Actu Chômage

samedi
22 février
Taille du texte
  • Agrandir la taille du texte
  • Taille du texte par defaut
  • Diminuer la taille du texte
Accueil Social, économie et politique Pauvreté : la France moins pire que d'autres, mais…

Pauvreté : la France moins pire que d'autres, mais…

Envoyer Imprimer
Question pauvreté, nous pouvons nous féliciter d'être dans la moyenne, voire moins pire que nos voisins. Pourtant la dégradation se poursuit, et avec elle l'intronisation de la précarité qui en est le facteur déterminant.

Le "travailleur pauvre" est une personne qui a un emploi, mais dont le salaire ne lui permet pas d'assurer le minimum vital. Aux Etats-Unis, le "working poor" existe depuis des lustres, et son modèle a enfin réussi à s'exporter chez nous de façon significative vers la fin des années 90. Le phénomène s'amplifie en France et en Europe, touchant principalement les familles monoparentales et les jeunes.

Selon un récent rapport sur la pauvreté dans les pays de l'OCDE, la France compterait donc un million de ces "travailleurs pauvres", se situant dans la moyenne européenne avec près d'un pauvre sur deux (47%) "vivant dans une famille où au moins un des adultes travaille" contre 8 sur 10 aux Etats-Unis… Et selon que l'on retient la définition française ou européenne de la pauvreté*, nous comptons entre 3,7 et 7 millions de pauvres soit un taux de 7%, moins élevé que dans le reste de l'UE (10,7% en moyenne) et que beaucoup d'autres pays dits "développés" (11% en Grande-Bretagne, 14% au Portugal ou 17% au Etats-Unis).
Le président d'Emmaüs-France Martin Hirsh estime que "ce qui fait la spécificité française, c'est que certains pays comme les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ont fait le choix d'avoir des travailleurs pauvres plutôt que des chômeurs. La France, elle, conjugue désormais les deux. [...] Avant, il y avait la peur du chômage et on pensait s'en sortir avec un emploi. Aujourd'hui, un emploi ne permet pas à coup sûr de sortir de la galère". Et qui dit travail précaire dit pas de logement stable, pas de compte bancaire (4 à 5 millions d'exclus, selon les associations), un accès aux soins limité et "un nombre croissant" de salariés piégés dans un "cercle vicieux" générateur de pauvreté, selon une récente étude publiée par l'Institut de recherche économique et sociale (IRES).

A l'occasion du CPE/CNE, les spectres de la précarité et de la pauvreté reviennent hanter les esprits de ceux qui ne sont pas encore directement touchés, mais en perçoivent l'étendue dans leur entourage. L'enjeu de cette lutte est considérable, car l'introduction de ce type de contrats de travail favorisera inéluctablement la progression de notre taux de pauvreté.

* Le seuil de pauvreté national est fixé à 50% du salaire médian (645 €/mois pour une personne seule). Le seuil de pauvreté retenu pour les comparaisons européennes est fixé à 60% du salaire médian (774 €/mois). NB : ces montants sont basés sur le salaire médian de 2003.

Lire aussi :
Articles les plus récents :
Articles les plus anciens :

Mis à jour ( Lundi, 27 Mars 2006 04:50 )  

Commentaires 

 
0 # superuser 2006-03-27 04:31 Un article de Mickael Sylvain, professeur de Sciences économiques et sociales à Arras, pour AgoraVox :

Après plus de vingt ans de flexibilisation de l’emploi (CDD, intérim, etc., et aujourd’hui CPE, CNE), il est temps d’en évaluer les conséquences funestes et de les corriger, à défaut d’abandonner la méthode. Elle ne permet pas de réduire significativeme nt le chômage et conduit à un retour à la condition salariale du XIXe siècle - marquée par un faible niveau de vie et de sécurité individuelle face aux risques de l’existence (vieillesse, maladie, chômage).

Il est pour le moins curieux de penser à propos du CPE que le Premier ministre puisse «avoir le sentiment qu’entre l’exercice normal de la démocratie à travers le Parlement, qui a conduit à son adoption, et l’expression de l’opinion à travers des assemblées générales, autoproclamées et procédant par mains levées dans la plus pure des traditions «populaires» que l’on pouvait espérer révolue et des défilés aux comptages controversés, il n’a pas d’autre choix que de tenir» (Pierre Bilger du 17/03/2006 sur le site d’AgoraVox).

Tout d’abord, le Premier ministre n’a d’autre légitimité - en l’absence d’un quelconque mandat électif, que celle du chef de l’Etat. Or, celui-ci a été mal élu, faut-il le rappeler, après ce funeste 21 avril 2002. Qui plus est, alors que le Premier ministre dispose de la majorité au Parlement, celui-ci a fait de l’exception du 49-3, utile en période de cohabitation ou de crise, une règle, au mépris de la séparation des pouvoirs exécutif et législatif. Enfin, le CPE n’a fait l’objet d’aucun dialogue social préalable avec les partenaires sociaux, mais a été conçu rapidement sur un coin de table par deux technocrates. Prenons, en conséquence, un peu de recul : nous avons bien là beaucoup plus les ingrédients d’un despotisme éclairé que ceux de la démocratie !

Certains aiment à penser que les gauchistes animent les protestations collectives… mais le sondage BVA du lundi 20 mars 2006 publié dans la Dépêche du Midi montre que 60% des Français souhaitent le retrait du CPE. Mais ils sont aussi 50% à penser qu’il s’agit d’une «mauvaise mesure». Les Français sont pour le coup mieux informés que M. Bilger, qui soulignait toujours vendredi 17/03/2006 : «Il restera cependant une victime, l’espoir, décidément utopique, d’une évolution raisonnée et consensuelle des réglementations du marché du travail, permettant d’aboutir à plus de sécurité pour les salariés et pour les entreprises, au bénéfice d’une vraie lutte contre le chômage».
Nous l’avons vu, parler «d’évolution raisonnée et consensuelle» est pour le moins curieux à propos d’une mesure décidée unilatéralement et à la va-vite. Mais surtout, le consensus existe chez les économistes - qu’on n’a pas consultés, alors que le Conseil d’analyse économique est là pour cela - pour dire que les effets sur l’emploi seront nuls ou quasi-nuls : Cahuc et Carcillo ont calculé qu’au maximum les créations nettes d’emplois induites par le CPE seraient de 70.000 d’ici… dix ans ! L’OCDE, institution dont les penchants libéraux sont facilement identifiables, par exemple dans une publication de 1992 intitulée Make the work pay, a montré à plusieurs reprises qu’il n’y a pas de lien entre flexibilité de l’emploi et taux de chômage dans les pays de l’OCDE (publications de 1994, 1999, disponibles sur le site internet de l’OCDE) : le taux de chômage est ainsi tout aussi faible dans un pays très flexible comme les Etats-Unis que dans un pays très rigide comme la Norvège.

La seule relation qui existe est entre flexibilité de l’emploi et variation du chômage. Cela se comprend aisément : face aux fluctuations de l’activité économique, les entreprises embauchent certes en phase ascendante du cycle économique, mais elles débauchent en phase descendante du cycle économique ; de sorte qu’en moyenne, sur l’ensemble du cycle économique, le volume de l’emploi reste le même. Si la population active est stable ou augmente, alors le chômage reste stable ou augmente.
En France, le développement des emplois atypiques (CDD, intérim, temps partiel) depuis les années quatre-vingts se traduit ainsi depuis 1985 par des fluctuations du taux de chômage français de 2 points autour d’une moyenne de 10%. Plus la flexibilité de l’emploi est forte, plus les variations du chômage le sont. Mais, gare à l’illusion : sur l’ensemble du cycle économique, le taux de chômage moyen est bien resté aux alentours de 10% depuis 20 ans ! On comprend aisément que le choix de l’Etat de favoriser la flexibilité de l’emploi depuis 20 ans pour lutter contre le chômage ait été sans succès. Plus grave, ce choix est lourd de conséquences pour les salariés qui occupent des emplois précaires. De ce point de vue, la flexibilité de l’emploi apparaît comme une pollution. Il est en effet dommageable que les salariés flexibles - ceux qu’on embauche et débauche au gré des fluctuations de l’activité économique - soient doublement pénalisés alors qu’ils permettent à l’entreprise d’être plus efficace, puisqu’ils lui permettent d’optimiser son volume d’emploi à chaque instant. Ils sont tout d’abord pénalisés en termes de pouvoir d’achat. Le SMIC ou le salaire négocié dans le contrat de travail sont en effet des salaires horaires. Celui qui occupe un emploi moins de 12 mois sur 12 et moins de 35 heures par semaine gagne moins qu’un salarié en CDI à temps complet. Les travailleurs pauvres, ces salariés qui travaillent et qui se situent en dessous du seuil de pauvreté, offrent un exemple malheureux des externalités négatives produites par le recours à la flexibilité de l’emploi par les entreprises. La pollution est une externalité négative, c’est-à-dire une conséquence négative sur tous, sans que l’entreprise qui l’a produite en paye le prix. Pourquoi, de même, une entreprise qui bénéficie de la flexibilité de l’emploi n’en paye-t-elle pas le prix alors que le salarié flexible, qui augmente l’efficacité de l’entreprise, est pénalisé dans son pouvoir d’achat ? Il faudrait internaliser au moins en partie cette externalité négative en mettant à contribution les entreprises - par exemple en fonction du pourcentage de d’emplois précaires dans leur emploi total, elles seraient taxées pour augmenter considérablemen t la prime pour l’emploi des salariés flexibles. Ils sont ensuite pénalisés dans leurs accès présent et futur à la protection sociale. Les cotisations sociales étant assises sur l’emploi, le salarié flexible travaillant moins en moyenne annuelle qu’un salarié en CDI à temps complet, il cotise aussi forcément moins. Alors que, encore, ces salariés flexibles augmentent l’efficacité de l’entreprise en acceptant des emplois précaires, ils sont pénalisés. Pourquoi les entreprises ne participeraient -elles pas plus pour ces salariés au financement de leur protection sociale ?

On internaliserait là encore une partie de l’externalité négative produite par la flexibilité de l’emploi. Ainsi, après plus de 20 ans de flexibilisation de l’emploi (CDD, intérim, etc., et aujourd’hui CPE, CNE), il est temps d’en évaluer les conséquences funestes et de les corriger, à défaut de l’abandonner. Elle ne permet pas de réduire significativeme nt le chômage et elle est à la source d’externalités négatives. Sauf à vouloir un retour à la condition salariale du XIXe siècle - marquée par un faible niveau de vie et de sécurité individuelle face aux risques de l’existence (vieillesse, maladie, chômage), l’Etat doit prendre en compte les résultats récents de l’analyse économique qui soulignent la légitimité de son intervention dans pareil cas de défaillance du marché. Le Premier ministre doit donc retirer le CPE et revoir sa copie…
Répondre | Répondre avec citation |
 

Votre avis ?

La France pourrait s’engager plus intensément contre la Russie. Qu’en pensez-vous ?
 

Zoom sur…

 

L'ASSOCIATION

Présentation de l'association et de sa charte qui encadre nos actions et engagements depuis 2004.

 

ADHÉRER !

Soutenir notre action ==> Si vous souhaitez adhérer à l’association, vous pouvez le faire par mail ou par écrit en copiant-collant le bulletin d’adhésion ci-dessous, en le remplissant et en...

 

LES FONDATEURS

En 2004, une dizaine de personnes contribuèrent au lancement de l'association. Elles furent plusieurs centaines à s'investir parfois au quotidien ces 16 dernières années. L'aventure se pou...