Qui sont ces formateurs qui réclament toujours plus nombreux un numéro d'enregistrement ? Face à un mouvement qui croît d'année en année, les services de contrôle du ministère de l'Emploi et de la Formation professionnelle semblent quelque peu dépassés. Leur inquiétude rejoint celle de la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) face à un phénomène qui se développe aux confins de l'entreprise et de la vie privée.
Près de 13.300 nouveaux dossiers d'organismes de formation ont en effet été déposés auprès des services de contrôle régionaux du ministère de l'Emploi en 2004 et 14.000 en 2005 : «Il y a de plus en plus d'offres farfelues qui n'ont pas pour objet la formation professionnelle continue», constatent les auteurs du rapport 2003-2004 de la délégation générale à l'emploi sur le contrôle de la formation professionnelle qui va être prochainement publié. En 2004, quelque 4.000 demandes n'ont pas abouti (documentation incomplète...) et près de 11% des dossiers ont été refusés. Mais plus de 7.000 nouvelles entités de formation ont tout de même été officiellement déclarées, en une seule année.
Parmi elles, certaines sont qualifiées par le ministère de l'Emploi d'«organismes fantomatiques». A ce premier stade, le contrôle en vue de l'enregistrement apprécie l'activité d'une société de formation à travers le contrat qu'elle propose à la signature de son premier client, entreprise ou particulier. Selon ses critères, les prestations de loisirs, de bien-être ou de thérapie ne peuvent entrer dans le champ de la formation continue. Le coaching, lui, ne peut pas être financé sur les fonds de la formation lorsqu'il s'éloigne des préoccupations professionnelles et dérive vers un plan éthique, ésotérique, sexuel ou environnemental. La gestion de stress n'entre pas, non plus, dans le champ légal des formations, sauf si elle correspond à un métier exposé, comme celui de videur de boîte de nuit.
L'enregistrement n'est qu'un filtre
L'enregistrement auprès du ministère de l'emploi n'est qu'un filtre, pas un agrément. Une fois passé ce premier barrage, certains formateurs évoluent donc discrètement vers des enseignements moins académiques. Jusqu'à présent, les services de contrôle ne pouvaient pas annuler l'enregistrement d'un prestataire en examinant le contenu effectif qu'il dispense. Ils pourront le faire à partir de l'été, en application de la loi du 4 mai 2004. Cela permettra de réduire le nombre toujours croissant des quelque 45.000 organismes de formation enregistrés qui développent une offre de services multiformes. Seuls 710 sont reconnus par l'office professionnel de qualification des organismes de formation (OPQF), une association indépendante créée il y a dix ans à l'initiative de la Fédération de la formation professionnelle (FFP) pour répondre à l'attente des clients comme des pouvoirs publics.
«Nous sommes d'autant plus vigilants face à des formations touchant au comportemental et à la psychologie que le nouveau droit individuel à la formation (DIF) fait apparaître une demande de développement personnel du salarié à laquelle nous souhaitons aussi répondre», reconnaît Marie-Christine Soroko, déléguée générale de la FFP (320 adhérents).
Face à une individualisation croissante de la formation, la FFP préconise à ses adhérents de ne pas contacter directement les salariés. «Nous apprécions cette décision. Il peut y avoir danger pour l'individu, le salarié d'une petite entreprise notamment, face à la profusion des offres», estime Catherine Puzenat, déléguée du Groupement des responsables formation et relations humaines (GARF). La première préoccupation de ces professionnels qui ont créé une base de données pour croiser leurs informations concerne la qualité des prestataires de formation et la confiance à leur accorder.
Des dérives sectaires
Depuis quelques années, les sites Internet, les journaux gratuits et les magazines spécialisés en psychologie fourmillent de petites annonces et publicités mêlant développement personnel et professionnel. Elles sont épluchées par les contrôleurs de la formation, qui recoupent leurs observations avec les interrogations de certains stagiaires de retour de formation.
«Les charlatans prolifèrent jusqu'à la dérive sectaire», observe-t-on à la sous-direction des politiques de formation et du contrôle du ministère de l'Emploi, qui travaille sur ces sujets main dans la main avec la Miviludes. L'un des responsables du contrôle est l'auteur direct d'une partie du rapport de la mission publié début mai. Il s'agit de débusquer les réseaux en forme pyramidale, c'est-à-dire ceux qui cherchent à utiliser le client qu'ils ont formé comme un possible futur diffuseur et formateur et l'encouragent à s'enregistrer auprès de l'Etat pour, à son tour, avoir un numéro officiel, bénéficier d'une exonération de TVA et de la possibilité de faire de la publicité. Les demandeurs d'emploi peuvent être une cible facile pour ces réseaux, promettant une formation et des gains financiers.
La tendance des entreprises à l'externalisation de certains services et la croissance de la population fragile des chômeurs participent à l'intérêt des sectes pour le marché de la formation. La Miviludes rappelle qu'il y a danger lorsqu'il existe un risque de mise en dépendance : «C'est dans l'actualité de nos préoccupations, c'est un grand problème qui s'installe sous nos yeux.»
(Source : Le Figaro)
Articles les plus récents :
- 19/05/2006 16:36 - Discrimination, l'Oréal et Adecco mis en cause
- 17/05/2006 17:26 - Un an après le NON, la France ne regrette rien
- 16/05/2006 12:06 - Chômeurs de 50 ans et plus, quels profils ?
- 16/05/2006 11:34 - L'emploi reste la première préoccupation des Français
- 11/05/2006 18:27 - Hausse des investissements étrangers en France
Articles les plus anciens :
- 11/05/2006 17:06 - 35h : la France dans la moyenne
- 10/05/2006 21:52 - Offres d'emplois et CDI en hausse à l'ANPE
- 10/05/2006 21:31 - 58% des internautes ne croient pas à la baisse du chômage
- 09/05/2006 22:01 - Zones franches : des entreprises sans charges ni scrupules
- 05/05/2006 20:24 - Après PSA, France Télécom licencie outre-Manche