Le 13 septembre, Elise répond à une annonce de Keljob : «A., cabinet de recrutement spécialisé dans l'immobilier basé à Neuilly-sur-Seine, recherche pour le compte de son client une standardiste en CDI, tâches classiques d'une standardiste : accueil téléphonique et physique, mise sous plis, affranchissement du courrier. Salaire entre 18 et 24.000 euros.» Deux jours après avoir postulé, elle reçoit un appel de monsieur Patrick L., directeur du cabinet de recrutement. Rendez-vous est pris pour le lendemain.
La suite : «Patrick L. me reçoit, me donne d'emblée sa carte, regarde mon CV, et première question : “39 ans, célibataire. Vous avez des enfants ?” Je lui réponds “non”, ce qui est la vérité. Il me demande de détailler mon parcours, il me parle d'un CDD que j'ai effectué au sein de la société T. en 2003-2004 au service ressources humaines. Il commence à me poser des questions pointues, puis on repart sur mon parcours et là, la question : “Vous fumez ?” Je réponds “oui”. Et il me dit que son client est exigeant et ne “supportera pas les pauses pour les fumeurs”. Je me dis : si son client ne supporte pas les pauses pour les fumeurs, supportera-t-il les pauses pour aller aux toilettes ?»
«Nous sommes attachés à une forme de transparence»
Patrick L., le recruteur, veut bien nous "éclairer" sur cet échange dont il confirme la teneur : «Notre but, c'est que l'employeur et le candidat soient satisfaits, qu'aucun des deux ne soit déçu. Nous sommes attachés à une forme de transparence, des deux côtés, que chacun exprime ses limites. Par exemple pour cette dame, célibataire, il est important de savoir si elle a des enfants, et donc des contraintes horaires. Il ne s'agit pas de discrimination, mais c'est mieux de le préciser pour s'inscrire dans la durée. Personne n'a intérêt à ce que ça s'arrête après la période d'essai.»
La question sur la cigarette est, explique-t-il, liée aux contraintes du métier de standardiste-hôtesse, où on ne peut pas toujours s'absenter : «Il ne s'agit pas de discriminer les fumeurs mais, dans notre démarche professionnelle et qualitative, de bien préciser qu'il ne faut pas s'absenter trop longtemps.»
«Il y a des gens formidables qui fument»
Demander au candidat s'il fume n'est pas discriminatoire. Le recruteur a le droit de la poser car la cigarette est un critère «objectif», explique maître Philippe Ravisy, avocat spécialisé en droit du travail. Et d'ajouter : «Moi même je pose la question. C'est un problème d'hygiène, d'allergie. La cigarette me fait vomir. Si on me répond franchement, je dis : “Jamais dans le bureau”.»
Rien à voir avec un jugement de valeur : les fumeurs seraient des "losers" (une idée très en vogue aux Etats-Unis). Philippe Ravisy : «Il y a des gens formidables qui fument. Par exemple Audrey, qui a décroché le téléphone, elle est exceptionnelle. Et elle fume.»
Par contre, la question sur le fait d'avoir des enfants pose problème. Philippe Ravisy nous rappelle les 18 critères discriminatoires légalement répertoriés et punissables par l'article 225-1 du code pénal : origine, sexe, situation de famille, grossesse, apparence physique, patronyme, état de santé, handicap, caractéristiques génétiques, mœurs, orientation sexuelle, âge, opinions politiques, activités syndicales ou mutualistes, appartenance ou non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée.
Elise n'a pas été retenue pour ce poste de standardiste. «Pas assez aimable», selon le recruteur...
(Source : Eco89)
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