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Accueil La revue de presse La précarité n'est pas bonne pour l'entreprise

La précarité n'est pas bonne pour l'entreprise

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L'analyse et les propositions de Benjamin d'Hardemare (formateur à la Croix-Rouge française) et d'Henri Lachmann (PDG de Schneider Electric), tous les deux membres du groupe de travail "Précarité et exclusion" de l'Institut Montaigne.

Si tout le monde s'accorde pour dénoncer la précarité, peu de gens proposent des solutions concrètes pour mobiliser contre elle tous les acteurs de la société, y compris les entreprises. Chercher comment ces dernières peuvent se développer tout en réduisant la précarité et l'exclusion en leur sein et dans leur environnement constitue une démarche malheureusement originale. Pourtant, l'avenir du contrat de travail, la formation des jeunes, le logement social et l'implication des entreprises dans leur bassin d'emploi sont autant d'enjeux pour lesquels les entreprises ont un intérêt économique à s'engager.

L'actualité française focalise sur le contrat de travail. Avec un peu de recul, on s'aperçoit que si seule est prise en compte sa dimension économique (travail-rémunération), cela n'est satisfaisant ni pour l'entreprise ni même pour le salarié. Ce dernier se contente de poursuivre ses intérêts propres, parfois aux dépens de ceux de l'entreprise. La motivation fait défaut, alors qu'elle est l'un des principaux facteurs de compétitivité.
Auparavant, un contrat moral garantissait la relation de travail : le salarié faisait sien l'intérêt de l'entreprise, en contrepartie de la sécurité de son emploi. De nos jours, la flexibilité implique la disparition de la sécurité de l'emploi dans une même entreprise. Le contrat moral étant aujourd'hui rompu, il s'agit de conclure un nouveau pacte économique et social équitable pour les entreprises et leurs salariés. L'entreprise peut ainsi optimiser son capital humain en recourant à la flexibilité - adaptabilité - sans précariser ses collaborateurs. La flexibilité doit s'arrêter avant d'engendrer la précarité.

Première proposition concrète : lorsqu'une entreprise doit recruter pour faire face à l'accroissement temporaire de son activité, elle gagnera à utiliser les services d'une entreprise de travail temporaire protégeant et qualifiant durablement ses collaborateurs au lieu d'embaucher elle-même en CDD. Certaines entreprises de travail temporaire offrent une protection sociale et des avantages sociaux à leurs intérimaires qui sont, à partir d'une certaine ancienneté, tout à fait comparables à ceux dont bénéficient les salariés en CDI. En choisissant les entreprises d'intérim les plus protectrices, elles capteront de facto les meilleurs intérimaires. Les CDD doivent être strictement réservés aux cas prévus par la loi - notamment les missions à durée déterminée et les emplois saisonniers - et non servir la flexibilité de l'entreprise.

Puisque le droit du travail actuel est critiqué, réformons-le. Mais, au lieu de contrecarrer l'inéluctable modernisation du travail, il convient de garantir l'équité des nouvelles relations de travail. Les solutions négociées sont préférables à l'intervention constante du législateur, qui nuit à la visibilité des entreprises et empêche la mise en commun des bonnes pratiques entre les partenaires sociaux d'une part, et entre les entreprises et le service public de l'emploi d'autre part. Deuxième proposition concrète : élaborer des accords collectifs spécifiquement consacrés à la précarité et à l'exclusion à tous les niveaux (européen, national, local et sectoriel). Cela permettra d'engager efficacement et durablement les entreprises et les partenaires sociaux dans ce domaine.

(...) Selon une idée reçue, seules les grandes entreprises peuvent lutter contre la précarité et l'exclusion, et y ont intérêt. C'est faux ! Toutes les entreprises ont besoin de collaborateurs motivés et de clients dotés d'un fort pouvoir d'achat et d'une certaine confiance en la sécurité de leurs ressources. Or la précarité nourrit une sinistrose chez les travailleurs et une méfiance chez les consommateurs. De plus, elle engendre des coûts pour la société qui sont indirectement répercutés sur les charges sociales des entreprises. L'engagement d'une entreprise contre la précarité et l'exclusion améliore son image interne et externe, prévient en grande partie les conflits sociaux et contribue à optimiser son capital humain. Quatrième proposition concrète illustrant ce point : préférer, lors de l'implantation de nouveaux locaux, les communes respectant leurs obligations en termes de logement social pour améliorer les conditions de vie de ses salariés, augmenter leur productivité et accroître, de ce fait, la compétitivité de l'entreprise.

Que peuvent faire les PME ? Mutualiser leurs ressources ! Cinquième proposition concrète formulée ici à titre d'exemple : adhérer à un groupement d'employeurs pour mettre en commun les moyens de recrutement et de gestion des ressources humaines, afin de s'adapter aux fluctuations de l'activité sans précariser ses collaborateurs. Le groupement d'employeurs répartit le temps de travail de ses salariés entre les entreprises adhérentes.

(Source : Le Monde)

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Mis à jour ( Mardi, 11 Avril 2006 23:33 )  

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