"On peut aujourd'hui affirmer que le nombre des bénévoles réguliers dépasse cinq millions", selon France Bénévolat qui publie son rapport aujourd'hui, et estime que "l'engagement bénévole est plus ponctuel, plus volatile, et plus souvent pluri-actif". "Contrairement aux idées reçues, les retraités ne sont pas sur-représentés dans le bénévolat. En pourcentage de la population, on trouve même plus de bénévoles parmi les actifs que parmi les retraités (30% pour une moyenne de 27%). Cependant les retraités sont, plus souvent que les actifs, des bénévoles réguliers. Ils occupent aussi plus souvent des postes à responsabilités", note l'étude. "Les femmes sont majoritaires même si l'on perçoit, en particulier au Secours catholique, une progression de la proportion des hommes qui est passée de 25 à 29%".
Il est dommage que ce rapport ne se penche pas davantage sur les motivations et les situations professionnelles ou financières de ces "actifs" qui donnent gratuitement de leur temps, de leur cœur, et de leur matière grise.
Car dans actif il y a ACTIVITÉ, ce mot pudique qu'on associe volontiers au TRAVAIL. Mais le travail aujourd'hui ne veut plus dire l'EMPLOI, c'est-à-dire l'activité rémunérée et donc reconnue aux yeux de tous… Pour ceux ou celles qui en sont privé(e)s, de gré ou de force, le besoin de se rendre utile d'une façon ou d'une autre reste vital. Et pour la catégorie des "actifs" condamnés à "vivre aux crochets de la société" (une expression bien ancrée dans les esprits) ou de leur famille, la sentence invoque une alternative pour préserver sa dignité.
Si les jeunes, qu'on fait entrer le plus tard possible sur le marché du travail, ont peut-être moins la maturité nécessaire pour s'investir de cette manière et sont déjà bien occupés à découvrir la vie, des "seniors", qu'on met de plus en plus tôt à la retraite, y trouvent visiblement leur compte pour une seconde carrière. Et beaucoup de femmes, qu'on discrimine en entreprise ou qu'on a tendance à cloîtrer à la maison avec les gosses, y voient l'opportunité d'élargir leur horizon tout en prouvant leurs compétences.
On ne choisit pas forcément son patron, mais on choisit son association : le volontariat est un acte libre et assumé qui procure du plaisir, à l'encontre de la soumission salariale. Surtout, le bénévolat permet de combler un manque et de redonner du sens.
L'argent ne fait pas le bonheur... mais il y contribue !
Plus largement, les associations tentent de répondre aux lacunes de notre société et aux défaillances de l'Etat et de ses institutions, qui sont flagrantes et cruellement éloignées des besoins humains les plus élémentaires. Les plus inconscients ou égoïstes d'entre nous semblent estimer que ces prestations bénévoles sont un dû. Hélas, ce bel altruisme n'est pas lucratif ! Et il progresse, ô coïncidence, tout comme la précarité et le travail (pardon, l'emploi) au rabais. C'est bien le signe que les lacunes augmentent, qu'elles soient sociales, sociétales ou personnelles.
Un chômeur va chercher une issue à son exclusion et au stress de son infructueuse recherche en œuvrant pour une association. Une femme dont les enfants deviennent autonomes va se rendre utile hors de son foyer, d'autant plus que le marché de l'emploi ne lui proposera aucune place valorisante. Toute personne un tantinet humaniste et engagée sur une cause va essayer de contrer les iniquités de ce monde par un investissement personnel, aussi "ponctuel", "volatile" ou "pluri-actif" soit-il. Si l'épanouissement individuel ne mendie pas de rémunération, cet investissement massif et généreux en vaudrait plus d'une pour des tas de raisons : d'abord déontologiques (tout travail mérite salaire, dit-on, et ces abeilles-là sont étonnamment motivées), ensuite parce que son action a des répercussions sociales et économiques avérées.
Pour l'instant, notre société se focalise sur les activités purement lucratives, même si elles sont inutiles ou désastreuses. Y sont admis trois secteurs : le primaire (agriculture), le secondaire (industrie) et le tertiaire (services). Or avec la mécanisation, les nouvelles technologies et la spéculation financière, ils sont désormais "saturés" et créent de moins en moins de postes.
Le monde associatif, observé avec bonhommie quand il n'est pas éludé, est bien le quatrième secteur d'activité qui se présente à nous. Mais les opportunités que recèle ce nouveau "vase communicant" - véritable vivier d'emplois, pour utiliser un terme qu'affectionne Jean-Louis Borloo - n'étant pas ouvertement axées sur des bénéfices d'ordre monétaire, il n'est pas reconnu comme "facteur de croissance économique"... Alors on le brime, on l'ignore. Pour survivre, des associations sont obligées de se plier au clientélisme ou aux règles du commerce. Il y a pourtant urgence à reconnaître leur rôle primordial dans un système économique qui se mord la queue au détriment du bien-être de tous.
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