Qui sont les fraudeurs à l'assurance-maladie ? On connaissait déjà le montant total des fraudes détectées l'an dernier — 156 millions d'euros —, un rapport publié récemment par la Délégation nationale à la lutte contre la fraude (DNLF) en dévoile les détails, parfois surprenants.
Un constat d'abord : la majorité du préjudice est le fait, non pas des assurés, mais des professionnels de santé. «La spécificité de l'assurance-maladie, c'est que la plupart des prestations sont en nature (consultations, hospitalisations…) et non en espèces. Et qu'elles font intervenir des professionnels de santé. La fraude des assurés est donc différente de celle touchant les caisses d'allocations familiales, par exemple», explique Pierre Fender, directeur de la répression de la fraude. Lorsque les indus sont détectés, l'assurance-maladie peut infliger des amendes en plus des sommes qu'elle récupère. Elle peut aussi porter plainte. Au total, elle a ainsi économisé plus de 185 millions d'euros l'an dernier.
Arrêts maladie
Le principal préjudice causé par les assurés concerne les arrêts maladie, pour un peu plus de 5 millions d'euros en 2010. Il s'agit par exemple de personnes qui continuent à travailler tout en touchant les indemnités journalières de la Sécurité sociale, parfois avec la complicité de leur employeur. Les arrêts maladie considérés comme abusifs — un assuré dont l'état de santé justifierait qu'il reprenne le travail — ne sont pas considérés comme des fraudes.
Arrivent ensuite les fraudes à la couverture maladie universelle (CMU) et à l'AME (pour les étrangers en situation irrégulière), par usurpation d'identité par exemple. Ces préjudices concernant la gestion des droits des assurés sont faibles : 2,5 millions d'euros en tout.
Facturations atypiques
Les sommes en jeu sont beaucoup plus importantes pour les professionnels de santé. En tête de ce «palmarès» des fraudeurs, les infirmiers libéraux. L'assurance-maladie a constaté près de 13 millions d'euros de préjudice en 2010, 1 million de plus que l'année précédente. «C'est le résultat d'un programme national dans ce domaine», explique Pierre Fender. Les statisticiens de l'assurance-maladie repèrent des facturations atypiques, ce qui permet de concentrer les contrôles sur les cas suspects. Ainsi, un infirmier qui facture quatre fois plus de visites au domicile de ses patients que la moyenne de ses confrères attire vite l'attention. Il faut ensuite établir qu'il y a bel et bien eu des prestations fictives. La plupart du temps, les patients ne s'aperçoivent de rien, car beaucoup d'entre eux ne déboursent pas un centime (il s'agit souvent de personnes souffrant de maladies chroniques prises en charge à 100%).
Fausses ordonnances
Les transporteurs sanitaires arrivent en deuxième position avec un préjudice proche de 7 millions d'euros. Fraude la plus courante : en utilisant de fausses ordonnances (volées ou falsifiées), une société d'ambulances facture des transports qui n'ont pas été effectués. Le préjudice moyen est élevé : 16.000 euros. Viennent ensuite les médecins, dentistes et kinésithérapeutes, pour des sommes moins importantes. Actes fictifs, facturations multiples et faux codages — par exemple, un dentiste facture un acte mieux rémunéré que celui qu'il effectue en réalité — constituent l'essentiel de la fraude.
Dans les pharmacies, le préjudice dépasse 3 millions d'euros. Les fraudeurs peuvent par exemple facturer des médicaments qui ne sont pas délivrés, ce qui nécessite de falsifier les ordonnances, ou d'être en cheville avec un médecin.
Tarifs erronés
Le plus gros préjudice subi par la Sécurité sociale vient des hôpitaux et cliniques : plus de 70 millions d'euros l'an dernier, soit près de la moitié du total. Fraude la plus courante : un médecin facture à l'assurance-maladie un acte plutôt qu'un autre en raison d'un tarif plus avantageux, ce qui permet d'améliorer la situation financière de l'établissement. «Il s'agit là, bien souvent de fautes plutôt que de véritables fraudes», reconnaît Pierre Fender. Car la grille de codage est complexe et mouvante : on compte plus de 2.000 tarifs différents ! Les erreurs non intentionnelles sont donc fréquentes. L'assurance-maladie récupère les trois quarts des sommes en question, en grande partie sous forme de pénalités. Ces sanctions sont vivement contestées par les fédérations hospitalières.
(Source : Les Echos)
A (re)lire => Fraude sociale : un feuilleton de plus en plus rasoir
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