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François Baroin, porte-parole du gouvernement et ministre du Budget, l'a aussitôt recadré, dénonçant des «sottises» et «une contre-vérité qui n'est pas acceptable»; surtout, lui rappelant son «obligation de réserve» (?). D'autres réactions au sein de l'UMP ont fusé, encore plus sévères.
Martin Hirsch a-t-il raison de parler d’«entourloupe» en soupçonnant le gouvernement de détourner l'argent du RSA en faveur des plus riches ? Quelque part, oui...
Le RSA "activité" coûte beaucoup moins cher que prévu
En juin 2009, le RMI et l'API fusionnent pour devenir le RSA "socle" tandis qu'est créé le RSA "activité" pour les «travailleurs pauvres». Il est décidé que le financement du RSA "socle" sera à la charge des départements (près de 7 milliards d'euros en année pleine) tandis que le RSA "activité" et la prime de Noël seront financés par le Fonds national des solidarités actives, créé à cet effet. Le FNSA est alimenté par une dotation de l'Etat ainsi que par une taxe de 1,1% sur les revenus du patrimoine et de placement, créée afin que «le capital contribue à la lutte contre la pauvreté».
Fin 2009, cet impôt a rapporté 833 millions d'euros qui ont intégralement pourvu aux besoins du RSA "activité" (744 millions). Restaient à financer la prime de Noël (380 millions), les allocations de retour à l'emploi et des frais de gestion (170 millions), dépenses que la dotation de base de 500 millions versée par l'Etat a largement couvertes.
En 2010, année pleine, le FNSA fut à nouveau excédentaire : en raison d'une très lente montée en charge du RSA "activité" et d'un RSA "jeunes" aussi neuf que restrictif, le coût total du dispositif s'est établi à un peu plus de 1,3 milliard d'euros tandis que la taxe sur les revenus du patrimoine en rapportait 1,2. Une fois de plus, pour couvrir toutes les dépenses, l'Etat s'est acquitté d'une somme inférieure à ce qui était prévu, se donnant l'opportunité de revoir à la baisse le montant des dotations suivantes au lieu de le maintenir afin d'améliorer le dispositif. Ce que déplore Martin Hirsch.
François Baroin — qui ne lui a fourni aucune réponse quant à l'utilisation de l'excédent de 2010 — a précisé que la taxe de 1,1% va rapporter «1,17 milliard d'euros en 2011, 1,2 milliard en 2012», tandis que les dépenses du FNSA sont «évaluées à 1,8 milliard en 2011 et 1,9 milliard en 2012». L'Etat a donc prévu des dotations de 630 millions pour cette année et de 700 millions l'année prochaine. Or, à moins que le nombre de bénéficiaires du RSA "activité" décolle ou que les conditions d'accès au RSA "jeunes" soient assouplies, ces montants devraient être encore supérieurs aux besoins.
Pourquoi le RSA "activité" ne décolle-t-il pas ?
Le gouvernement tablait sur 2 millions de bénéficiaires. Fin 2010, ils n'étaient que 670.000 (et un peu plus de 8.000 pour sa version "jeunes"). Fin 2009, ils étaient 404.000.
D'abord, cette sous-utilisation montre qu'il n'y a pas assez d'emplois disponibles pour permettre au RSA "activité" de répondre à son objectif de départ : garantir un retour à l'emploi suffisamment rémunérateur afin d'extraire des travailleurs pauvres du seuil statistique officiel.
Ensuite, depuis la création du RSA, le gouvernement ne cesse de stigmatiser ses allocataires. S'il jette la pierre à ceux qui ne travaillent pas et perçoivent le RSA "socle", ce dénigrement permanent n'encourage pas les demandeurs potentiels du RSA "activité" à se manifester pour peu qu'ils en connaissent l'existence, l'acronyme RSA étant à lui seul synonyme d'infamie et de déchéance sociale. Quant à ceux qui tentent le coup, le caractère particulièrement intrusif du questionnaire de cinq pages qu'il faut remplir a de quoi dissuader.
De surcroît, parmi les bénéficiaires actuels rodés à la déclaration trimestrielle de ressources, un tiers subit des dysfonctionnements usants : retards de paiement, calculs erronés, réclamations d'indus… autant de hics qui passent pour des fraudes. Ces tracasseries pèsent sur les plus précaires qui ne savent jamais combien ils vont toucher lorsqu'ils travaillent un mois 20 heures, l'autre 60, et le suivant pas du tout. C'est ainsi que chaque mois, la CAF recense 200.000 allocataires dont l'éligibilité a varié d'un mois sur l'autre.
Tous ces désagréments doublés d'une sous-information (désinformation ?) expliquent cette mauvaise performance dont on se demande à quel point elle n'est pas voulue. On ne peut s'empêcher de faire un parallèle avec les tarifs sociaux de l'énergie où plus des deux-tiers des ayants-droit échappent aux dispositifs TPN ou TSS, ce qui permet à EDF et GDF de faire des bénéfices sur le dos des pauvres et à l'Etat actionnaire de réaliser quelques économies...
Martin Hirsch a peut-être été maladroit dans la formulation de son sentiment. Mais il n'a pas tort quand il soupçonne l'UMP — dont l'aversion pour tout ce qui est social (vade retro, Satanas !) et la générosité envers les plus riches sont patentes — de favoriser l'échec du RSA "activité" afin de ne pas avoir à s'impliquer plus, ni dépenser plus.
SH
DERNIÈRE MINUTE : Comment sera utilisé le milliard d'excédent du FNSA qui était prévu pour aller vers les ménages les plus modestes ? Selon Eco89, la question, posée brutalement par Hirsch, garde son intérêt.
Le raisonnement est simple : après la réduction de l'ISF que le gouvernement a promis d'engager sans aggraver le déficit public, cet impôt ne rapportera plus que 2,2 milliards au lieu des 4 milliards actuels. La suppression du bouclier fiscal rapportera de son côté 720 millions d'euros. Il reste donc 1,1 milliard d'euro à trouver. Un milliard en trop d'un côté, un milliard en moins de l'autre… l'affaire pourrait être entendue.
Selon un avocat spécialiste des dépenses publiques, «la règle générale est la suivante : quand on a un surplus dans le budget de l'Etat, il rejoint la masse des recettes et son utilisation ultérieure sera décidée par le Parlement». Donc, ce qui n'est pas dépensé n'est pas provisionné pour l'année suivante mais remis au pot commun. Et quand on sait comment l'UMP fait usage du pot commun depuis quatre ans, il est donc permis de douter.
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Commentaires
ne pas oublier, qu'au RMI, les mesures d'incitations, pouvaient se cumuler à la PPE qu'avec le RSA, ce n'est pas le cas, le RSA chapeau, étant retranché de la PPE.
ne pas oublier qu'au RSA les moindres épargnes, mêmes des enfants, sont taxés à 3% , alors qu'au RMI, cette mesure n'etait quasi jamais appliquée, aujourd'hui on a un vrai flicage bancaire, levée du secret bancaire là ou avant il fallait la décision d'un juge.
ne pas oublier, que l'UMP a aussi fait des économie, de par le fait, de la très forte incitation à faire fonctionner l'aide alimentaire, auprès des familles, ce qui diminue d'autant encore les prestations RSA.
à suivre Répondre | Répondre avec citation |
- baisse d'APL + rapide
- perte éxonération taxe habitation et redevance TV
- perte CMU + rapide
quand on prend tout ces paramètres bout à bout, + l'augmentation du RSA qui n'a absolument pas suivi l'augmentation du cout de la vie.
la situation des bénéficiaires des minimas sociaux, qui était déjà dramatique à l'époque du RMI, est aujourd'hui carrement désastreuse.
sans parler de la stigmatisation, et de la multiplication des controles, dénonciations, enquètes de voisinage, etc coupures de vîvre, parfois sur simple présomption de fraude etc … on arrive a des mises en danger de la vie d'autrui, je ne blague pas ou je ne dis pas ça à la légère, j'ai vu de temps en temps des cas, inimaginables, des CAF gestapo des conseils généraux gestapo, au dessus des lois, zèle, etc .. des inhumains. Répondre | Répondre avec citation |
donc il peut bien s'offusquer, que l'UMP ne se sentant pu pisser, en remettent une couche encore un peu + à droite aujourd'hui, il leur a bien ouvert la voie.
et l'opposition PS, avec.
seuls quelques rares communistes qu'on a entendu de temps en temps, dénoncer ce que je dénonce. Répondre | Répondre avec citation |
www.humanite.fr/09_06_2011-rsa-martin-hirsch-nen-finit-pas-de-manger-son-chapeau-473965 Répondre | Répondre avec citation |
Selon Guillaume Allègre, économiste au département des études de l’OFCE, si le budget du RSA "activité" est excédentaire et que l'argent se promène on ne sait où, c’est parce que Martin Hirsch a mal ficelé son projet dès le départ.
www.atlantico.fr/decryptage/rsa-excedent-1-milliard-euro-parce-que-loi-mal-faite-mal-appliquee-117374.html
Le "père du RSA" a voulu porter son "bébé" à tout prix sous la houlette de l'UMP : s'il a accouché d'un bâtard, ce naïf n'avait qu'à pas fricoter avec n'importe qui. Répondre | Répondre avec citation |
c'est un filoux, opportuniste, qui est depuis des dizaines d'année dans la palais dorés de la république, avec des revenus gigantesques !! ce fils à papa parmis tant d'autres.
il n'a pas cessé de mentir, comme un arracheur de dents, il etait invité dans tout les médias, au lancement du RSA, il a même eu le prix de la communication à un moment donné, par les médias stupides qui ne font pas leur boulot dailleur … car eux mêmes étaient complice, dés le départ, c'est pas faute de leur avoir dit aussi.
de toutes façons ce mec n'a rien de gauche, sinon il ne tolererait pas un RSA à 410 euros par mois, on n'a rien d'humaniste quand on est rendu à ce stade là.
j'ai aucun respect pour ce genre de mentalité perso. Répondre | Répondre avec citation |
aider ou Enfoncer ? Répondre | Répondre avec citation |
D'abord, rien n'est voté. Aucun projet de loi n'a même été déposé. C'est du blah-blah, du bruit, de la propagande.
Ensuite, les réactions contre ces "propositions" sont légion. Vous les trouverez partout sur le web en tapant "RSA" et "justice sociale"… Répondre | Répondre avec citation |
www.lepost.fr/article/2011/06/07/2516343_comparatif-rsa-socle-smic-plein-temps-rsa-chapeau-10-heures-par-semaine.html Répondre | Répondre avec citation |
www.lesechos.fr/economie-politique/infos-generales/politique/afp_00355031-le-senat-attribue-200-millions-d-euros-aux-contrats-aides-dans-l-education-184942.php Répondre | Répondre avec citation |