouti. Répondre | Répondre avec citation |