Jean-Luc Mélenchon, sénateur PS de l'Essonne et ancien ministre de l'Enseignement professionnel, estime que l'apprentissage à 14 ans est "une régression éducative sans précédent", estimant que le Premier ministre "se sert des événements dans les banlieues comme d'un effet d'aubaine pour un objectif politique sans rapport avec la situation". "En fait, sous prétexte d'élargir l'accès à l'apprentissage, il vient d'abaisser l'âge de la scolarité obligatoire pour tous les jeunes qui seront considérés comme indésirables dans l'institution scolaire", affirme le sénateur. "C'est une terrible régression politique en matière d'éducation", juge-t-il, alors que pour lui "le lien direct établi par le gouvernement entre la casse dans les banlieues et l'échec scolaire n'est nullement démontré". Selon M. Mélenchon, "l'idée que l'apprentissage soit le meilleur remède à l'échec scolaire n'est nullement avérée non plus". L'ancien ministre critique également cette décision du gouvernement qui "enterre l'objectif de conduire 80% d'une classe d'âge au bac, politique qui a permis une démocratisation historique de l'accès aux qualifications, notamment avec l'accès d'un nombre croissant de jeunes au bac professionnel".
Une proposition qui ne fait pas l'unanimité non plus parmi les représentants de l'artisanat en France, les Chambres des métiers accueillant "positivement" la mesure, critiquée en revanche par l'Union professionnelle artisanale : même si elle est "satisfaite de constater que le rôle structurant de l'apprentissage est à nouveau mis en évidence", l'UPA juge que l'abaissement de l'âge d'entrée "ne peut constituer une réponse pérenne aux difficultés d'insertion des jeunes". Cette mesure "ne répond pas non plus à la priorité des entreprises artisanales qui cherchent à recruter des personnels qualifiés ou à former des jeunes ayant acquis les savoirs de base : lecture, écriture et calcul notamment", souligne-t-elle. "La responsabilité des artisans, qui est déjà très étendue à l'égard de ces jeunes et de la société, ne peut aller jusqu'à assumer les missions d'éducation ou d'école de la vie". Mais pour l'APCM (Assemblée permanente des Chambres de métiers et de l'artisanat), la limitation de l'âge d'accès à l'apprentissage était considérée depuis longtemps "comme un frein à l'apprentissage de certains métiers". Cette annonce "est donc une réponse sur le long terme", pour "une filière qui marche, avec plus de 80% de taux d'insertion à l'issue de la formation", et "qui a fait ses preuves en matière d'intégration et de resocialisation des publics en difficulté".
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Quant au secrétaire général de la CFDT François Chérèque, il a accueilli avec prudence, mais sans la rejeter, l'idée de l'apprentissage dès 14 ans pour les enfants en grande difficulté scolaire émise la veille par le Premier ministre, en insistant sur la lutte contre les discriminations. "Qu'on adapte des filières d'apprentissage pour ces enfants-là, oui, il faut y travailler. A la CFDT nous sommes très favorables à l'apprentissage parce que l'on rentre dans une éducation beaucoup plus précise et motivante". "Les 14 ans me posent un problème. Il faut un suivi de formation spécifique. Peut-être des allers-retours en entreprise, qui ne soient pas obligatoirement de l'apprentissage traditionnel", a-t-il nuancé, soulignant la nécessité d'une action spécifique de soutien aux enfants en difficulté "dès l'entrée en primaire". La présidente du Medef Laurence Parisot "nous propose une négociation sur la diversité, pour lutter contre la discrimination à l'embauche. La CFDT y est prête", a-t-il conclu.
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Le gouvernement a annoncé mardi qu'il lancerait le lundi 14 novembre une campagne de valorisation des métiers de l'industrie à destination des jeunes de 15 à 25 ans.
"L'industrie a besoin des jeunes, à tous les niveaux de compétences (…). L'émergence de nouveaux métiers, le renouvellement des qualifications et les nécessaires remplacements issus des départs à la retraite montrent que l'industrie continuera à recruter", souligne le ministère de l'Industrie dans un communiqué.
"Paradoxalement, les entreprises industrielles rencontrent de réelles difficultés de recrutement", ajoute le ministère.
Une première campagne avait été lancée il y a un an, en octobre 2004. L'annonce d'une "deuxième vague" intervient au moment où la France fait face à une éruption de violences dans les banlieues, frappées notamment par un fort taux de chômage des jeunes.
Cette opération est baptisée "Avec l'Industrie mon aventure commence".
L'industrie représente environ 4 millions d'emplois directs et deux millions d'emplois indirects. D'ici à 2010, on estime à plus d'un million le nombre de postes à créer ou à renouveler en France dans l'industrie. Répondre | Répondre avec citation |
Multiplication des "bourses au mérite" et des "internats d'excellence" pour les jeunes issus de familles défavorisées : le gouvernement réactive des mesures valorisant la réussite personnelle dans un contexte d'état d'urgence et de violences urbaines.
Mardi après-midi, le Premier ministre Dominique de Villepin a "réitéré" ses trois priorités en matière scolaire : apprentissage dès 14 ans, multiplication par trois des "bourses au mérite" et des "internats d'excellence" pour jeunes de milieux défavorisés.
"Ce que propose le gouvernement, c'est de sauver ceux qui peuvent l'être avec des bourses au mérite et d'éjecter les autres en apprentissage à 14 ans", s'est indigné mardi Eric Favey, le secrétaire national de la Ligue de l'enseignement. "Une des origines des difficultés des jeunes, c'est le caractère de raffinerie de l'école, et là on renforce encore ce caractère !", a-t-il ajouté.
De son côté, Georges Dupon-Lahitte, président des parents d'élèves FCPE, a affirmé : "on est toujours dans une logique élitiste et élitaire. On valorise ceux qui réussissent et quel mépris affiche-t-on pour les métiers manuels !".
Les "bourses au mérite", compléments de bourses "classiques" pour les élèves qui suivent une scolarité au lycée, existent en réalité depuis la rentrée de 2000 mais la loi Fillon sur l'école prévoit une augmentation importante. Par exemple, les élèves ayant obtenu des mentions bien et très bien au brevet des collèges pourront, sous condition, en bénéficier dès la rentrée 2006.
D'ailleurs, dès le 29 septembre, en présentant son projet de budget 2006, le ministre de l'Education nationale, Gilles de Robien, avait déjà annoncé une augmentation de ces "bourses au mérite" : "cela représentera un effort de 4,7 millions d'euros. Cette mesure en faveur des élèves déjà boursiers devrait donc toucher 16.700 élèves de plus, soit 45.300 au total".
Lors d'un débat exceptionnel mardi à l'Assemblée nationale, le Premier ministre a confirmé sa décision de "multiplier par trois" le nombre de bénéficiaires de ces bourses. "Il y en a moins de 30.000 aujourd'hui, ils seront 100.000 à la rentrée 2006", a-t-il affirmé.
Les "internats d'excellence", deuxième grande ambition éducative annoncée par Villepin, sont un nouveau nom désignant ces "internats de réussite éducative" du plan Borloo de cohésion sociale. Il devrait y en avoir une trentaine d'ici 2009. Dominique de Villepin a également annoncé mardi qu'il y en aurait "10 supplémentaires ". Les premiers ont ouvert en cette rentrée à Douai et Lyon. A Douai, dans le Nord, le collège André Canivez ouvert sept jours sur sept accueille ainsi une vingtaine d'élèves dont l'environnement social ou familial compromet leur chances de réussite.
Le dispositif de "réussite éducative" annoncé le 25 août par le ministre de l'Emploi et de la Cohésion sociale Jean-Louis Borloo a pour ambition d'éviter le décrochage scolaire avec un budget en conséquence : "375 millions d'euros par an, deux fois plus que tout le budget de la politique de la Ville du gouvernement Jospin", avait affirmé M. Borloo fin août.
En revanche, le gouvernement propose pour ceux qui ont le plus de difficultés scolaires de partir en apprentissage dès 14 ans au lieu de 16, l'âge de fin de la scolarité obligatoire. Répondre | Répondre avec citation |
La Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) a soutenu jeudi la décision du gouvernement d'abaisser l'âge de l'apprentissage de 16 à 14 ans, tandis que le Medef s'est dit "ouvert" à ce projet mais sous certaines conditions.
"Nous sommes partisans de l'apprentissage à 14 ans parce que nous pensons que c'est sans doute une des meilleures méthodes pour sortir ces jeunes de l'inactivité dans les banlieues ou les secteurs un peu difficiles, pour leur donner un espoir, une possibilité de gagner leur vie et de s'intégrer dans la société", a déclaré à l'AFP Jean-François Roubaud, président de la CGPME. "L'apprentissage, c'est la meilleure voie de succès pour tous ces jeunes, surtout ceux qui sont en difficultés", a-t-il estimé.
De son côté la présidente du Medef Laurence Parisot, reçue jeudi à Matignon, a abordé ce thème avec le Premier ministre Dominique de Villepin. Lors de la rencontre, le Medef "s'est montré ouvert à l'apprentissage à 14 ans, mais à condition que la première année soit en réalité une année de pré-apprentissage sous statut scolaire et que les modalités de mise en oeuvre soient discutées branche par branche", a indiqué l'organisation patronale dans un communiqué. Répondre | Répondre avec citation |