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Accueil Social, économie et politique Sarko, la Shoah et les boucs émissaires

Sarko, la Shoah et les boucs émissaires

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A partir de la rentrée 2008, tous les enfants de CM2 se verront «confier la mémoire» d’un des 11.000 enfants français victimes de la Shoah, a annoncé Nicolas Sarkozy mercredi soir lors du dîner du Conseil représentatif des institutions juives de France. Un nouveau fumigène présidentiel ?

On le sait, la psychologie (nous dirons même la finesse intellectuelle) n'est pas le fort de Super-Sarko. D'un point de vue éducatif, cette décision laisse sceptique : en effet, comment des enfants de 9 ou 10 ans peuvent-ils intellectuellement appréhender la dimension d'un tel drame et, plus simplement, l'idée de la mort ? C'est plutôt à l'adolescence que le jugement se forge, qu'il devient alors possible d'analyser la Shoah dans toute son abomination et d'influer sur la mémoire collective en allant, au delà des événements, sur le terrain de la réflexion autour de la guerre en général, et le comportement humain en particulier. Car si de telles horreurs ont été commises - en Europe, mais aussi en Algérie, au Rwanda ou ailleurs… -, au delà de la responsabilité collective, c'est bien qu'il a fallu que des individus y participent, activement ou passivement.

Banalisation du mal et responsabilité individuelle

On conseillera donc à Nicolas Sarkozy de lire «La soumission à l'autorité» de Stanley Milgram. Peut-être aura-t-il envie que les élèves de seconde l'étudient. Car c'est le fondement même de ce que la philosophe Hannah Arendt appelait la banalisation du mal dans son livre «Eichmann à Jérusalem». Comment, déresponsabilisées par la présence d'une autorité quelconque (ici, un animateur en blouse blanche), des personnes sont-elles capables d'infliger sciemment des décharges électriques, dangereuses sinon mortelles, à d'autres êtres humains en guise de sanction ? Seulement 13% des participants ont arrêté l’expérience… à partir de 300 volts. Aucun, en son âme et conscience, n'a désobéi. 65% ont été jusqu'au maximum (450 volts), dont 2,5% sans hésitation aucune ! Là est la bête immonde qui sommeille en chacun de nous. En prendre conscience est absolument nécessaire, par exemple au collège. En mesurer la dimension doit ensuite s'effectuer à n'importe quel stade de l'âge adulte, notamment au travail.

La haine de l'autre, un levier indispensable

Pas de Shoah sans ses boucs émissaires, qu'ils soient juifs, handicapés, homosexuels ou communistes (… comme Guy Môquet !), accusés de tous les maux. Partout en Europe, le Juif était alors le bouc émissaire numéro un. Mais les boucs émissaires ont toujours servi de prétexte dans les conflits, qu'ils soient religieux ou politiques : leur seule existence justifie les actes tout en escamotant les véritables motifs.

Le bouc émissaire est un écran de fumée et sur ce point, Nicolas Sarkozy sait y faire. Nicolas Sarkozy, qui n'est décidément pas fortiche en ce qui concerne le devoir de mémoire qu'il préconise pour les autres : atteint d'Alzheimer, il a déjà oublié qu'il a abondamment agité ses propres boucs émissaires pour se faire élire par un bon peuple dressé - entre autres - contre les chômeurs profiteurs, les immigrés clandestins, les racailles de banlieue, etc. Même Simone Veil, rescapée d'Auschwitz, a collaboré avec lui en fustigeant les RMIstes et autres «assistés» devant des milliers d'UMPistes exaltés, le 29 avril 2007 à Bercy... Alors, que dire du contrôleur social qui, en guise de sanction, ose amputer de 20% pendant deux mois la misérable allocation d'un privé d'emploi à l'ASS sans s'émouvoir des conséquences de son «obéissance aux ordres» sur les conditions de vie de l'être humain démuni qu'il a en face de lui ?

Le bon Dieu a bon dos

Féru d'émotions à faire partager au bon peuple au lieu d'analyses profondes et pertinentes, on sait que Nicolas Sarkozy se veut défenseur des victimes mais, attention, pas n'importe lesquelles… juste celles qu'il peut instrumentaliser. Car les victimes du libéralisme économique dont il est le chantre, s'il ne les utilise pas dans un but démagogique comme les futurs chômeurs d'ArcelorMittal à Gandrange, n'ont droit qu'à son mépris et à son arsenal répressif.

Nicolas Sarkozy, qui loue Dieu et invoque sa «redoutable absence» lors du «drame du XXe siècle», occulte le fait que n'est pas l'absence de Dieu qui a permis au fascisme d'envahir l'Europe, bien au contraire : en Italie ou en Espagne, l'Eglise était plus que présente aux côtés de Franco et de Mussolini. Comme toujours, elle s'est mise du côté des oppresseurs et a fermé les yeux sur leurs agissements. Ce catholique revendiqué est un homme redoutable qui brouille les cartes, use de simplismes et de formules marketing pour nous éloigner des réalités. Il ne vaut pas mieux que ceux qui vont à la messe le dimanche et dénigrent les pauvres le reste de la semaine.

=> FINALEMENT, la lubie présidentielle n'aura vécu que 15 jours, le temps de faire parler : jeudi 28 février, la mission ministérielle qui planchait sur ce projet l'a jugé «inapplicable» et donc retoqué. LIRE ICI…

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Mis à jour ( Vendredi, 15 Février 2008 15:43 )  

Commentaires 

 
0 # superuser 2008-02-15 15:10 Ce qui fait tout le succès des systèmes totalitaires, c’est qu’il y toujours bien plus de gens convaincus de la nécessité de coopérer activement avec le tyran pour optimiser leurs chances de sauver leurs fesses que de résistants qui luttent contre l’inadmissible ou l’indicible.

On a eu beau glorifier la Résistance dans un méritoire effort de réconciliation nationale, la réalité historique nous enseigne que, quand la botte du tyran vient éclater les arpions du bon peuple, il devient très urgent de ne rien faire (au mieux) ou de collaborer presto. Lutter, résister, c’est un peu l’exception et les Révolutions sont toujours l’oeuvre d’une poignée de bougons légèrement plus tenaces et teigneux que les autres. La majorité préfère cultiver son jardin, faire le dos rond en attendant que l’orage passe au-dessus de sa petite tête et surtout, ne se pose pas de questions gênantes.

La constance de l’inutilité de ce genre d’attitude n’y change rien.

Je me souviens encore des cadres winwin des années 80, bouffés par l’idée de la frime et du fric à gogo, qui faisaient preuve de tant de pédagogie pour expliquer aux ch’tites n’ouvriers renfrognés que leur licenciement participait directement à la marche glorieuse du progrès et à la bonne santé de l’entreprise et qu’il fallait être de sacrés égoîstes sans cœur pour faire la gueule pour si peu.
Je me souviens des DRH pontifiants qui expliquaient avec des trémolos dans la voix la cruelle nécessité des restructuration s d’effectifs à ceux qui avaient donné le meilleur d’eux-mêmes pour la prospérité de tous, pensaient-ils, les naïfs, mais en fait de certains seulement, certains dont ils ne faisaient naturellement pas partie.
Je me souviens des donneurs de leçons de tous poils qui ont fustigé la masse ignare du peuple boudeur, celui-là même qui refuse les bienfaits de la globalisation de la concurrence entre les hommes et les femmes de l’ensemble de la planète, mise en concurrence saine mais dont les prescripteurs, curieusement, prennent toujours grand soin de se mettre à l’abri.
Je me souviens aussi du regard froid de certains agents de l’ANPE, lorsqu’ils annoncent que décidément, nous ne faisons vraiment pas assez d’efforts pour trouver un boulot qui n’existe pas, et que si l’on est toujours au chômage, c’est forcément un peu de notre faute, qu’il faut être borné pour s’accrocher à des choses aussi futiles que l’expérience professionnelle ou des brassées de diplômes pour refuser stupidement l’un de ces merveilleux métiers en tension qui nous tendent leurs petits musclés de poor job.
Je me souviens enfin, et c’est encore frais et vif dans ma mémoire, de la désinvolture avec laquelle les zélés salariés des ASSEDIC peuvent vous annoncer que, pour cause d’obscures manipulations informatiques de listes étranges et ésotériques, vous vous retrouvez subitement et sans autre forme de procès, privés de vos maigres subsides de salarié involontairemen t privé d’emploi.

Parce que finalement, on a bien l’impression qu’il y a une joie un peu malsaine à infliger aux autres ce que pour rien au monde vous ne voudriez pour vous, et ce, d’autant plus que vous croyez mordicus que votre collaboration vous élève au-dessus de la masse de ceux qui subissent et vous met définitivement à l’abri de ce genre de petits malheurs ingrats.

Seulement, le hic, c’est que personne n’est jamais à l’abri de rien, et que de participer activement à l’entreprise de démolition des autres est loin d’être une garantie de passer au travers. Mais voilà, les zélés soutiens à la marche triomphante du progrès qui s’essuie les pompes sur la face des autres, ou les obscurs petits fonctionnaires obéissants de la machine à broyer les hommes finissent toujours par se faire rattrapper par la bête immonde qu’ils croyaient appâter par leur soumission. Au mieux, il hériteront d’une bonne coupe de cheveux qui dégage les oreilles à la Libération.

C’est ainsi qu’un beau jour, les cadres de HP qui n’avaient pas eu d’états d’âmes à délocaliser le job des autres sous des cieux plus favorables à l’exploitation de l’homme par l’homme, se trouvèrent fort dépourvus lorsque la bise leur tomba sur le paletot et s’empressèrent de retrouver les chemins tortueux de la contestation du système qu’ils servirent pourtant si promptement peu de temps auparavant.
C’est ainsi que nombre de DRH, faute d’effectifs encore à réduire, goûtent à leur tour aux joies du pointage mensuel.
C’est ainsi que les intellectuels, journalistes, politiques et autres prescripteurs de lavements sociaux se sentent parfois bien seuls avec un peuple devenu sourd à leurs admonestations.

C’est ainsi que des salariés de l’ANPE sont entrés en résistance, certes pour défendre les droits des chômeurs, durement rognés ces dernières années, mais aussi et surtout parce que l’entrée en action du plan de contrôle mensuel des chômeurs leur a rendu la tâche totalement impossible, faute de moyens et d’effectifs.
Et c’est ainsi, enfin, que les salariés des ASSEDIC qui sont entrés en grève à leur tour, non pas pour protester contre la cruelle chasse aux chômeurs mise en place depuis le début de l’année et qu’ils ont contribué à rendre encore plus dure et inhumaine, mais parce que maintenant, ce sont leurs propres postes qui sont menacés.

Voilà qui prouve une fois de plus qu’il est difficile de tirer des leçons de notre histoire, proche ou lointaine, et que ce sont toujours les mêmes erreurs qui se répètent. Il a fallu aux Argentins que 80% d’entre eux sombrent dans la pauvreté pour qu’ils comprennent enfin la nature du système qu’ils subissaient et qu’ils unissent leurs forces contre lui. Et nous ? Que nous faudra-t-il encore pour comprendre que face à la logique qui écrase les hommes et les abandonne ensuite au bord du chemin, LE REFUS EST LA SEULE ATTITUDE POSSIBLE ?

par Monolecte pour Le Monde Citoyen
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0 # tristesir 2008-02-15 15:42 Même dans sa façon de prêcher pour <> la pensée néo-libérale transpire des propos de Nicolas Sarkozy: individualiser cette souvenance et laisser l'individu se débrouiller seul avec toute cette horreur

Pourquoi demander à des enfants de 10 ans de se mettre en pensée à la place d'un pauvre enfant assassiné par les nazis avec la complicité de français?

Comment un enfant peut il faire la part des choses entre devoir de mémoire et la repentance qui peut conduire parfois à développer une forme de culpabilité chez les plus sensibles?

Est ce que l'école a pour vocation de faire de l'émotionnel plutot que de transmettre des savoirs et de la connaissance?

Nicolas Sarkozy est de retour dans les médias. Toujours la même technique: il jette une énormité en pâture aux médias et de cette façon d'autres évènements en cours sont occultés: rénumération des grands patrons, adoption du traité constitutionnel sans consultation directe du peuple…
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0 # Pili 2008-02-15 16:14 Certes, cet extrait qui résume le bouquin de Zizek, la Subjectivité à venir, est un peu intello, mais c'est tout à fait cela…Sarko et son symptôme qu'il impose à nous tous est le reflet de la sociéte post-moderne du neocapitalisme.
—————————————————
Slavoj ZIZEK
2006 - FLAMMARION Champs

Slavoj ZIZEK (d’origine slovène, philosophe marxiste lacanien), dans cet essai écrit entre 1998 et 2004, présente une critique politique, philosophique et psychanalytique sur l’idéologie de la culture de masse contemporaine. En partant de l’art, il interroge la place du sujet contemporain dans son rapport à la réalité du monde ultra libéral à travers l’imaginaire, le symbolique et le réel. Pour cela, il s’appuie essentiellement de l’apport de Marx et de Lacan pour comprendre ce qui se joue idéologiquement . Pour se sortir de cette idéologie dominante et aliénante, le sujet actuel est à réinventer. Le combat du sujet pour gagner se situe non pas au niveau de l’économie mais au niveau de l’idéologie.

Dans sa première partie, Zizek articule la place du sujet dans la société post-moderne, capitaliste avec les effets qu’a produit l’événement historique le plus marquant, l’Holocauste.
Il s’éloigne de la critique moderne deleuzienne de la disparition du sujet.
Le sujet post-moderne de l’idéologie capitaliste est un sujet interpassif. Il appelle à un sujet à conquérir pour advenir.

Le point de départ de ce sujet interpassif est celui de l’impact de l’Holocauste qui produit encore un double traumatisme. L’impossibilité d’en faire un récit en l’intégrant dans le symbolique fait que les sujets aujourd’hui ne peuvent pas le dépasser et en restent aliènés, car ils en sont encore impliqués et partis prenante dans le processus qui a engendré l’Holocauste. Ce processus se reflète alors dans notre réalité (quotidienne, sociale, politique etc…). L’absence de symbolisation entraîne la transcendance radical du Réel (comme irreprésentable , hors d’atteinte de nos représentation) . Ce Réel abolit le sujet. Il n’y a pas de distance entre le Réel, traumatisant et irreprésentable et le contenu représenté par le sujet. Par conséquent, le sujet ne peut pas advenir et se représenter sans cet impact traumatisant du fait historique. Le sujet tente de se défendre donc de ce double caractère traumatisant dans la réalité qu’il construit.

Les impacts sur le sujet de ce Réel irreprésentable dans le symbolique s’articulent dans la société du cyberespace et les médias modernes. Le sujet bien qu’en inter-relation avec son semblable est toutefois pris dans une interactivité où il se prive de ce qui est le plus intime, son vécu. Zizek défend l’idée que le sujet doit se réapproprier sa passivité, le noyau même de son identité. La machine ou l’autre qui interagissent de l’autre coté de l’écran se substituent au sujet. La machine ou l’autre agissent à sa place. Le sujet devient alors dépendant de sa prothèse digital et incapable d’agir directement. Cette interactivité implique donc l’interpassivit é. Le plus inquiétant pour Zizek est que «le sujet est peu à peu dépossédé, privé de ses facultés les plus intimes de sa part la plus passive de son vécu». Pour exposer cet aspect de sa pensée, Zizek analyse comment le sujet interpassif bafoue les 3 structures du sujet même. Il s’appuie sur le «fétichisme de la marchandise» de Karl Marx et la notion du Grand Autre de Jacques Lacan.

Dans le fétichisme de la marchandise, il y a un déplacement et une substitution des rapports sociaux , «ce sont les choses qui croient à notre place», le sujet est un «sujet supposé croire» en l’autre ou en la marchandise. Cette croyance incarnée dans les choses pour qu’elle fonctionne nécessite un garant ultime, différé, déplacé, jamais présent en personne (Dieu, Le Capitalisme, le Communisme, L’Autre pour Lacan). «Le sujet supposé croire» est la structure classique de l’ordre symbolique. Mais dans cette société du sujet interpassif, l’ordre symbolique est déplacé dans le PC, l’écran, l’objet. Désormais, ces objets incarnés deviennent les «sujets supposés croire» entre eux, le sujet y est absent.
La deuxième structure du sujet est le «sujet supposé savoir». Zizek reprend de Lacan la notion de «sujet supposé savoir». Il prend l’exemple de la série télévisée "Colombo", le policier sait dès le début qui est le coupable. Il y a un savoir insu et ce qui reste à faire est de le rendre conscient en accumulant la preuve. Le «sujet supposé croire» et le «sujet supposé savoir» sont asymétriques, la croyance est réflexive : «Je peux croire à travers l’autre mais je ne peux pas savoir à travers l’autre. Ce qui implique que celui qui croit à ma place signifie que je crois à travers lui, alors que le savoir n’est pas réflexif, car celui qui est supposé savoir n’induit pas que j’en sais plus». Ce «sujet supposé savoir» se réapproprie son propre savoir, partie intime de son être, et sa subjectivité. Ce n’est pas le cas du sujet interpassif, car c’est l’autre ou le PC qui savent.
Le plus étrange pour Zizek est cet autre «sujet supposé jouir» qui aujourd’hui est tributaire en permanence à une injonction surmoïque et idéologique, en dehors de l’ordre symbolique, «Jouis» sinon tu es coupable. Et donc ce nouveau sujet moderne interpassif pour se libérer de cet impératif de jouir se décharge sur l’autre ou sur les objets à qui il demande de jouir à sa place. «C’est l’autre qui jouit à ma place et je jouis alors à travers l’autre et cela me libère de cette injonction».

Ce sujet interpassif contemporain produit ses effets et se soumet à la violence de son fantasme primordial de façon très sadomasochiste. Il y a passage de la violence oppressive à la violence rédemptrice. Zizek prend la scène d’autotabassage du film "Fight Club" de David Fincher, 1999. L’héro s’inflige une autopunition devant son patron afin d’abolir la relation du «maitre» qui est ainsi privé de son pouvoir sadique sur le masochisme de l’esclave. C’est à partir de cette mise en jeu que le sujet de l’idéologie capitaliste peut retourner sa violence contre le système et le combattre. Zizek fait le parallèle avec ce qui se passe dans certaines manifestations politiques, le moyen, écrit-il, le plus efficace pour produire un renversement lorsque les forces de l’ordre sont sur le point de charger la foule, c’est de commencer à se frapper entre manifestants. Il reconnaît que cette façon de prendre de la distance avec le réel est risquée, car elle peut régresser vers une logique machiste proto-fasciste. A travers ces exemples de notre société, Zizek en vient donc à conclure que le passage de «la subjectivité capitaliste à la subjectivité révolutionnaire » pourrait se faire par la pratique du corps de «nature apparemment masochiste».
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0 # dixdobby 2008-02-15 18:00 Shoah: l'idée de Sarkozy est "insoutenable" pour Veil
Par Pierre Haski (Rue89) 17H12 15/02/2008

Déportée à 16 ans, cette proche du Président a des mots très durs contre "l'adoption" de jeunes victimes par des écoliers.

De toutes les réactions hostiles, négatives ou simplement réticentes à la proposition de Nicolas Sarkozy concernant les enfants et la Shoah, il en est une, remarquable par sa violence, qui sort du rang: celle de Simone Veil, ancienne déportée à l'âge de 16 ans, proche du Président et qui était assise à sa droite au dîner du Crif mardi soir.

Elle a jugé que la proposition de Nicolas Sarkozy était "inimaginable, dramatique, injuste".

Sur L'Express.fr, l'ancienne ministre, dont le ralliement à Nicolas Sarkozy avait été un des temps forts de la campagne présidentielle, raconte que son sang "s'est glacé" en entendant le Président de la République proposer que chaque élève de CM2 en France adopte un enfant victime de la Shoah.

"C’est inimaginable, insoutenable, dramatique et, surtout, injuste. On ne peut pas infliger cela à des petits de 10 ans! On ne peut pas demander à un enfant de s’identifier à un enfant mort. Cette mémoire est beaucoup trop lourde à porter. Nous mêmes, anciens déportés, avons eu beaucoup de difficultés, après la guerre, à parler de ce que nous avions vécu, même avec nos proches. Et, aujourd’hui encore, nous essayons d’épargner nos enfants et nos petits-enfants. Par ailleurs, beaucoup d’enseignants parlent -très bien- de ces sujets à l’école."

L'ancienne ministre redoute également que cette idée puisse attiser les antagonismes religieux en France:

"Comment réagira une famille très catholique ou musulmane quand on demandera à leur fils ou à leur fille d’incarner le souvenir d’un petit juif?"

Cette réaction remarquable s'ajoute au concert de protestations qui a accompagné dans tous les milieux cette proposition surprise de Nicolas Sarkozy. Seules quelques voix se sont exprimées en faveur de la proposition présidentielle, parmi lesquelles celle de François Hollande, le premier secrétaire du PS, et celle de Marek Halter, qui l'a qualifiée d'"initiative formidable".

La sortie de Simone Veil permet, surtout, de s'interroger, une nouvelle fois, sur la manière de procéder du chef de l'Etat: comment a-t-il pu lancer une telle idée sans consulter cette femme dont l'histoire personnelle et le positionnement politique en font l'interlocuteur idéal avant de lâcher en pâture à l'opinion une bombe pareille? Sauf à considérer que les idées de ses conseillers de l'Elysée sont au-dessus de toute contestation.

Quoi qu'il en soit, le jugement sans appel de Simone Veil risque fort de peser suffisamment lourd pour condamner cette initiative présidentielle à finir dans la poubelle, déjà passablement remplie, des fausses bonnes idées de Nicolas Sarkozy.
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0 # superuser 2008-02-15 17:39 Un désaveu de poids. Simone Veil, présidente d'honneur de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, s'est prononcé farouchement contre la proposition de Nicolas Sarkozy concernant l'enseignement du génocide juif au CM2. «A la seconde, mon sang s’est glacé», a-t-elle expliqué à L'Express.

«C’est inimaginable, insoutenable, dramatique et, surtout, injuste. On ne peut pas infliger cela à des petits de dix ans ! On ne peut pas demander à un enfant de s’identifier à un enfant mort. Cette mémoire est beaucoup trop lourde à porter. Nous mêmes, anciens déportés, avons eu beaucoup de difficultés, après la guerre, à parler de ce que nous avions vécu, même avec nos proches. Et, aujourd’hui encore, nous essayons d’épargner nos enfants et nos petits-enfants. Par ailleurs, beaucoup d’enseignants parlent -très bien- de ces sujets à l’école», estime-t-elle.

Aux yeux de l'ancienne ministre, la suggestion du Président de la République risque d’attiser les antagonismes religieux. «Comment réagira une famille très catholique ou musulmane quand on demandera à leur fils ou à leur fille d’incarner le souvenir d’un petit juif ?» s’interroge-t-elle.

Par ailleurs, l'Union des étudiants juifs de France (UEJF) dit accueillir «de manière réservée» la proposition de Nicolas Sarkozy et «craint que cette initiative ne soit contre-productive». «Ce n'est pas en s'identifiant à la victime qu'on fera reculer le racisme et l'antisémitisme d'aujourd'hui et de demain. On ne peut pas prescrire la mémoire pour prévenir l'oubli», estime Raphaël Haddad, président de l'UEJF.

(Source : 20 Minutes)
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0 # Yves 2008-02-15 20:08 Plus terre-à-terre, un extrait du commentaire de J-L C, mis en ligne sur renovation-democratique.org

Shoah : Enfants et parents pris en otages

Nicolas Sarkozy veut confier à chaque enfant la mémoire d'un enfant juif victime de la Shoah. Cette annonce suscite de légitimes interrogations chez les enseignants et les intellectuels. Mais une fois de plus, les premiers concernés, les parents et leurs enfants, sont les grands absents du débat !

(…) Mais qu’en pensent les principaux intéressés ? Les fédérations de parents d’élèves ont-elles au moins été consultées avant cette annonce (1) ?

Pour la bonne cause nous assure-t-on, veut-t-on «associer» sans l’accord de leurs parents, les enfants à la mémoire de la Shoah. Comme l’écrit L’Est républicain de ce jour, cette décision unilatérale est «un diktat que rien ne vient expliquer» ; ainsi risque-t-elle d’avoir l’effet inverse de celui recherché.

J-L C

(1) Invité du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) hier soir, Nicolas Sarkozy a souhaité que dès la rentrée 2008, chaque élève de CM2 se voit «confier la mémoire d'un des 11 000 enfants français victimes de la Shoah».
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0 # shugyo21 2008-02-16 22:14 La question qui se pose, au fond, est bien plus simple et plus dramatique : quel est le brain-trust qui organise cette agitation permanente ? Et au-delà du fait qu'elle masque les sujets de fond qui fâchent, ne faut-il pas y voir une incompétence à gouverner selon les règles de la Vème République ?

Le débat est ouvert…
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0 # superuser 2008-02-22 05:49 Selon un sondage IFOP pour le Journal du Dimanche, une écrasante majorité de Français désapprouve la proposition (ou plutôt la dernière lubie) de Nicolas Sarkozy de faire porter aux écoliers la mémoire d'enfants victimes de la Shoah.

Dans ce sondage mis en ligne sur le site du JDD jeudi 21 février, 85% des personnes interrogées déclarent ainsi leur hostilité à la proposition de perpétuer au cours de l'année scolaire la mémoire d'un des 11.500 enfants juifs tués, tandis que 61% des personnes interrogées sont contre l'éventuel aménagement de faire porter la mémoire d'un enfant tué par une classe entière.

Et pan sur le bec !
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0 # Pili 2008-02-23 15:30 La lettre d’une mère de famille et parente d’élève à Paris

Voila que, non satisfait de la glissade morale effectuée sur la peau de banane Guy Moquet qu’il s’était à lui-même étendue comme carpette, M. Sarkozy prétend « faire en sorte que, chaque année, à partir de la rentrée scolaire 2008, tous les enfants de CM2 se voient confier la mémoire d’un des 11 000 enfants français victimes de la Shoah ».

Ma fille sera en CM2 en 2013. Elle porte en elle de par la grâce de ses parents la mémoire de ces milliers d’enfants, français et non français, qui au long de l’histoire humaine furent déportés, séparés des leurs, rendus orphelins, esclaves, choses sexuelles, assassinés…sur les 5 continents.
> Et qui le sont encore.

Elle porte en elle la mémoire future de ces enfants violemment séparés de leurs parents ou familles, ici, maintenant, en France devant ses yeux de fillette de 4 ans. Elle porte en elle en tant que future femme, citoyenne, lionne au combat, la mémoire de tous ces enfants qu’elle aura vus déportés de son supposé pays de cocagne vers des univers où ils disparaissent, de tous ces enfants qui n’ont pas d’enfance, en Palestine, au Liban,… de tous ces enfants marchandés cyniquement, au nom de l’enfance, au Tchad, ailleurs…

Ma fille porte en elle tout ceci parce qu’elle est vivante. Parce qu’elle a un papa et une maman vivants auprès d’elle. Qui animent son âme autant qu’ils le peuvent de toute l’actualité de leurs combats, à sa mesure de petite fille, en lui apprenant qu’il n’y a pas de différence, entre un enfant blanc et un noir, entre un enfant juif, catholique, sikh, musulman, bouddhiste, que tout enfant a droit au bonheur d’être enfant, dans la douceur de sa famille, les câlins, le jeu, les apprentissages.
> Ma fille porte en elle tout cela, et elle ne se verra pas confiée par l’école la mémoire de l’un des 11 000 enfants français victimes de la Shoah. Ce travail, qui m’est dévolu en tant que parent, et qu’il n’appartient pas à mon sens au Président de la République de choisir de faire à ma place, je l’élabore dans le respect de mon enfant, et de ce qu’est notre famille.

Il n’y a pas que la Shoah, Mr. le Président. Maints massacres furent perpétrés, maintes mémoires furent et sont encore blessées qu’il vous semble vain d’honorer, maints enfants furent déportés et assassinés, dont vous semblez faire si peu de cas, en d’autres temps tout aussi atroces que celui de la Shoah.
Quel est ce besoin que vous nous démontrez donc là, un besoin de repentance ? Ce mot que vous refusez à tout crin à ceux qui ne vous le demandent même pas, mais qui voudraient juste prononcer le mot de mémoire sans se faire éconduire ? Qu’allez-vous donc faire dans cette galère ? Quel besoin de s’aplatir dans le vent d’une seule direction, sous les tapis du souvenir d’une seule victime ? Vous nous avez suffisamment dit lorsque cela vous arrangeait que les enfants n’étaient pas comptables des fautes de leurs pères.

Ma fille ne se verra confier par vous la mémoire d’aucun enfant d’une seule confession, d’une seule déportation, d’un seul esclavage, d’un seul massacre.
> Ma fille ne sera jamais l’objet de votre manipulation de l’histoire, de l’émotion, du drame humain au service de vos seuls biens et besoins personnels, politiques ou autres.
> Elle ne croulera pas sous le poids de votre culpabilité ou de vos obédiences.
> Elle grandit libre dans sa connaissance de l’autre, des ses bonheurs et malheurs, grands et petits, auxquels nous désirons l’éveiller pour qu’elle puisse partager le poids, plus tard, avec ceux qui souffrent.
Mon enfant, nos enfants, grandissent à présent dans une France dont mes parents, humains généreux s’il en fut, auraient profondément honte.
> Si ma mère n’était pas morte, elle défilerait aujourd’hui du haut de ses 89 ans, pour vous faire savoir qu’il suffit.
> Qu’il suffit de l’outrager.
> Qu’il suffit de choisir dans les souffrances humaines celles qu’il vous agrée d’honorer et celles qu’il vous indiffère d’ignorer.
> Quand ce n’est pas celles qu’il vous arrange de rejeter dans de lointaines poubelles.
> Qu’il suffit de gesticuler, justifiant toutes les exactions de la France dans l’Ailleurs en ne supportant pas que l’Ailleurs vienne vivre dans la France.
> Qu’il suffit de faire la leçon à des enseignants sur ce qu’il convient de faire partager d’histoire à leurs élèves, alors qu’ils nous font tous les jours partager, à nous parents, la fin de l’histoire d’une éducation nationale que vous rendez exsangue.
> Qu’il suffit de tuer les familles, je pèse mes mots, en envoyant vos sbires arracher les portes, arracher les affaires personnelles, arracher les êtres de leur travail, arracher les hommes de leur famille, arracher les mères de leurs enfants, ce que vous faites tous les jours, ici, en France.

Quand vous offrirez de la France un autre spectacle aux yeux de nos enfants.
> Quand vous cesserez de nous mettre en deuil chaque matin de l’une des qualités d’accueil, de soin, de solidarité, d’éducation, de liberté, d’égalité, de fraternité… qui devraient être la nature, l’essence, la colonne vertébrale de notre pays.
> Quand vous vous préoccuperez, aussi, de ce qui se passe dans une salle de classe lorsque les maîtresse malades ne sont pas remplacées, au collège lorsque les adultes si dévoués soient-ils à leur mission, n’y sont pas assez nombreux.
> Quand vous proposerez à nos enfants la prise en considération de toutes les souffrances des humains à travers l’histoire, sans quantification, sans classification.
> Quand vous nous aiderez véritablement à les construire dans le respect de l’autre sous les yeux d’une République exemplaire.
> Quand vous tiendrez vos promesses de protéger tous les opprimés, toutes les femmes opprimées, tous les déshérités, tous les enfants déshérités…
> Quand vous ferez véritablement preuve d’un courage révolutionnaire et visible en cessant les exactions, en ramenant vos chiens.
> Quand vous serez capable de ne plus fabriquer visiblement et incessamment un pathos bien ciblé, d’héroïsme ou de pitié, c’est tout comme, pour dissimuler la déconstruction de l’humain et de l’espoir que vous vous acharnez à promouvoir.
> Quand vous serez ce que vous n’êtes pas, quand vous ne serez plus ce que vous êtes.

Je cesserai d’être en deuil de mon pays idéal.
> Je cesserai de ne pouvoir plus lire les journaux et de pleurer chaque jour à la découverte des nouveaux nuages. Un grand mal est toujours suivi d’un grand bien. La citoyenneté profondément humaine, sincère, dévouée, invisible, muette pour l’instant, s’amplifie chaque jour qui passe avec son lot d’expulsés amis, de justes condamnés, …

La réponse à votre action est dans cette résistance contre laquelle vous ne pouvez strictement rien. La pensée et le cœur sont irréductibles.
> Ma fille se construit, comme bien d’autres enfants, par la grâce d’adultes conscients de leur devoir d’« êtres au monde » parmi d’autres « êtres au monde ».
> Ces enfants seront des adultes, nombreux et imperturbables, des lions, auxquels il incombera de développer à une échelle jamais vue les valeurs de beauté et de bonté de la vie, pêchées dans le meilleur de chacune de leurs origines, passées au tamis du métissage, cimentées entre elles par la liberté et l’empathie réunies.
> Vous ne sauriez apprendre à mon enfant cela que je choisis de lui apprendre.
> Son espoir et sa force sont entre les mains de son père et de sa mère.

C. M (Paris , le 14 février 2008)
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0 # superuser 2008-02-28 21:28
Et si on se tournait vers les vrais responsables ? En suggérant que chaque homme politique, chaque membre du MEDEF parraine le souvenir (et la famille) qui d'une victime du travail, qui d'un chômeur suicidé, qui d'un SDF mort de froid… Une espèce de devoir de mémoire.

(Source : Télérama - courrier des lecteurs du 27/02/08)

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