Réduire ses coûts à tout prix revient cher. Gestion à distance aléatoire, dispersion, turnover, sous-équipement, mauvaise qualité des prestations, salaires locaux qui augmentent, autant de constats qui font que le miroir aux alouettes de la délocalisation se lézarde et perd des adeptes.
Par exemple le n°2 britannique de l'énergie, Powergen, filiale du groupe allemand E:ON, a décidé cette semaine de fermer ses centres d'appels délocalisés en Inde depuis 2001 pour créer 1.000 emplois en Angleterre. Motif : de nombreuses plaintes sur la qualité de son service. "Bien que le coût de l'emploi délocalisé puisse être bas, nous ne pouvons pas faire des économies au risque de mécontenter nos clients", a expliqué son directeur des opérations Nick Horler.
Même chose pour le groupe d'informatique américain Apple qui a renoncé début juin à ouvrir un centre d'appels à Bangalore seulement trois mois après avoir fait part de son projet, pour le faire "dans d'autres pays"… Et les banques britanniques Royal Bank of Scotland, Alliance and Leicester et Nationwide, assurent qu'elles maintiendront leurs centres d'appels au Royaume-Uni, puisque celui d'Abbey National en Inde s'attire des plaintes et risque la fermeture.
Certes, les informaticiens indiens attirent encore, en particulier les grands groupes financiers. La Deutsche Bank, la néerlandaise ABN Amro et l'américaine JP Morgan vont y transférer des centaines d'emplois de "back office". Mais la demande des compagnies étrangères a fait grimper les salaires, qui augmentent plus vite en Inde que partout ailleurs dans la région Asie-Pacifique et incitent certains groupes à préférer la Malaisie ou les Philippines.
Le fabricant de logiciels américain KANA a lui choisi de ramener ses programmateurs en Californie : "Pour des entreprises de notre taille, déplacer des emplois en Inde n'a tout simplement aucune logique économique", expliquait le mois dernier au magazine Fortune son patron Michael Fields, un ancien d'Oracle. Selon lui, la dispersion du personnel (concepteurs, programmateurs, chefs de projet) est néfaste et coûteuse : "Si votre équipe n'est pas très unie, vous aurez des choses à refaire, vous aurez plus de problèmes d'efficacité, et plus de retards". Il est certain de faire des petits et que le "backshoring", après "l'offshoring", est la prochaine tendance de la Silicon Valley.
Face à ce mouvement de désaffection, on voit même apparaître le phénomène du "nearshoring" qui fait que, par exemple, la société indienne ICICI OneSource a annoncé cette semaine l'ouverture de deux centres d'appels à Belfast, avec 1.000 emplois créés d'ici deux ans, pour se rapprocher des entreprises occidentales. Ou quand la mondialisation devient… un monde à l'envers !
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