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Crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi : «Un pur effet d'aubaine»

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Selon une étude publiée par Les Échos, cette mesure profitera à de grands groupes qui affichent de copieux profits, ne sont pas forcément exposés à la concurrence, et qui sabrent dans l'emploi.

«C'est le bouclier Mittal !» s'étaient insurgés certains élus de gauche après la présentation du CICE, évoquant même «un chèque de Noël aux groupes du CAC 40». Qu'en est-il vraiment ? Le dispositif, qui va représenter un allègement de 20 milliards d'euros d'impôt [1], est en vigueur depuis quelques semaines, et les entreprises commencent à lever — timidement — le voile sur ce qu'il va leur rapporter.

A la lumière de leurs déclarations et des estimations des analystes, il ressort que quelques secteurs peu exposés à la concurrence en tireront un gros bénéfice : ceux ayant une masse salariale importante en France, composée majoritairement de bas salaires comme la construction, la grande distribution, ainsi que certaines sociétés de l'environnement et de l'énergie.

Pour les entreprises qui souffrent de marchés dégradés, l'effet du CICE devrait être encore plus visible sur leurs bénéfices. D'où le sentiment, chez certains investisseurs anglo-saxons, que «le dispositif servira surtout les canards boiteux». Pour PSA, le crédit, estimé à 100 millions en 2014, va ainsi apporter une bouffée d'oxygène, comme à de nombreux acteurs industriels.

Les entreprises du secteur de la construction, gros employeurs de bas salaires, sont parmi les grands gagnants. Elles sont aussi particulièrement discrètes. Dans l'étude d'impact, le gouvernement avait chiffré le gain pour ce secteur à 2 milliards d'euros en 2014. «Les entreprises du BTP n'en croient pas leurs yeux ! reconnaît un analyste spécialisé. Pour elles, c'est un pur effet d'aubaine, car il n'y a aucune chance qu'elles délocalisent leur activité.»

Les équipes de la Société Générale estiment que l'impact sur le résultat d'Eiffage pourrait atteindre 17% en 2014. Pour l'entreprise, le crédit d'impôt est estimé entre 70 et 94 millions d'euros, pour un résultat 2011 de 205 millions d'euros. Pour Bouygues, qui affiche un profit de 1,07 milliard d'euros, le crédit d'impôt est estimé à 87 millions. Et pour Vinci, le gain est estimé entre 111 et 189 millions d'euros pour 1,9 milliard d'euros de bénéfice net en 2011 et un dividende en hausse.

Autre gagnante, la grande distribution pour qui l'enveloppe atteint 3 milliards au total, selon les chiffres de Bercy. De fait, Carrefour emploie environ 110.000 personnes en France et Casino 80.000, dont 90% sont rémunérées sous le seuil de 2,5 Smic. Carrefour devrait bénéficier d'un crédit de 125 millions d'euros, selon l'estimation médiane des analystes pour 2014.

Certaines entreprises de l'environnement et de l'énergie sont citées aussi comme des solides bénéficiaires du dispositif, moins en valeur absolue — le crédit d'impôt atteint pour elles quelques dizaines de millions d'euros — qu'en effet relatif. Exane évalue ainsi à 18% l'impact du CICE sur le résultat de Veolia en 2014, et à 9% pour Suez Environnement. Et GDF Suez a chiffré le crédit à 105 millions en année pleine. Pour Total, qui a peu de salariés en France dont la rémunération est inférieure à 2,5 Smic, le gain ne sera «que» de 30 millions d'euros.

Gros employeurs en France, les banques ne profitent pas excessivement du crédit d'impôt. L'enveloppe totale atteint 900 millions, selon l'étude d'impact, mais les montants unitaires restent relativement modestes (20 millions pour AXA), car les salaires sont plus élevés dans ce secteur.

Les effets du CICE doivent être tempérés par les hausses de TVA programmées en 2014 [2], et surtout les hausses d'impôts déjà votées, comme la diminution de la déductibilité des charges financières. Dans la distribution, plusieurs analystes soulignent aussi que le crédit d'impôt sera répercuté, au moins pour partie, sur les prix, soumis à une forte pression à la baisse.

(Source : Les Echos)

[1] Au total, entre niches fiscales, sociales et autres «dispositifs dérogatoires», l'Etat offre plus de 170 milliards d'euros par an aux entreprises — surtout les plus grosses — soit 9% du PIB sans réelles contreparties sur l'emploi et l'investissement, l'impact de ces aides publiques étant pour la plupart inévalué. On peut d'ores et déjà parier que ces 20 milliards supplémentaires n'auront aucun impact positif particulier sur le chômage.

[2] Voté dans la loi de Finances rectificative de la fin 2012, le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) se veut un outil de relance de l'investissement et de l'emploi, qui joue sur les bas salaires. Les entreprises payant l'impôt sur les sociétés ou l'impôt sur le revenu se voient attribuer un crédit d'impôt égal à 4% de leur masse salariale inférieure à 2,5 Smic en 2013, puis 6% en 2014. Au total, l'allégement représente 20 milliards d'euros par an en rythme de croisière.
Pour le financer, le gouvernement compte augmenter la TVA en 2014 (le taux intermédiaire de 7% doit passer à 10% et le taux normal de 19,6% à 20%), mettre en place des taxes écologiques, et réaliser 10 milliards d'économies supplémentaires sur les dépenses publiques... Bref : les ménages paient pour les employeurs.




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Mis à jour ( Vendredi, 25 Janvier 2013 14:50 )  

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