En 2003, un rapport du commissariat au plan estima que «le dispositif d’aides publiques aux entreprises se caractérise en France par une méconnaissance des aides distribuées aux niveaux national, régional et local». A l'époque, rien que pour les aides de l'Etat, le rapport estima leur montant à 15 milliards d’euros pour l'année 2001, soit 1% du PIB, sans compter donc, les collectivités territoriales à savoir : la région, le département et la commune. Le même rapport nota par ailleurs «que le système d’aides français bénéficie largement aux grands groupes au détriment des petites et moyennes entreprises»... Cela, on s'en doutait...
Mais il y a plus préoccupant. En 2005, lors de la fameuse affaire Hewlett-Packard, Le Premier ministre chargea le Conseil d'orientation pour l'emploi (COE) - un organisme composé de 50 élus créé pour la circonstance - de rendre une étude "d'évaluation de l'utilisation et l'efficacité des aides publiques accordées aux entreprises". Comme lors du précédent rapport, le COE conclut que «les aides aux entreprises constituent aujourd'hui un champ vaste, mal connu et peu évalué», il déplora «qu'il n'existe à ce jour aucun recensement exhaustif des aides publiques attribuées en France». Reprenant le premier rapport pour y inclure les aides des collectivités territoriales et autres obscurs organismes publics, le COE estima le montant des aides à 3,5% du PIB soit, tenez-vous bien, 60 milliards d'euros par an ! Il s'agit là des aides directes et indirectes telles que les allègements fiscaux où, là aussi, il n'existe aucune étude ou rapport de synthèse laissant la porte ouverte à toutes sortes de spéculation... bref... l'opacité du montant des aides publiques est une constante sauf un commencement de chiffre officiel qui donne le vertige : 60 milliards d''euro !
Or, 60 milliards d'euros représentent une masse budgétaire qui n'est pas de dimension ordinaire. Pour en évaluer l'importance, il convient de la comparer à d'autres budgets. Par exemple, celui de la défense (32 milliards d'euros en 2005), celui de la Justice (5 milliards), 13 milliards pour l'intérieur, 6 milliards pour le logement, et 56 milliards pour le budget de l'Education nationale, c'est à dire le poste le plus important de tous les ministères.
Je n'aurai pas l'impudeur de prétendre que les entreprises reçoivent d'une main ce qu'elle versent de l'autre au titre de leur contribution à l’impôt sur les sociétés puisque comme son libellé l'indique, cet impôt ne concerne pas le commerce exploité en nom propre, mais je note qu'en 2005, les entreprises outre les sociétés ont reçu 60 milliards de subventions directes alors que le montant de l'impôt sur les sociétés s'est élevé à 50 milliards...
Et pour tous les branleurs, les assistés, c'est à dire les RMIstes et autres chômeurs selon le MEDEF, les fainéants profiteurs qu'il est absolument urgent de «contrôler avec plus d'énergie», il en coute à la collectivité 5 malheureux milliards d'euros par an ; 5 milliards d'euros desquels il faut inclure les aides directes attribuées aux entreprises pour l'emploi d'un RMIste qui sont, bien évidemment, comptabilisées dans le coût du RMI au lieu de figurer en partie dans le calcul des aides publiques aux entreprises, puisque c'est du fric qu'elles reçoivent.
Mes chers amis, il n'y a tout de même qu'en France que l'on assiste à des contradictions aussi évidentes. Quand on pense que Madame Parisot au nom du MEDEF n'a de cesse de réclamer un contrôle accru des demandeurs d'emploi alors que les sommes pharaoniennes versées aux entreprises ne font l'objet d'aucune comptabilité nationale, que leur contrôle est inexistant, et que pour clore le tout, les entreprises reçoivent des aides publiques pour créer de l'emploi alors qu'elles licencient à tour de bras comme HP ou Danone par exemple ; entreprises voleuses de deniers publics qui prennent de l'argent pour une mission tout en délocalisant dans le but de profiter davantage de la misère des salariés des pays émergeants.
Outre l'irresponsabilité juridique instituée par le droit français des procédures collectives à l'égard des dirigeants d'entreprise, on est en droit de se demander comment il est tolérable de laisser le MEDEF condamner le modèle "d'assistanat" français alors que lui-même a l'audace de se mettre dans la poche 60 milliards d'euros nets, libre de tout engagement ...?
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