Rien de bon à attendre de ce nouveau chantier qui risque fort de ressembler à celui de la «modernisation du marché du travail» : un timing tendu pour très peu d'avancées, mais de notables reculs pour les salariés. Il en sera de même pour les assurés sociaux qu'on continuera de culpabiliser - pardon, «responsabiliser» - s'ils perdent leur emploi, tombent malades ou vieillissent, tandis que le véritable irresponsable, le capitalisme financier, continuera à privatiser ses gains et mutualiser ses pertes au détriment du travail et de ce que Christine Lagarde appelle «l'économie réelle».
Pas de nouveaux financements
On sait que Nicolas Sarkozy ne souhaite pas augmenter les prélèvements obligatoires et compte biaiser en «redéployant des excédents» (Unedic, branche famille de la Sécurité sociale…). Il n'est donc toujours visiblement pas question d'élargir à sa juste mesure l'assiette des cotisations, sauf par la prochaine mise en place d'une inique «TVA sociale» qui pénalisera les plus modestes et dont l'idée n'est absolument pas enterrée. Ainsi, une ébauche de mutualisation des profits demeure reléguée au rang d'utopie !
Surtout, l'idée de transférer une partie des excédents de l'Unedic vers les régimes de retraite nous laisse augurer le pire pour les privés d'emploi lors des prochaines négociations de «remise à plat» de l'assurance-chômage. Depuis 2005, ces excédents se sont reconstitués sur le dos des chômeurs, de moins en moins bien indemnisés en montant comme en durée, lésés de toute formation réellement qualifiante et copieusement contrôlés/sanctionnés/radiés. L'attribution des allocations familiales et du RMI risque aussi d'en prendre un coup. Quant aux dépenses d'assurance-maladie, elles seront le prétexte à de nouvelles restrictions ou ponctions, tandis que le financement des retraites s'appuiera sur l'allongement de la durée de cotisation à au moins 41 ans sans régler les problèmes de la pénibilité au travail, du chômage des seniors, et de la précarité galopante qui morcelle les parcours professionnels avec pour conséquence la réduction des droits et l'appauvrissement de millions de personnes.
Le «trou de la Sécu», un mensonge d'état
Alors qu'elle n'était qu'une, en 1967, la Sécurité sociale a été divisée en plusieurs branches par «risques» : caisse maladie (CPAM), caisse retraite (CNAV), caisse familiale (CNAF), désolidarisées les unes des autres. Leur ensemble constitue ce qu'on appelle le régime général. Dans ses résultats prévisionnels pour 2007, la Commission des comptes de la Sécurité sociale estime que son déficit devrait atteindre 12 milliards d’euros, les branches «maladie» et «vieillesse» étant les plus dégradées. Quant à l'assurance chômage, créée en 1958 soit treize ans après, c'est un «organisme paritaire» qui n'est pas n'est pas intégré dans la Sécu et dont le déficit cumulé tourne autour de 10 milliards. Alors que la Sécurité sociale est gérée par des représentants élus dont une majorité (3/4) de salariés, l'Unedic est parasitée par le Medef et remplit de moins en moins son rôle (indemnisation, formation).
Pourtant, la Sécu est largement excédentaire et pourrait absorber tous les «risques», y compris celui du chômage : si tous les mauvais payeurs qui ménagent leur trésorerie sur son dos (Etat, compagnies d'assurance, industriels, employeurs…) lui remboursaient immédiatement tout ce qu'ils lui doivent, elle serait créditrice de plusieurs milliards d'euros ! => LIRE ICI
Les caisses sont vides, nous dit-on. Le mot «solidarité» a été remplacé par «privilège» ou «assistanat», y compris dans la bouche de soi-disant personnalités de gauche. Ne nous leurrons pas : cette réforme hypocrite, vantée comme une initiative sans précédent, vise à laminer davantage notre système de protection sociale par répartition basé sur le partage des richesses, une manne financière gigantesque de plusieurs centaines de milliards d'euros par an dont, depuis sa création après-guerre, les marchés boursiers rêvent de s'accaparer. Ici, une fois de plus, le rôle des syndicats se bornera à cautionner une inéluctable régression.
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Après l'agenda sur les réformes du droit du travail le 19 décembre, les partenaires sociaux sont de nouveau conviés à l'Elysée pour évoquer les chantiers de 2008 en matière de protection sociale. Mais, contrairement à la précédente réunion, il ne s'agira pas d'un agenda fixé de concert, visant à déterminer les sujets qui relèvent de l'Etat et ceux sur lesquels les syndicats de salariés et les organisations patronales souhaiteraient négocier au préalable. Car, hormis les retraites complémentaires (Arrco, Agirc), pilotées de manière paritaire, l'Etat est aujourd'hui omniprésent dans la gestion de la Sécurité sociale, dont il fixe les règles et les objectifs chaque année en loi de financement.
De nouveaux acteurs
«L'idée est d'informer les partenaires sociaux de nos intentions sur les réformes à venir et de prendre leur avis, mais pas de les associer directement», souligne un conseiller gouvernemental. L'exécutif agira par exemple comme il l'entend sur la deuxième étape de la réforme des retraites sans essayer d'obtenir, comme en 2003, l'aval de certains syndicats.
De fait, le rôle de gestionnaire des partenaires sociaux s'amenuise régulièrement au profit de l'Etat, mais aussi d'autres acteurs tels que les départements en matière de prise en charge de la dépendance. La réforme de l'assurance-maladie de 2004 a consacré ce retrait, le conseil de la CNAM supervisant plus qu'il ne guide la politique du directeur général, nommé en Conseil des ministres. La création des agences régionales de santé (ARS) va encore renforcer le poids de l'Etat. Si la Caisse nationale des allocations familiales n'a pas connu la réforme de gouvernance de l'assurance-maladie, elle reste pénalisée par l'absence du Medef et de la CGPME, qui, après l'avoir envisagé, ne sont pas revenus siéger au conseil d'administration depuis leur départ, en 2001. Pas plus qu'ils n'ont réintégré l'assurance-vieillesse. «Le Medef n'a jamais clarifié sa position en matière de gouvernance de la Sécurité sociale», regrette un responsable syndical. La priorité du patronat semble d'obtenir la baisse des cotisations, quitte à ce que la fiscalisation croissante de la protection sociale affaiblisse sa légitimé à la gérer.
Des informations privilégiées
Paradoxalement, l'exécutif ne souhaite pas aller trop loin dans l'étatisation. «Les partenaires sociaux sont nos seuls interlocuteurs incontournables sur l'ensemble des sujets de protection sociale», souligne un conseiller. Le fait de siéger dans les caisses nationales n'est pas seulement symbolique. Cela leur donne accès à des informations privilégiées, et notamment aux projets de lois ou de décrets qui leur sont soumis pour avis. «Il n'y a pas d'étatisation. Les partenaires sociaux n'ont jamais été aussi importants, moins dans la gestion directe que pour faire entendre la voix de tous les exclus des politiques sociales», affirme Gaby Bonnand, secrétaire national de la CFDT pour qui «il est logique que la puissance publique prenne des décisions relevant de plus en plus de la solidarité nationale, mais elle ne peut pas le faire seule».
(Source : Les Echos) Répondre | Répondre avec citation |
Le chef de l'État avait réuni à l'Élysée les partenaires sociaux, le Premier ministre François Fillon et les ministres concernés pour examiner l'agenda social de 2008. "Que les choses soient claires : l'année 2008 doit être l'année de réponse structurelle sur la question de la grande dépendance, sur la question des retraites, sur la question de l'assurance maladie et de la réforme de l'hôpital", a-t-il dit à la presse à l'issue de la réunion. Il souhaite notamment qu'un projet de loi de réforme des retraites soit déposé au Parlement d'ici la fin du premier semestre, et qu'un texte sur la modernisation de la santé soit prêt d'ici l'été.
"Le calendrier sur la réforme de notre régime de santé d'ici l'été est impossible", s'est plaint le secrétaire général de la CFDT François Chérèque après la réunion. "J'ai fait part au président de la République de l'inquiétude des salariés sur le nombre de réformes qui sont engagées."
Pour son homologue de Force Ouvrière, "ce calendrier est trop court, il y a un risque de thrombose sociale". Nicolas Sarkozy parle "d'anxiété" mais "ce n'est pas de l'anxiété", a poursuivi Jean-Claude Mailly, pour qui "les gens sont paumés" face à "la multiplication des chantiers" et à la volonté du chef de l'État "de tout faire en quelques mois". "À un moment donné, il faut savoir aussi utiliser le frein et non pas toujours l'accélérateur", a-t-il ajouté.
Demande de cohérence
Pour le secrétaire général de la CGT Bernard Thibault, "à chaque fois que des gouvernements ont traité de ces questions en ne donnant pas les espaces de discussions et de négociations appropriés, ça c'est traduit par des mécontentements , des mobilisations, des critiques très importantes". Il a invité les salariés à manifester début mars ou début avril contre l'allongement à 41 ans de la durée de cotisation pour une retraite à taux plein, envisagé par le gouvernement. Il a souhaité que les autres syndicats se joignent à son appel.
"On ne voit pas comment on peut décemment traiter sérieusement ces questions dans une vraie concertation dans les délais qui nous sont donnés", a pour sa part déclaré le président de la CFTC Jacques Voisin.
"Nous sommes face à des mesures annoncées jour après jour (…) qui ne sont pas forcément logiques et cohérentes entre elles", a pour sa part déploré Bernard Van Craeynest, président de la CFE-CGC. "Donc nous attendons de la part de l'État (…) de la logique, de la cohérence et de la continuité."
À l'issue de la réunion, Nicolas Sarkozy a déclaré à la presse qu'il était prêt à repousser légèrement l'échéance sur la réforme de la santé. "S'il faut donner quelques semaines de plus, voire quelques mois de plus, c'est-à-dire qu'au lieu de terminer au mois de juin, si sur certains sujets, je pense notamment à l'organisation de la santé en France, il faut repousser jusqu'en septembre, ce n'est pas un problème", a-t-il dit. "Je n'ai pas été élu pour différer les solutions mais pour apporter des remèdes aux problèmes de la France", a cependant ajouté le chef de l'État. "Ce qui est anxiogène, ce n'est pas qu'un gouvernement prenne des décisions, c'est plutôt qu'un gouvernement refuse de les prendre." Répondre | Répondre avec citation |
S'ils n'ont guère été surpris par l'agenda de réformes précisé hier, les syndicats ne l'en ont pas moins jugé surchargé. (…)
Au-delà du calendrier, les partenaires sociaux ont tous pointé le flou sur la question du financement, à commencer par celui du minimum vieillesse. «Nous prenons acte de la hausse, mais il faudra très vite trouver les financements correspondants. Aujourd'hui, on ne s'attaque pas aux déficits», a regretté Jean-René Buisson (Medef). «Tout le monde est d'accord pour une revalorisation du minimum vieillesse, mais les politiques décident des cadeaux et on demande aux partenaires sociaux de trouver les financements !», a renchéri François Chérèque. Les syndicats regrettent surtout que le financement de la protection sociale ne constitue pas un chantier en tant que tel.
«Il n'y a pas de chantier transversal sur l'assiette des cotisations. Il n'y a rien sur la table», a insisté le conseiller social de Nicolas Sarkozy Raymond Soubie, au grand dam du patronat qui a de nouveau réclamé un financement assis davantage sur l'impôt et moins sur les cotisations.
(Source : Les Echos) Répondre | Répondre avec citation |
En France métropolitaine, les allocations familiales sont versées dès le deuxième enfant sans condition de ressources. Elle sont versées aux familles jusqu'à ce que les enfants aient 20 ans, et sont majorées à 11 et 16 ans.
Le gouvernement s'apprête à supprimer ces deux majorations au profit d'une seule versée à 14 ans, et a soumis un décret en ce sens au conseil d'administration de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) qui a voté contre mardi, un avis purement consultatif. La CNAF estime que cette mesure va conduire à une économie de 138 millions d'euros par an "au détriment des familles" dont les allocations en moyenne passeront de 4.918 € entre les âges de 11 et 20 ans à 4.331 € entre 14 et 20 ans.
"Le ministère s'appuie sur une étude de l'INSEE qui indique que c'est à 14 ans et non à 11 ans que le coût d'un enfant progresse", déclare la CGC dans un communiqué diffusé mercredi. Pour l'organisation syndicale, cette mesure "induit en réalité un recul des prestations familiales, déjà insuffisantes pour les familles". La CGC en "déplore l'impact (…) puisque, sous une apparente simplification, la nouvelle prestation versée aux familles sera considérablemen t réduite".
La CGC calcule, elle, que les familles toucheront 4.333,52 € contre 5.640 €, soit 1.307 € de moins, et dénonce une décision qui "porte atteinte une nouvelle fois au pouvoir d'achat des familles".
(Source : Le Nouvel Obs) Répondre | Répondre avec citation |