Car il s'agit de trouver les «1 à 1,5 milliard d'euros» nécessaires au financement intégral du RSA de Martin Hirsch, a dit Nicolas Sarkozy : «On n’a pas beaucoup de moyens et on les disperse sur tout un tas de gens. J'aimerais recentrer le produit de cette prime pour l'emploi sur ceux de nos compatriotes qui en ont vraiment besoin»...
Comme il n'est pas question de revenir sur le «paquet fiscal» voté l'été dernier en faveur des ménages les plus aisés (14 milliards d’€), ni de supprimer vraiment la plupart des 486 «niches» qui exonèrent de riches contribuables du paiement de l'impôt et seraient à l'origine d'un manque à gagner de 73 milliards d’€ en 2007, ni de s'attaquer sérieusement à la fraude fiscale qui grève les finances publiques de quelque 40 milliards d’€ par an, encore moins de «redéployer» et de contrôler l'attribution des 65 milliards d'euros d'aides publiques accordées chaque année aux entreprises, le Président choisit, une fois de plus, de mettre à contribution les plus modestes. En dépit de son mea culpa d'hier soir, où il a lâché du bout des lèvres qu'il allait «tirer les conséquences» du reproche des Français qui ont le sentiment que, jusqu'ici, il n'a œuvré que pour une poignée de nantis… en laissant tomber tous les autres.
La Prime pour l'emploi, «impôt négatif» créé en 2001 sous Jospin, consistait à redistribuer du pouvoir d'achat aux salariés au plus bas de l'échelle. Elle a été augmentée par le gouvernement Raffarin en 2003, puis doublée par Dominique de Villepin entre 2005 et 2007. Ce dernier vantait son principe, claironnant qu'elle était «un 13e mois pour les Smicards» : un 13e mois bel et bien offert par la collectivité à près de 9 millions de foyers, au grand bonheur de leurs employeurs qui peuvent ainsi, en toute quiétude, continuer à les sous-payer ! Comme l'essentiel des dispositifs d'aide à l'emploi, exclusivement ciblés sur les bas salaires, cette solution dégradée a pour effet pervers de les perpétuer : avec nos 15% de Smicards, nous pulvérisons le record d’Europe des travailleurs abonnés au salaire minimum !
Le Revenu de solidarité active est un autre pis-aller : basé sur l'intolérable constat que l'on peut perdre de l’argent en reprenant un travail, son objectif affiché est de permettre aux personnes les plus «éloignées de l'emploi» de reprendre une activité salariée sans perte de revenu et de droits… pour un temps limité, et un seuil de revenu n'excédant pas «1,1 ou 1,2 Smic» (on n'en décolle pas !). Et si, au final, l'employeur ne joue pas le jeu - embauche définitive avec rémunération conséquente -, l'aide apportée sera réduite à néant.
Une fois de plus, il s'agit de faire assumer par la collectivité les défaillances des patrons qui offrent des salaires qui ne permettent même pas de vivre !!! Comme pour la PPE où aucun effort ne leur est demandé, le RSA va au contraire favoriser le développement du sous-emploi tout en maintenant ses victimes dans l'assistanat. Son objectif caché étant purement statistique : à quelques euros près, les personnes aujourd'hui comptabilisées sous le seuil de pauvreté passeront légèrement au-dessus, ce qui fera mécaniquement baisser le taux de pauvreté (comme on fait baisser le taux de chômage en rabotant la définition du chômeur), sans résoudre le fait crucial qu'aujourd’hui, c'est le travail qui ne paie plus !
Quelle alternative à ces deux options ? Aucune... Sinon une mise en concurrence de deux populations défavorisées : les Pierre qui travaillent, et les Paul qui voudraient travailler. Pourtant, en France, ce sont les employeurs qui sont les plus assistés (32 milliards d'exonérations de «charges» en 2008, au total 65 milliards d'aides publiques diverses et variés versées chaque année aux entreprises). A eux, aucun sacrifice, aucune contrepartie ne sont exigés. Aucun contrôle, aucune sanction ne sont prévus.
Mais on va chipoter sur le coût exorbitant de ces dispositifs de «bricolage» que sont la PPE (4,5 milliards) et le RSA (1,5 milliard), en dressant au passage les bénéficiaires de l'une contre les futurs bénéficiaires de l'autre. On reconnaît là une tactique sarkozyenne classique : tant que les pauvres s'écharpent entre eux sur la distribution des miettes qu'on leur jette, l'impunité des vrais profiteurs du système demeure préservée.
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