0,8% de RMIstes en moins : c'est peu, mais c'est peut-être le début de quelque chose... Et derrière toute baisse glorifiant M. Borloo se cachent des explications qui ne reflètent pas nécessairement la réalité.
Passagère ou durable, cette tendance n'exclut pas la tromperie, surtout quand on sait que les départements ne s'en sortent plus depuis la décentralisation et que l’ADF semble entamer un bras de fer avec l'Etat et le gouvernement. Le RMI coûte cher, le désastre du chômage se répercute sur la collectivité, et si certains dénoncent qu'«on exonère d'impôts une certaine catégorie de personnes et aujourd'hui il manque en France 850 millions pour les plus pauvres», d'autres ne perdent pas de vue que les RMIstes sont des assistés et des fraudeurs en puissance, et n'hésitent pas à douter des compétences et de l'irresponsabilité politique des départements. Les victimes sont les coupables, tandis que les actionnaires continuent de s'engraisser.
Les demandes restent stables
Selon des chiffres publiés aujourd'hui par la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF), le nombre d'ouvertures de droits, c'est-à-dire les premières demandes de RMI acceptées, s'est situé à 100.000 au premier trimestre 2006, "un niveau proche de celui observé au long de l'année 2005". Ce qui signifie que leur nombre ne diminue pas.
De mars 2005 à mars 2006, le nombre de RMIstes avait augmenté de 3,9% mais sa progression totale sur l'année 2005 avait été de 5%. Après trois ans et demi de hausse ininterrompue, les RMIstes sont désormais 1,104 million selon les derniers chiffres de la CNAF, qui s'empresse de justifier ce léger recul par "l'impact de la baisse du chômage intervenue depuis mai 2005, ainsi que la montée en charge des dispositifs d'emplois aidés ciblés sur les allocataires de minima sociaux". L'amélioration de la conjoncture du marché du travail "tend à se repercuter avec retard sur le nombre de personnes susceptibles d'avoir recours à ce minimum social", ajoute l'étude.
Ces 0,8% de RMIstes en moins correspondraient donc à des bénéficiaires qui ne perçoivent plus leur allocation.
L'impact des "emplois aidés"
La CNAF relève qu'après plus de trois années de diminution, le nombres d'emplois aidés concernant les personnes en difficulté d'insertion (contrats d'accompagnement dans l'emploi, contrats initiative emploi, contrats d'avenir…) a augmenté au dernier trimestre 2005. Le nombre de RMIstes bénéficiant d'une mesure d'aide à l'emploi (dispositif d'intéressement, contrat d'avenir ou CI-RMA) a progressé de 19,5% sur un an, "principalement sous l'effet de l'augmentation du nombre de contrats d'avenir". Fin mars 2006, 24.000 allocataires bénéficiaient de ce type de contrat contre seulement 11.000 fin décembre 2005.
Si le contrôle des chômeurs s'est accru avec les radiations qu'il suppose, rappelons que les RMIstes sont souvent "forcés" à accepter ces emplois aidés qui ne sont pas pérennes, et sont avant tout une aubaine pour les employeurs. On peut donc supposer que les quelques 0,8% de RMIstes sortis des chiffres de la CAF ont finalement trouvé une source de revenus qui dépasse le plafond d'attribution : mais comment, et pour combien de temps ?
Attribution par foyer fiscal
On oublie aussi qu'en cette période de chômage de masse, de plus en plus de chômeurs (aujourd'hui 48%) ne perçoivent aucune allocation : arrivés en fin de droits Assedic, s'ils ont la chance d'avoir un(e) conjoint(e) qui travaille, le RMI étant - comme l'ASS - attribué par foyer fiscal, ils ne peuvent prétendre à aucun minima sociaux. Mécaniquement et insidieusement, cette clause contribue à réduire le nombre d'ouvertures de droits.
La baisse de nos RMIstes ressemble à une bonne nouvelle. Mais c'est un phénomène à surveiller objectivement, ce que nous ne manquerons pas de faire.
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