«Je veux que notre société récompense ceux qui se dévouent pour les autres et sanctionne ceux qui empoisonnent la vie des autres. [...] Je veux que les années de bénévolat dans les associations valident des années de cotisation de retraite.» Bien sûr, aucune précision sur la mise en œuvre de ces réflexions humanistes n'a été ébauchée. (A commencer par sanctionner les patrons qui licencient alors qu'ils font des bénéfices : en voilà des gens qui empoisonnent la vie de millions d'autres !)
Image d'Epinal. D'abord, le monde associatif n'est pas toujours dévoué et bardé de bonnes intentions. Par exemple, beaucoup d'associations d'insertion de chômeurs sont devenues de vraies structures parasitaires, du fait que leur survie économique ne tienne que par l’existence d’un nombre conséquent d'exclus de l'emploi qu’elles ont tout intérêt à maintenir dans une précarité dont la gestion leur rapporte… des fonds publics conséquents. Pleinement intégrées à la conception même des programmes d’insertion, nombreuses sont celles qui empoisonnent la vie des personnes qu'elles sont censées aider en leur mettant la pression pour qu'ils acceptent des petits boulots précaires, sous menace de la suspension de leur RMI... Où est le dévouement ?
Et dans les cas limites, l'action caritative peut cacher des visées condamnables : les animateurs de www.association-sdf.com sont-ils des bénévoles comme les autres ?
Effet d'annonce. La question est donc de savoir quels seront les critères d'éligibilité qui permettront aux associations "méritantes" de faire bénéficier à leurs bénévoles de cette mesurette. Car l'idée séduisante de valider pour la retraite les périodes de bénévolat n'augmentera en rien les pensions des concernés, puisque ceux-ci ne cotisent pas. Valider ses trimestres permet seulement d'atteindre plus vite le délai requis pour quitter la vie professionnelle. La "récompense" est donc maigre. On est bien dans le même type de leurre que le "travailler plus pour gagner plus", qui bénéficiera à peu de salariés et risque de les décevoir.
En outre, une grande partie des bénévoles réguliers, occupant même des postes à responsabilité dans leurs associations sont… des retraités ! Quand, d'un côté, on veut supprimer les régimes spéciaux de certains alors qu'ils surcotisent à cet effet et que, de l'autre, on veut "offrir" des périodes de bénévolat à des futurs retraités qui ne cotisent pas, on en tire une impression quelque peu contradictoire.
Démago. Encore plus contradictoire quand on sait que le parti de Nicolas Sarkozy coupe régulièrement les vivres aux associations, qu'elles soient culturelles, de terrain, ou même de secours alimentaire...
Pour finir, rappelons que le monde associatif est un secteur d'activité économique à part entière, que l'on méprise parce qu'il n'a pas de vocation lucrative affichée et n'est donc pas considéré comme "facteur de croissance", alors qu'il pallie de plus en plus aux défaillances de notre société ou de l'Etat, tout en étant un véritable vivier d'emplois (lire en commentaire). Lui rendre hommage ne sert à rien si c'est juste pour orner un beau discours. Ce secteur, dont les répercussions sociales et économiques sont avérées, est créateur de richesses. Tout travail mérite salaire et à ce titre, il mérite d'être considéré à sa juste valeur, reconnu et développé, dans le respect de son indépendance.
Articles les plus récents :
- 25/10/2007 07:35 - «Écologie de salon» contre «khmers verts»
- 23/10/2007 02:33 - Suppression drastique des contrats aidés
- 19/10/2007 13:13 - Le nouveau traité européen est un déni de démocratie !
- 19/10/2007 10:23 - UIMM : un «trésor de guerre» de 600 millions
- 18/10/2007 16:32 - L'«aumône» des stagiaires
Articles les plus anciens :
- 17/10/2007 21:39 - Dire non à la misère, c'est...
- 17/10/2007 18:07 - La prime de Noël est reconduite pour 2007
- 17/10/2007 04:41 - Internes : une grève de «bobos» ?
- 16/10/2007 22:44 - Heureux qui, comme BERNARD LAPORTE…
- 14/10/2007 21:59 - Denis Gautier-Sauvagnac voulait «fluidifier les relations sociales»
Commentaires
Ils sont environ 13 millions à bosser à l'œil, dont 11 millions pour des associations, dont 5 millions à plein temps. Et leur nombre progresse, dépassant 27% des Français de plus de 15 ans : des "actifs", des retraités, et surtout des femmes. Le bénévolat reflète des aspirations et comble autant de déficits qu'il serait judicieux d'analyser.
"On peut aujourd'hui affirmer que le nombre des bénévoles réguliers dépasse 5 millions", selon France Bénévolat qui publie son rapport vendredi, et estime que "l'engagement bénévole est plus ponctuel, plus volatile, et plus souvent pluri-actif". "Contrairement aux idées reçues, les retraités ne sont pas sur-représentés dans le bénévolat. En pourcentage de la population, on trouve même plus de bénévoles parmi les actifs que parmi les retraités (30% pour une moyenne de 27%). Cependant les retraités sont, plus souvent que les actifs, des bénévoles réguliers. Ils occupent aussi plus souvent des postes à responsabilités ", note l'étude. "Les femmes sont majoritaires même si l'on perçoit, en particulier au Secours catholique, une progression de la proportion des hommes qui est passée de 25 à 29%".
Il est dommage que ce rapport ne se penche pas davantage sur les motivations et les situations professionnelle s ou financières de ces "actifs" qui donnent gratuitement de leur temps, de leur cœur, et de leur matière grise. Car dans actif il y a ACTIVITÉ, ce mot pudique qu'on associe volontiers au TRAVAIL. Mais le travail aujourd'hui ne veut plus dire l'EMPLOI, c'est-à-dire l'activité rémunérée et donc reconnue aux yeux de tous… Pour ceux ou celles qui en sont privé(e)s, de gré ou de force, le besoin de se rendre utile d'une façon ou d'une autre reste vital. Et pour la catégorie des "actifs" condamnés à "vivre aux crochets de la société" (une expression bien ancrée dans les esprits) ou de leur famille, la sentence invoque une alternative pour préserver sa dignité.
Si les jeunes, qu'on fait entrer le plus tard possible sur le marché du travail, ont peut-être moins la maturité nécessaire pour s'investir de cette manière et sont déjà bien occupés à découvrir la vie, des "seniors", qu'on met de plus en plus tôt à la retraite, y trouvent visiblement leur compte pour une seconde carrière. Et beaucoup de femmes, qu'on discrimine en entreprise ou qu'on a tendance à cloîtrer à la maison avec les gosses, y voient l'opportunité d'élargir leur horizon tout en prouvant leurs compétences.
On ne choisit pas forcément son patron, mais on choisit son association : le volontariat est un acte libre et assumé qui procure du plaisir, à l'encontre de la soumission salariale. Surtout, le bénévolat permet de combler un manque et de redonner du sens.
L'argent ne fait pas le bonheur… mais il y contribue !
Plus largement, les associations tentent de répondre aux lacunes de notre société et aux défaillances de l'Etat et de ses institutions, qui sont flagrantes et cruellement éloignées des besoins humains les plus élémentaires. Les plus inconscients ou égoïstes d'entre nous semblent estimer que ces prestations bénévoles sont un dû. Hélas, ce bel altruisme n'est pas lucratif ! Et il progresse, ô coïncidence, tout comme la précarité et le travail (pardon, l'emploi) au rabais. C'est bien le signe que les lacunes augmentent, qu'elles soient sociales, sociétales ou personnelles.
Un chômeur va chercher une issue à son exclusion et au stress de son infructueuse recherche en œuvrant pour une association. Une femme dont les enfants deviennent autonomes va se rendre utile hors de son foyer, d'autant plus que le marché de l'emploi ne lui proposera aucune place valorisante. Toute personne un tantinet humaniste et engagée sur une cause va essayer de contrer les iniquités de ce monde par un investissement personnel, aussi "ponctuel", "volatile" ou "pluri-actif" soit-il. Si l'épanouissement individuel ne mendie pas de rémunération, cet investissement massif et généreux en vaudrait plus d'une pour des tas de raisons : d'abord déontologiques (tout travail mérite salaire, dit-on, et ces abeilles-là sont étonnamment motivées), ensuite parce que son action a des répercussions sociales et économiques avérées.
Pour l'instant, notre société se focalise sur les activités purement lucratives, même si elles sont inutiles ou désastreuses. Y sont admis trois secteurs : le primaire (agriculture), le secondaire (industrie) et le tertiaire (services). Or avec la mécanisation, les nouvelles technologies et la spéculation financière, ils sont désormais "saturés" et créent de moins en moins de postes.
Le monde associatif, observé avec bonhommie quand il n'est pas éludé, est bien le quatrième secteur d'activité qui se présente à nous. Mais les opportunités que recèle ce nouveau "vase communicant" - véritable "vivier d'emplois", pour utiliser un terme qu'affectionne Jean-Louis Borloo - n'étant pas ouvertement axées sur des bénéfices d'ordre monétaire, il n'est pas reconnu comme "facteur de croissance économique"… Alors on le brime, on l'ignore. Pour survivre, des associations sont obligées de se plier au clientélisme ou aux règles du commerce. Il y a pourtant urgence à reconnaître leur rôle primordial dans un système économique qui se mord la queue au détriment du bien-être de tous. Répondre | Répondre avec citation |
Quoi ? c'est pas du "bon" bénévolat ? c'est pas au service des autres ? mais si, on accueille tout plein d'associaux qui seraient sinon désoeuvrés et risqueraient de trouver des "exutoires" dommageables pour la société :-)
Quelle stupidité démagogique que cette proposition :
- qui va décider qu'une asso est suffisament au service des gens
- qui va vérifier que vous y étiez bien, et depuis combien de temps ? (cotiser ne veut pas dire être présent)
Encore un misérable contrefeu allumé pour faire oublier aux idiots la politique lamentable de destruction sociale de ce gouvernement sans âme. Répondre | Répondre avec citation |