C'est une diversion statistique on ne peut plus bête, à l'image de l'Insee qui estime notre taux d'inflation à +1,6% alors que les charges contraintes des ménages continuent d'exploser.
Les exemples d'entourloupes ne manquent pas. Quand Christine Lagarde se glorifie qu'au premier trimestre 2011 «la France a créé 60.000 emplois», elle ne vous précise pas que plus de 80% de ces postes sont des CDD, des missions d'intérim et/ou des jobs à temps partiel. Quand Xavier Bertrand se réjouit parce qu’«il y a eu 21.100 chômeurs en moins en mars», il ne vous dit pas qu'en réalité la baisse est dix fois moindre, que l’«activité réduite» tronque les chiffres et que les radiations — toujours en hausse mois après mois — contribuent discrètement à ces fausses "embellies". Quant au nombre de chômeurs en fin de droits qui, découragés et n'ayant plus droit à rien, cessent de pointer et sortent des statistiques officielles, sur eux le silence règne.
Une pauvreté toute relative
C'est pareil avec la pauvreté monétaire dont un seuil définit arbitrairement la limite. En dessous de 949 € par mois, vous faites partie des 13% de pauvres du pays (chiffres d'avant-crise pour une personne seule). A partir de 950 €, comme par miracle, vous en sortez !
Ainsi, «le RSA a sorti 140.000 foyers de la pauvreté en 2010», titrent Les Echos. Et d'insister sur le fait que ce dispositif «a réduit la pauvreté laborieuse» alors qu'il s'est juste contenté, à quelques euros près, d'extraire ces foyers du seuil statistique fixé. Sauf que le montant moyen du complément salarial prodigué par le RSA "activité" s'élève à 170 €/mois : franchement, ça ne pisse pas haut, cette aumône n'empêchant nullement la galère quotidienne et l'exclusion de ces travailleurs par rapport au mode de vie standard. La remarque est tout aussi valable pour les Smicards, hypocritement qualifiés de «modestes» alors qu'ils sont, eux aussi, pauvres.
Précarité un jour, précarité toujours ?
De plus, la CNAF note qu'un turn-over important touche ces allocataires : chaque mois, elle compte quelque 100.000 entrées et sorties dans le dispositif, qu'il soit "socle" ou "activité". «Au total, ce sont donc environ 200.000 allocataires dont l'éligibilité a varié d'un mois sur l'autre», et ces mouvements internes concernent surtout des personnes qui travaillent à temps très partiel, donc très précaires.
Dans cet autre article des Echos, il est dit qu'«avec l'amélioration du marché du travail, le phénomène de mobilité pourrait s'amplifier». Ainsi, par un tour de passe-passe sémantique, la précarisation structurelle de l'emploi devient une «amélioration du marché du travail», ce qui est tout de même un comble !
On rappelle en passant que les allocataires du RSA doivent déclarer leurs misérables ressources tous les trois mois : un véritable casse-tête pour ceux dont les changements de situation sont perpétuels. Le flux des dossiers à traiter, plus important que prévu du fait de ces changements, contribue à engorger les CAF dont certaines antennes doivent épisodiquement fermer leurs portes afin de résorber les dossiers en retard.
«Un accompagnement vers l'emploi déficient»
Telle est l'autre perle pondue par Les Echos. Ce n'est pas l'emploi qui serait déficient, mais l'accompagnement vers celui-ci alors qu'il est non seulement rare mais de piètre qualité. Or, si l'emploi est rare et de piètre qualité, il est évident de tout «accompagnement» (plus souvent teinté de coercition) est voué à jouer un rôle de pansement sur une jambe de bois !
Qu'à cela ne tienne : on fait comme si la "reprise" était là, comme si l'emploi était disponible en abondance et on préfère mettre en cause Pôle Emploi, ce boulanger qui n'a plus de pain à vendre, ou alors les CAF, qui sont débordées.
Même tromperie sémantique quand on dit que «les effets [du RSA sont] encore à démontrer sur le retour à l'emploi», comme si l'emploi existait à profusion ! Or, de la même façon que Pôle Emploi ne créé pas des emplois mais tente péniblement de mettre en relation des offres (fort peu nombreuses) avec des millions de chômeurs qui cherchent du boulot, le RSA "activité" ne créé pas des emplois et n'est qu'une allocation visant à pallier la faiblesse des salaires proposés par nombre d'employeurs esclavagistes.
Tout ce blah-blah idéologique n'est donc, une fois de plus, qu'une grossière escroquerie.
SH
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