Récemment, une enquête TNS-Sofres pour le Conseil d'orientation pour l'emploi (COE) menée auprès d'un échantillon de 900 salariés et 300 chômeurs interrogés début mai, dévoilait qu'une infime minorité d'entre eux (5%) croit toujours à un retour rapide au "plein emploi", contre 41% qui jugent qu'on n'y parviendra jamais, et 21% qui pensent qu'on ne reviendra pas avant dix ans sous la barre des 5% de taux de chômage.
Ce qui est rigolo, c'est que la France n'a jamais affiché un taux de chômage inférieur à 7% depuis 1982… Dans ces conditions, comment être persuadé d'un "retour rapide au plein emploi" — puisqu'il n'existe plus depuis trente ans — autre que précaire, ou s'imaginer qu'on repassera, même dans dix ans, sous la barre symbolique des 5% ?
Nos 41% de pessimistes sont les moins naïfs. Qu'ils en aient conscience de manière éclairée ou juste le sentiment, depuis l'émergence du capitalisme financier dans les années 80, il est clair que la promesse du "plein emploi" est un mensonge éhonté qu'on nous sert ad nauseam alors que le chômage et la précarisation de l'emploi sont voulus et orchestrés => On vous l'explique ici.
Mais ce gouvernement persiste à nous enfumer, tablant sur un retour au "plein-emploi"… en 2024 ! En effet, il a basé sa réforme des retraites — à 67 ans pour les chômeurs et les précaires — sur une hypothèse de recul du chômage à 7% en 2015, à 5,7% en 2020 et à 4,5% à partir de 2024. Ce que les économistes eux-mêmes jugent fort optimiste (pour rester polis).
La crise malmène la vie au travail
Pour les chômeurs, c'est très dur, pas besoin de vous faire un dessin. Mais pour ceux qui ont "la chance" d'avoir encore un emploi, ça ne vaut pas mieux. En temps normal, travailler pouvait déjà être pénible. Maintenant, on atteint des sommets...
Revenons à notre enquête TNS-Sofres où seuls 22% des sondés ont jugé que la crise n'a pas eu d'impact sur leur situation. Mais pour les autres — donc, une écrasante majorité —, la dégradation des conditions de travail est la conséquence la plus souvent citée (démotivation des collègues, dégradation de l'ambiance, tension accrue avec les managers, intensification des rythmes…), juste devant la perte de rémunération (diminution de prime, gel du salaire, etc).
Les plus maltraités sont les seniors mais aussi les familles monoparentales, les salariés de grosses entreprises, les ouvriers. Dans le privé plus que dans le public.
Voici deux exemples glaçants
Mon premier se passe chez Carrefour, où la direction oblige ses cadres et ses agents de maîtrise à porter sur eux, en permanence, une petite carte où leur sont rappelés sept commandements dignes de la méthode Coué : «J’ai le bon salaire pour le travail que je fais» • «On se respecte les uns les autres» • «Mon manager m’aide» • «Mon environnement et mes conditions de travail sont bons» • «J’ai des opportunités pour évoluer»• «Je suis fier de travailler dans une super équipe» • «Mon travail me permet un équilibre avec ma vie personnelle». Stupéfiant, non ? Après avoir misé sur le harcèlement moral, Carrefour se lance dans les techniques sectaires.
Mon second se passe à la Fnac de Nice où, suite à l'exposition d'une photo jugée scandaleuse (le fameux «drapeau national outragé»), les sanctions sont tombées sur les deux salariés qui avaient osé primer ce cliché dans le cadre d'un concours sur le thème du «politiquement incorrect». Sacrifiés en vue d'apaiser l'ire de ministres qui n'ont rien d'autre à fiche, on les licencie pour «faute grave» alors qu'ils n'ont fait que leur travail et que l'affaire a même été classée sans suite par le procureur de la République. Si cette chargée de communication — enceinte, de surcroît — et son supérieur hiérarchique ont perdu leur boulot, ils vont en donner un peu plus aux Prud'hommes qui, eux, ne chôment pas.
Ce ne sont que deux exemples, mais il y en a des millions. Si vous en avez d'autres du même tonneau, vous pouvez les poster en commentaire...
Tant va la cruche à l'eau (qui dort) qu'à la fin ils nous les brisent ? Quand la cerise fera-t-elle déborder le vase ?
Ô rage, ô désespoir, ô capitalisme ennemi.
SH
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