Le parti présidentiel persiste et signe en proposant que «certains» allocataires du RSA "socle" — ces fainéants sans activité aucune qui touchent 400 € par mois en restant vautrés devant leur télé… — soient astreints à 5 heures de travail hebdomadaire, sous peine de voir leur misérable subside réduit ou suspendu. Rémunérées au Smic, ces heures de «travaux d’intérêt général» ne seraient pas déduites du RSA "socle".
Seule une minorité aux contours flous serait concernée
Selon Marc-Philippe Daubresse contacté par Lemonde.fr, sur les 1,15 million d'allocataires actuels, rien ne changera pour les deux tiers qui «peuvent déjà obtenir une activité par les outils classiques» (notez qu'il parle d'«activité» et non d'emploi) : ils resteraient suivis par Pôle Emploi ou les services sociaux de leur département qui se chargeront de leur trouver une activité, notamment via des contrats aidés comme le CUI d'une durée de 20 heures hebdomadaires. (Vous avez le droit de ricaner...)
Ensuite, quelque 350.000 foyers seraient d'office exclus de la mesure car leur situation personnelle — handicap, troubles psychosociaux… — ne leur permet pas de travailler et nécessite «un accompagnement social lourd».
Reste donc une population médiane, ni «employable par les biais classiques», ni «dans des situations nécessitant un accompagnement social», qui serait concernée par la proposition de l'UMP. Pour définir une cible, plus évasif on ne fait pas !!!
Combien de «ni-ni» contient cette population dont les conseils généraux devront assurer le pointage ? «Autour de 150.000 foyers», lâche M. Daubresse. Et pour revenir sur la notion de «foyer» (car, on le rappelle, le RSA n'est pas attribué individuellement mais en fonction des ressources du foyer), si le RSA est versé à un couple, l'UMP n'obligerait qu'un de ses membres à travailler 5 heures par semaine pour la collectivité : comme c'est délicat. «Il s'agirait de sortes de stages d'accompagnement vers l'emploi», assure le numéro deux de l'UMP. Notez qu'il parle de «stages» et non de CUI.
Faudra-t-il une mesure législative ?
En effet, comme nous le relevions ici, la durée hebdomadaire des contrats uniques d'insertion ne peut être inférieure à 20 heures. Or, M. Daubresse assure qu'il est possible de faire des CUI de moins de 20 heures, sans plus de précision.
Soyons sérieux : il faudra soit modifier le CUI, soit — plus simple — créer un micro-CUI, si possible moins contraignant que l'original (c'est-à-dire échappant à une obligation de formation ainsi qu'à l'article L1242-1 du Code du travail), et donc passer par la case législative afin que l'UMP puisse «réinventer des contrats aidés au rabais, des CDD de 5 heures pour les pauvres», comme le dénonce Marisol Touraine (PS).
On cherche des «volontaires»
L'UMP laisse le soin aux collectivités territoriales de proposer ces micro-CUI à la population-cible : autrement dit les régions, les départements ou les communes seront libres… de ne rien faire.
Car se pose le problème du financement. M. Daubresse estime leur coût unitaire à 2.000 € par an, soit 300 millions d'euros supplémentaires, et l'UMP souhaite — évidemment — qu'ils soient «cofinancés par les collectivités territoriales» : là encore, une manière de leur refiler la patate chaude.
Menaces et travail forcé
La loi RSA prévoit déjà que ses allocataires «ont les mêmes obligations générales et accès aux mêmes prestations que les chômeurs». En cas de manquements, elle prévoit aussi de «diminuer progressivement» le montant de l'allocation de 10%, puis 20%, «jusqu'à la radiation». Mais uniquement sur décision du président du conseil général, et à condition que les départements aient signé un pacte territorial d'application du RSA… ce que la moitié d'entre eux n'a toujours pas fait. Or, quand la réforme des collectivités territoriales entrera pleinement en vigueur, qu'en sera-t-il de ces petits écarts ?
Le chantage au minimum vital est certes inscrit dans cette loi, et personne ne l'a remis en cause au moment de sa promulgation alors qu'il est contraire à nos principes républicains, notamment l'article 11 du Préambule de notre Constitution, et aux articles 23 et 25 de la Déclaration universelle des Droits de l'homme. Grâce au matraquage de l'UMP, on les voit heureusement refleurir sur Internet : de quoi rafraîchir la mémoire de nos parlementaires oublieux.
Quant à la notion de travail obligatoire, le Parti communiste a osé mettre les pieds dans le plat en comparant cette mesure au STO. Plus modérée, la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale (FNARS) a souligné dans un communiqué que l'Organisation internationale du travail considère que la «participation obligatoire à des travaux publics» s'apparente à du travail forcé et qu'«une relation de travail devrait être librement consentie et exempte de menaces». Le SNU-Pôle Emploi estime également que cette proposition est contraire à des règles internationales, dont la convention de l'OIT.
Le projet sera-t-il mis en œuvre ? s'interroge Lemonde.fr. «Tout dépend de la volonté de l'Etat, répond M. Daubresse. Nous sommes un parti politique, nous nous bornons à faire des propositions». Et de la propagande pré-électorale nauséabonde en faveur du président sortant.
Bref, tout cela est du «ni-ni» : ni fait, ni à faire !
SH
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