On n’est vraiment pas gâtés ! Depuis des décennies, la France est dirigée par des politiciens sans envergure, sans ambition collective et sans vision d’avenir.
Si François Mitterrand n’a pas brillé par son esprit visionnaire sur les questions économiques et industrielles, Jacques Chirac a été plus encore le Président de l'immobilisme. Zéro pointé ! Quant à Sarkozy, il tente de colmater les brèches de 30 années d’inertie et de renoncement avec l'incompétence qu’on lui connaît et l’absence de résultats qui va de paire.
Pour préparer l’avenir, il n’y a plus personne à la barre du navire depuis un bon moment. Et ceux qui, malgré tout, se retrouvent aux commandes font montre d’un manque total d’anticipation et d’imagination, sous couvert de pragmatisme.
Si encore notre pays était bien géré !
Si au moins ces «bons gestionnaires» autoproclamés l’étaient. Si encore notre pays était bien géré, ses comptes sociaux équilibrés, son chômage contenu, ses entreprises florissantes… Nous pourrions admettre qu’à défaut d’ambitions et d’impulsions nouvelles, nos politiques préservent notre patrimoine industriel et financier en bons pères de famille. Mais il n’en est rien !
Avec leur gueule de premiers de la classe sortis majors des grandes écoles d’administration ou de commerce, nos costards-cravates imbus d’eux-mêmes n’ont qu’une option à nous proposer :
Pour combler les déficits, il faut réduire les dépenses. Pour ne pas augmenter les impôts, il faut dégraisser le mammouth de la fonction publique. Pour conserver notre compétitivité internationale, il faut privatiser, bloquer les salaires, licencier et délocaliser. Quelles trouvailles !
Voilà les solutions qu’ils préconisent, quel que soit le sujet abordé : Un business plan aux minima, qu’un comptable de PME pourrait prescrire et mettre en œuvre.
Une cruelle absence d’impulsions politiques
Et c’est de cette façon qu’on traite depuis des décennies les grands dossiers nationaux, sans résultat probant… à part le creusement des déficits.
En définitive, ça fait près de 30 ans que la France connaît une crise provoquée par l’absence d’impulsions et d’initiatives politiques, telles qu’on en a connues dans les années 50, 60 et 70, en ces temps oubliés où un Plan quinquennal fixait des objectifs à long terme.
La planification des années 60 a initié les grands chantiers qui ont fait la richesse industrielle et technologique de la France à la fin du XXe siècle : l’aérospatiale et le lanceur Ariane, l’aéronautique et le Concorde suivi du programme Airbus, le transport ferroviaire et le TGV, le développement de notre industrie électronucléaire, la construction de l’aéroport Charles-de-Gaulle et d’une multitude d’autres grands projets.
Dans les années 70, cette planification nous a permis de rattraper le retard considérable qu’avait pris la France dans les télécommunications. En moins de 10 ans, nous l’avons comblé et, mieux, nous avons pris une longueur d’avance, en développant les premiers services on-line Minitel, 20 ans avant la généralisation d’Internet.
Aujourd’hui, que nous propose-t-on ? Rien !
La crise financière de 2008/2009 a démontré à quel point nos élites politiques et économiques sont à cours d’idées. Le gouvernement a bricolé à la va-vite un plan de relance de l’économie qui illustre ce manque criant d’imagination, d’anticipation et de prospective.
Alors que nous sommes à un tournant de l’Histoire industrielle de l’Humanité, que tout est à réinventer pour adapter nos modes de vie et nos produits aux nouvelles contraintes environnementales et d’approvisionnement en matières premières (notamment en énergies fossiles), quelles mesures a proposé notre gouvernement ?
Une prime à casse (pour maintenir les ventes de l’industrie automobile), la construction d’infrastructures routières souvent inutiles et la rénovation de bâtiments publics (pour maintenir l’emploi dans le BTP). Un cache-misère pour une économie française qui a perdu 400.000 emplois salariés en 2009 !
Et à la tête de cette «relance» qui trouvons-nous ? L’avocat carriériste Patrick Devedjian qui n’a ni le profil de l’emploi ni le bagage technique ou scientifique nécessaire, et moins encore l’esprit visionnaire. Un rapide coup d’œil sur sa biographie (auréolée de son engagement d’extrême droite, son «erreur de jeunesse») suffit à convaincre tout un chacun.
Un avocat et une riche héritière à la tête de la relance industrielle
Même constat du côté du patronat français dirigé par l’insignifiante Laurence Parisot, riche héritière d’un constructeur de meubles et Pdg d’un institut de sondages, l’IFOP. Symbole de la valorisation des activités de services au détriment de notre outil industriel !
Depuis plus de 30 ans, on bricole, on tente de colmater les trous, on gaspille le patrimoine hérité des 30 Glorieuses, et on ne propose rien de nouveau. On n’anticipe pas ou alors à retardement.
L’imagination, la prospective et l’ambition collective sont des valeurs aujourd’hui volatilisées. Les entrepreneurs et les visionnaires n’ont plus la cote. Ils ont été remplacés par des arrivistes qui n’ont qu’un objectif : assurer leur promotion individuelle, grimper le plus rapidement possible l’échelle sociale et s’en mettre plein les poches.
Nos grandes écoles (d’administration, commerciales) forment des crânes d’œuf stéréotypés, carriéristes, pantouflards et rentiers (ou, au mieux, spéculateurs).
Après les 30 Glorieuses, les 30 Calamiteuses
Leurs procédures de recrutement excluent les candidats aux parcours atypiques. Et leurs programmes se gardent de bien de promouvoir la prise de risque, l’esprit d’entreprise, le vrai.
Au contraire, ils glorifient les success stories contemporaines, celles qui se jouent dans les salles de marché, devant l’écran d’un ordinateur, et qui consistent à acheter au plus bas et à vendre au plus haut, à boursicoter, à faire du fric avec n’importe qui, avec n’importe quoi et souvent n’importe comment.
Cette réussite, c’est celle des traders, des «money makers» (faiseurs d’argent), de tous ceux qu’on ne voit jamais et qui dirigent une économie livrée à elle-même.
On formate dans un même moule notre «élite» politique et économique. Les uns grossiront les rangs des hauts fonctionnaires de l’État. Les autres, le Top Management des multinationales françaises ou étrangères : l’Oréal, Total, Procter & Gamble… pour y faire carrière avec un seul mot d’ordre : Optimiser les coûts (ce qui revient toujours à les réduire) pour accroître les marges bénéficiaires.
Ils deviendront les soldats d’un système qui récompense les licencieurs et pénalise les embaucheurs, d’un système qui dope les délocalisations et entrave le développement industriel national, qui favorise la déréglementation sociale et la baisse des salaires, au détriment de la vraie création de richesses.
Et plutôt que de revitaliser l’industrie française, le gouvernement actionne le seul levier qu’il connaisse, celui de la consommation qui creuse notre déficit commercial, puisque l’on produit de moins en moins en France et qu’on importe de plus en plus.
Nous n’avons rien de mieux à attendre de la gauche socialiste
Et ne comptons pas sur la gauche socialiste pour inverser cette tendance impulsée sous François Mitterrand, dans les années 80.
Au PS, on retrouve les mêmes crânes d’œuf qui garnissent le nid de l’UMP. La sclérose y est d’autant plus flagrante que, par le passé, cette «gauche» revendiquait cette imagination, cette capacité à «changer la vie» face à une droite «conservatrice».
Aujourd’hui, tous les œufs sont dans le même panier, celui du déclin de l’impulsion collective et de la vision d’avenir.
Et ce déclin politique ne fera qu’accentuer celui de notre économie, de notre modèle social et de notre rayonnement international.
Car si la France n’a toujours pas de pétrole, il y a belle lurette qu’elle n’a plus d’idées !
Yves Barraud
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