
A partir du 1er janvier 2014, le taux normal, actuellement à 19,6%, sera porté à 20% (gain : 4 milliards d'euros). Le taux réduit sur les produits et services de première nécessité baissera de 5,5% à 5% (diminution de recettes : moins d'un milliard). Le taux intermédiaire — qui concerne surtout la restauration et les travaux de rénovation des logements mais vise aussi les livres, les tickets de cinéma, les droits d'entrée dans les zoos et les musées, les transports, les cantines scolaires ou les médicaments non remboursables… — passera de 7% à 10% pour un gain de 4 à 7 milliards. Il y a seulement six semaines, pointe Rue89, le même Jean-Marc Ayrault promettait le contraire dans l'émission "Des Paroles et des Actes" sur France 2, face à Nathalie Kosciusko-Morizet : «Pas de hausse de la TVA pendant le quinquennat», avait-il affirmé.
Le gouvernement a — pour l'instant — rejeté la baisse des cotisations sociales — ouf ! — mais, à la place, créé une nouvelle niche fiscale dont le coût sera supporté par tous les consommateurs, qu'ils soient riches ou pauvres. (Surtout modestes et pauvres, car l'idée de relever la TVA à 33% sur les produits de luxe, qui ont le vent en poupe malgré la crise et rapporteraient plus de 4 milliards, semble exclue.) Et par tous les Français puisque ce crédit d'impôt sera non seulement financé par la hausse de la TVA, mais aussi par une baisse des dépenses publiques (10 milliards d'économies !) et une nouvelle fiscalité écologique qui sera élaborée pour 2016 (3 milliards de gains escomptés).
En ce qui concerne la baisse des dépenses publiques, elle touchera "les dépenses de l'État, de ses agences, des collectivités territoriales (au risque de voir les impôts locaux encore exploser) et de la protection sociale" (hausse de la CSG ? Réduction des droits ? On envisage le pire). «La France doit s'engager dans des réformes structurelles», a expliqué le Premier ministre, prétendant «s'inspirer des réformes de nos partenaires européens scandinaves qui ont su se réformer en profondeur pour maintenir leur modèle social». Or, se cacher derrière des réformes à la scandinave n'est pas plus rassurant : on sait, en novlangue, ce que signifie "réforme structurelle"… même si elle se couvre d'un bonnet blanc comme la neige du Nord.
Pour les entreprises, le montant du CICE sera calculé en proportion de leur masse salariale brute hors salaires supérieurs à 2,5 fois le Smic et s'appliquera aux impôts sur les sociétés au titre de l'exercice 2013, donc en 2014 : le gouvernement espère ainsi inciter les employeurs à garder leurs salariés, voire à recruter (ce qui n'est pas gagné !). Les PME en difficulté qui en feront la demande pourront bénéficier d'une avance en trésorerie dès l'année prochaine. Au total, nous dit-on, cela équivaut à une baisse de 6% du "coût du travail".
Jean-Marc Ayrault semble naviguer à vue, espérant que ce cadeau serve effectivement aux embauches ou à l'investissement (ce dont il n'a pas l'air d'être sûr).
Enfin, quelques mesures viendront soutenir les PME et les TPE : création d'un fonds de 500 millions d'euros pour «garantir aux PME et entreprises de taille intermédiaire l'accès aux financements dont elles ont besoin»; mise en place d'un accompagnement personnalisé à l'international par la PBI pour quelque 1.000 ETI et PME; simplification de cinq démarches administratives essentielles et stabilisation de cinq dispositifs fiscaux-clé sur la durée du quinquennat (crédit d'impôt recherche, contribution économique territoriale…).
L'essentiel de ces mesures agit sur la compétitivité-prix (coûts de production), tandis que la compétitivité hors-prix (recherche, innovation…) n'est qu'effleurée. Le problème est donc pris à l'envers. De même, priorité est donnée à l'amélioration de la compétitivité des entreprises pour les aider à exporter plutôt que de chercher à relancer la demande intérieure, qui constitue 80% de l'économie du pays.
Pour conclure, comme le signale Pascal Riché sur Rue89, «si la France a besoin d’un "choc", c’est chez Cécile Duflot, ministre du Logement, qu’il faut le préparer : une baisse des loyers aurait, en France, une véritable efficacité économique». Et puisque que la mode consiste à se comparer sans cesse avec l'Allemagne, Pascal Riché rappelle que, «du fait du vieillissement accéléré de sa population, le nombre d’Allemands décroît, et les logements sont en surnombre. Résultat : alors que les prix et les loyers ont doublé en quinze ans en France, ils sont restés plats en Allemagne (un logement coûte 1.300 euros du m2 en Allemagne, soit trois fois moins qu’en France !)».
Jusqu'à présent, l'appât du gain et l'inertie de l'Etat ont instauré la possibilité de se faire énormément plus de fric en spéculant sur la pierre qu'en travaillant. Dans l'absolu, un vrai gouvernement socialiste devrait décider de rendre du pouvoir d'achat (et des cotisations sociales) aux salariés/ménages en agissant sur les prix de l'immobilier par les deux leviers suivants : lutter contre la rareté qui fait grimper les prix en construisant un maximum de logements sociaux; faire baisser notablement le prix des loyers. Ce qui allègerait le budget que les Français, surtout les plus modestes, doivent consacrer pour se loger et, par ricochet, donnerait une vraie bouffée d'air à notre demande intérieure. N'est-ce pas là une bonne idée de "réforme structurelle" ?
SH
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Commentaires
www.lemonde.fr/politique/article/2012/11/06/hausse-de-tva-sociale-quand-le-president-desavoue-le-candidat_1786270_823448.html
Les mesures du gouvernement constituent "une régression intellectuelle et politique considérable", estime Thomas Piketty :
www.lemonde.fr/politique/article/2012/11/06/les-mesures-du-gouvernement-constituent-une-regression-intellectuelle-et-politique-considerable_1786231_823448.html Répondre | Répondre avec citation |
Je trouve que oui, SH.
Un avantage politique serait que le gouvernement ne pourrait être accusé de taper sur ceux qui entreprennent et puis, par nature, ce type de patrimoine immobilier est difficile à charger dans une brouette pour la Belgique… Répondre | Répondre avec citation |
Le FMI recommandait à la France de s'inspirer des réformes «en profondeur de l'Italie et de l'Espagne» et de relever la TVA plutôt que la CSG. La leçon semble avoir été entendue…
www.lefigaro.fr/conjoncture/2012/11/06/20002-20121106ARTFIG00521-la-hausse-de-la-tva-une-idee-poussee-par-le-fmi.php Répondre | Répondre avec citation |
Le revirement de François Hollande sur la TVA satisfait les Allemands, mais ils regrettent l'absence de réforme structurelles en France pour faire baisser le coût du travail. Berlin attend aussi que la France réforme sa sécurité sociale et son administration pour réduire les dépenses de l'État :
www.lefigaro.fr/conjoncture/2012/11/06/20002-20121106ARTFIG00592-berlin-regrette-l-absence-de-reformes-structurelles.php
Ces connards veulent qu'on fasse du Schröder ! Répondre | Répondre avec citation |
Nous sommes aussi en Europe,. Il est difficile de ne prétendre aux nécessaires convergences économiques, fiscales et sociales et à la solidarité européenne que lorsque cela nous arrange. Répondre | Répondre avec citation |
Le résultat serait calamiteux et l'Allemagne pas vraiment sur le nuage que tout le monde semble la positionner…
Si le but et de faire du Schröder et d'implanter en France des réformes de style" Hartz" (nota. le volet 4), et pourquoi pas réformer le régime de la sécurité sociale française en supprimant le "régime par répartition" auquel nous sommes tous profondément attachés ?! Répondre | Répondre avec citation |
Les entreprises vont-elles pour autant se remettre tout d’un coup à investir et embaucher en France ? Il y a lieu d’en douter malgré ce qu’affirme Jean-Marc Ayrault qui promet, grâce au CICE, 300.000 emplois de plus à l’horizon 2017. Dans le contexte très déprimé de l’économie française, encore aggravé l’an prochain par la forte austérité budgétaire déjà décidée par ailleurs, il y a de fortes chances que les entreprises utilisent plutôt ces profits supplémentaires soit pour investir hors de France, dans les pays émergents notamment, soit pour verser encore plus de dividendes à leurs actionnaires, majoritairement étrangers en ce qui concerne les grands groupes.
Ce type de mesures engage surtout la France dans la course au moins disant salarial qui bat déjà son plein en Europe, en particulier dans les pays en crise. Comme tous nos voisins pratiquent déjà ce genre de politique, la pression est effectivement forte pour que la France suive à son tour le mouvement, au risque sinon que son déficit extérieur déjà très important s’accroisse encore et que disparaisse le peu d’industrie qui lui reste. Mais globalement, cette spirale de baisse des salaires ne peut guère que prolonger et aggraver la crise européenne en nourrissant la dépression qui entraîne déjà la zone euro vers le fond.
www.alternatives-economiques.fr/la-france—dans-la-course-au-moins-disant-salarial_fr_art_633_61144.html Répondre | Répondre avec citation |
Parmi les mesures présentées par Jean-Marc Ayrault le 6 novembre figure l'introduction de représentants des salariés dans les conseils d'administration ou de surveillance des grandes entreprises. Un premier pas vers le modèle de relation sociale allemand, appelé cogestion. Un système de gouvernance d'entreprise très spécifique qui contribue, en partie, à la compétitivité industrielle du pays :
www.alternatives-economiques.fr/page.php?controller=article&action=html&id_article=61141&id_parution=633 Répondre | Répondre avec citation |
La Suède est le nouvel Eldorado des fanatiques de l’austérité. La façon dont le pays a réduit ses déficits dans les années 90 montrerait la voie à suivre : baisse des dépenses, notamment de l’Etat providence. Une lecture biaisée et idéologique qui montre a contrario ce qu’il ne faut pas faire :
alternatives-economiques.fr/blogs/chavagneux/2012/11/06/quels-enseignements-tirer-de-la-politique-suedoise-de-reduction-des-deficits/ Répondre | Répondre avec citation |
Elle va servir aux grosses entreprises.
Alors que on est chômeur, beaucoup d'entre nous demandent une aide financière ou simplement un prêt pour pouvoir créer leur micro entreprise.
Là rien. Les pauvres restez où vous êtes.
Au fait de combien a t-on renfloué les banques ?
Et Tapis, combien a-t-il pris ? …alors qu'on doit encore rembourser ses 4.5 milliards de Credit… Répondre | Répondre avec citation |
www.monde-diplomatique.fr/carnet/2012-11-09-choc-de-competitivite Répondre | Répondre avec citation |
www.latribune.fr/actualites/economie/france/20121126trib000733304/competitivite-et-si-le-gouvernement-se-trompait-d-objectif-.html Répondre | Répondre avec citation |
lexpansion.lexpress.fr/economie/credit-d-impot-pas-des-conditions-mais-des-criteres-d-appreciation_363197.html
En clair, si aucune contrepartie n'est exigée, c'est encore 20 milliards de foutus en l'air ! On a un gouvernement soi-disant "socialiste" qui s'aplatit complètement devant le patronat : honte à lui ! Répondre | Répondre avec citation |
www.lepoint.fr/politique/pour-lutte-ouvriere-les-socialistes-au-pouvoir-sont-des-ennemis-03-12-2012-1537979_20.php Répondre | Répondre avec citation |