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Accueil Social, économie et politique Les dessous du «Borloo populaire»

Les dessous du «Borloo populaire»

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Désormais publié au Journal Officiel, voici en quoi consiste le décret n°2006-1005 du «Borloo populaire», mesure phare de la loi ENL (Engagement National pour le Logement, qui renforce le Plan de cohésion sociale) et surtout nouvel avantage fiscal censé favoriser l'investissement locatif, de préférence dans le neuf.

Tout d'abord, cette loi n'a de populaire que le nom puisque son but est d'apporter "une réponse à la pénurie de logements destinés aux revenus dits «intermédiaires»"…

Les conditions à remplir

Pour pouvoir bénéficier de ce dispositif rétroactif au 1er janvier, les investisseurs immobiliers devront louer leur nouveau bien à titre de résidence principale pendant au moins 9 ans à des tarifs inférieurs de 30% au prix du marché.

Qu'il s'agisse d'investissements en direct ou par le biais de SCPI (Sociétés civiles de placement immobilier), les plafonds de loyers - charges non comprises - devront s'élever à :
• 15,92 € par m2 pour Paris, la petite couronne et alentour, le Genevois français et la bande littorale Hyères-Menton (zone A)
• 11,06 € par m2 pour les agglomérations de plus de 250.000 habitants et certaines agglomérations ou communes plus petites mais particulièrement chères (Annecy…) ainsi que dans les départements d'outre-mer (zone B1)
• 9,04 € par m2 pour les agglomérations comptant entre 50.000 et 250.000 habitants (zone B2)
• 6,63 € par m2 pour le reste du territoire (zone C)
Quant aux plafonds de ressources des locataires, ils devront correspondre au revenu fiscal de référence en cours et varieront en fonction du lieu de location : ainsi, par exemple, pour un couple sans enfant ils sont fixés à 48.226 € en zone A, 35.198 € en zone B1, 32.265 € en zone B2 et 29.332 € en zone C.

C'est tout bénef pour l'investisseur qui pourra déduire chaque année de son revenu imposable une fraction du prix d'achat du logement : l'amortissement fiscal sera de 50% du prix du bien après 9 ans de location, et pourra être porté à 65% si le logement est loué dans les mêmes conditions pendant 15 ans. Egalement, le propriétaire bénéficiera d'une déduction fiscale de 30% sur les loyers perçus…
Et à partir du 1er septembre 2006, ce nouveau régime coexistera avec le «Robien recentré» sur les grandes agglomérations ! Par le biais de ces deux généreux dispositifs d'incitation fiscale, le ministère du logement espère susciter de 20.000 à 25.000 placements locatifs sur les quelques 60.000 investissements locatifs annuels dans le neuf.

Borloo, spécialiste du détournement de fonds publics ?

Prenons l'exemple d'un logement de 50 m2 à Paris : le loyer y sera plafonné à 796 €, ce qui est déjà très lourd, surtout si les charges ne sont pas comprises…
Pour un couple sans enfant qui souhaiterait emménager dans cet appartement, s'ils sont Smicards tous les deux (c'est souvent le cas de ceux qui ont le plus de mal à trouver un logement), leur revenu fiscal de référence avoisinant les 25.000 € il sera donc largement inférieur au plafond de 48.226 € et, de ce fait, n'incitera aucunement un propriétaire à leur louer son bien car il risque fort de préférer pour cela un charmant petit couple de la classe moyenne. Qui, à ce prix, aura lui aussi bien du mal à s'en sortir.

Non seulement ce dispositif poudre aux yeux n'est pas accessible aux locataires les plus modestes, mais dans un contexte de flambée immobilière il est surtout une véritable aubaine pour les investisseurs privés... Par exemple, à petite échelle, un propriétaire pas trop pressé qui aura envie de s'acheter tranquillement un autre appartement - pour ses enfants, ou alors ses vieux jours - pourra se l'offrir à moindre coût grâce à la présence de locataires pendant 9 ans : ainsi sera-t-il "récompensé" sur les deniers de l'Etat.

Bref, le «Borloo populaire» n'est ni plus ni moins qu'une nouvelle trouvaille pour que les contribuables financent collectivement les achats immobiliers de ceux qui ont encore les moyens d'investir dans ce secteur. Ce n'est donc, une fois de plus et sous prétexte d'agir contre la crise du logement (comme les contrats aidés sont censés lutter contre le chômage, l'employeur exonéré recevant même des fonds publics pour exploiter son salarié), qu'une vaste opération d'assistanat en faveur de ceux qui n'en ont pas besoin, un subtil détournement de fonds publics soit-disant "pour la bonne cause" mais à l'impact plus que limité sur les 9 millions de personnes connaissant de réelles et importantes difficultés de logement en France.

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Mis à jour ( Dimanche, 13 Août 2006 03:26 )  

Commentaires 

 
0 # superuser 2006-08-13 02:47 Notre article du 1er Février 2006 :

Le 11e rapport annuel de la Fondation Abbé Pierre recence près de neuf millions de personnes connaissant d'importantes difficultés de logement en France.
En voici les principaux chiffres…


• sans domicile fixe : 150.000 personnes (chiffre réactualisé par la Fondation depuis l'enquête INSEE de 2001 recensant 86.500 SDF)
• en habitat de fortune, sous-location, camping : 934.000
• en logement sans confort de base (sanitaires, etc…) : 2.187.000
• en logement dégradé nécessitant l'intervention publique : 625.000
• en impayés de loyer de plus de deux mois : 715.000
• en situation de surpeuplement : 3.507.000
• hébergées chez des tiers faute de logement : 823.000

La Fondation souligne également que, chaque année, le nombre de ménages dont on résilie le bail après un jugement d'expulsion, faute d'avoir pu faire face au paiement du loyer, "dépasse désormais la barre fatidique des 100.000".
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0 # peg 2006-08-15 12:01 Bonjour,
Il faudrait faire le point en termes d'avantages fisccaux liés au logement (Robien, … et maintenant Borloo).
Ces mesures cachent avec peine, effectivement, des cadeaux fiscaux aux "gens de biens" mais si je me souviens bien Robien-2 est bien pire: seuil des loyers plus élevés, possibilité de louer à un membre de la famille.
Est-ce un retour au Robien-1 ? Quelqu'un a-t-il les billes pour décrire les différences concrètes entre ces diverses mesures "d'aide au logement" ?
Les loyers parisiens sont très élevés maintenant à tel point que les 796 euros mensuels pour 50m2 pourrait faire figure de "bon plan" ! (mais qui peut donc en "profiter" ?): par exemple, il est facile dans le 19e de trouver des 35/40m2 a plus de 650 voir 700 euros.
Il est impossible vue la montée des prix immobiliers parisiens d'imaginer une baisse naturelle des loyers. Quelles mesures pouraient faciliter l'accès (réel) au logement a la capitale ? ou en proche banlieue ?
Peg


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0 # superuser 2006-08-17 06:42
Publiée dimanche 16 juillet au Journal officiel, après avoir été définitivement adoptée le 30 juin au Parlement, la loi portant "engagement national pour le logement" (ENL) "ne s'attaque pas aux problèmes fondamentaux que subissent les habitants en matière de logement", dénonce la Confédération nationale du logement (CNL).

"Aucune disposition n'apporte de solutions pour freiner la spéculation immobilière ou pour limiter la charge logement des habitants, via notamment la revalorisation des aides personnelles", souligne l'organisation dans un communiqué diffusé lundi 17 juillet.

Qui plus est, l'article 55 de la loi solidarité et renouvellement urbain (SRU) a été "affaibli", estime encore la CNL, qui juge que "l'Etat refuse de s'engager et d'imposer aux collectivités locales de construire des HLM, alors que le manque de logements pour les personnes modestes nécessite des mesures d'urgence".

Constatant encore que, selon elle, la loi ENL va "amplifier la dégradation des rapports locatifs", l'association appelle à la tenue d'un grand débat national sur la question, pour définir une future loi d'orientation, afin de déterminer "clairement l'engagement politique de l'Etat en matière de logement".
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