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Sur le sort de ce contrat scélérat, on apprend que l'OIT a déjà rendu son verdict...
Puis Le Canard écrit : «Le coup de grâce a été porté par le Medef. Lors de la huitième séance de négociation sur "la modernisation du marché du travail", le patronat a mis fin aux souffrances du Contrat nouvelle embauche (CNE) en acceptant que "tout licenciement soit fondé sur un motif valable qui doit être porté à la connaissance du salarié". Créé en août 2005 par Dominique de Villepin, ce contrat de travail prévoyait une période d’essai de deux ans au cours de laquelle le patron pouvait virer l’employé sans explication. [...] Après plusieurs jugements par des conseils des Prud’hommes, la Cour d’appel de Paris a estimé que le CNE était contraire aux conventions internationales ratifiées par la France [...]».
Ne nous illusionnons pas : avec la réforme du marché du travail en cours où la majorité des syndicats va s'aplatir devant les dernières propositions du Medef, ils trouverons le moyen de nous en concocter de bien pires !
Sauront-ils s'inspirer des réflexions intelligentes de Jean-Yves Kerbouc'h, professeur de droit social, et Yves Chassard, économiste, experts dont les avertissements sur une nouvelle réforme des contrats de travail, à paraître dans le prochain numéro de la revue Droit social, les invite à "ne pas se tromper d’époque" ? Lire en commentaire…
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Commentaires
Mais, prévient-elle, «nous renonçons au CNE en contrepartie d’un accord final signé qui moderniserait le marché du travail». La belle affaire !
Les flexibilités perdues d’un côté seraient récupérées de l’autre. Le MEDEF tente d’échanger le droit de licencier sans motif contre celui de licencier sans être contesté. […] Avec sa proposition de «rupture sans reproches réciproques», soumise à débat dans la négociation en cours, le patronat veut inscrire dans le contrat de travail l’impossibilité de saisir la justice dès lors que le licenciement à l’amiable est signé par les deux parties. Le troc «fin du CNE contre accord» ressemble furieusement à un marché de dupes et à une porte de sortie pour un patronat qui a soutenu un contrat de travail aujourd’hui plombé de toutes parts.
En effet, le CNE est déjà très fragilisé par l’opposition syndicale unanime qu’il a suscitée, par la mise au pilon de son frère jumeau, le CPE, qui a soulevé contre lui un des plus forts mouvements sociaux de ces dernières années, par des décisions de justice qui l’ont déclaré non conforme aux engagements internationaux de la France.
Le MEDEF sait bien qu’un coup fatal sera porté le 15 novembre prochain. Saisi par Force ouvrière, le Bureau international du travail (BIT) devrait rendre sa décision ce jour-là. Or le comité tripartite (salariés, employeurs, gouvernements) chargé de préparer le travail a estimé que la convention 158, ratifiée par la France, interdit un licenciement sans motif valable et estime trop longue la période de deux ans pendant laquelle l’employeur peut licencier sans motif. Le droit international étant juridiquement supérieur au droit national, la cour d’appel de Paris s’était appuyée sur cette convention début juillet pour requalifier un CNE en CDI : «Durant une période de deux années, le contrat nouvelles embauches prive le salarié de l’essentiel de ses droits en matière de licenciement (…). Aucune législation de pays européen comparable à la France n’a retenu un délai aussi long durant lequel les salariés sont privés de leurs droits fondamentaux en matière de rupture de contrat de travail», avait justifié la cour d’appel. Elle avait été saisie d’une décision rendue le 28 avril 2006 par le conseil des Prud’hommes de Longjumeau (Essonne).
Depuis la création du CNE, plus de 800 litiges ont été comptabilisés. Nombre de salariés ont été licenciés suite à un arrêt maladie, après avoir déclaré une grossesse ou réclamé le paiement d’heures supplémentaires . Des motifs illégaux jugés par les tribunaux de «licenciement sans cause réelle ni sérieuse». Ces motifs-là, le patronat rêve de pouvoir les pratiquer sans être contraint par la justice de les avouer.
(Source : L'Humanité) Répondre | Répondre avec citation |
"Il devient urgent de garantir aux travailleurs une égalité des chances de reclassement quel que soit le contrat conclu", estiment Jean-Yves Kerbouc'h, professeur de droit social, et Yves Chassard, économiste. MM. Kerbouc'h et Chassard collaborent, en qualité respective, de conseiller scientifique et de chef de département au Centre d'analyse stratégique (le CAS, dépendant de Matignon), qui n'est toutefois pas engagé par cet article.
Il faudrait notamment, selon eux, "re-civiliser" l'usage du contrat à durée déterminée (CDD), qui pourrait être "autorisé sur une longue période" mais avec en contrepartie, "l'obligation mise à la charge de l'employeur de former, adapter et reclasser" le salarié. Il faut aussi "consolider le droit individuel à la formation (DIF) en le rendant transférable (d'une entreprise à l'autre) au moins sous certaines conditions", estiment les auteurs.
Le marché du travail vit un retournement démographique majeur et "les comportements des entreprises et des salariés vont devoir évoluer", analysent-ils. Depuis 30 ans, les entreprises ont profité d'une forte hausse de la population active (+150.000 personnes par an en moyenne entre 1974 et 2004) et pratiqué "une sorte de cueillette des qualifications", tenant à l'écart une partie de la main d'œuvre non immédiatement utilisable. Mais, dans les 10 prochaines années, immigration choisie ou pas, la France aura au contraire des "difficultés de recrutement" qui "pourront se traduire par "des tensions inflationnistes sur les salaires", ajoutent MM. Kerbouc'h et Chassard. Certaines qualifications se raréfieront et "dans les PME, la fidélisation des salariés deviendra un enjeu important de la gestion des ressources humaines", prédisent-ils.
Les dispositifs rigides étant "inévitablement contournés", plutôt que de réformer les contrats de travail, il y aurait avantage à rendre l'usage des CDD plus civil et à améliorer le reclassement des 130.000 salariés qui, chaque mois, arrivent en fin de CDD ou d'intérim dans le régime d'assurance chômage.
Quant à la proposition patronale d'aménager les CDI pour instaurer la "rupture d'un commun accord" entre employeur et salarié, les auteurs soulignent que "les risques de contentieux sont importants et sans doute sous-estimés". "Ceci conduirait à légaliser une possibilité de rupture demandée par l'un (l'employeur) et acceptée par l'autre (le salarié) si ce dernier se laisse convaincre par le montant de l'indemnité", relèvent-ils.
"La séparation amiable aurait certainement le mérite de mettre le texte de la loi en conformité avec la réalité de nombreuses pratiques de rupture, mais elle fait l'impasse sur l'essentiel : l'efficacité du reclassement du salarié", plaident-ils. Or le reclassement, et non pas l'indemnisation de la rupture, est la clé de tout, selon eux. Pour le financer, trois pistes sont possibles : obliger l'entreprise à le faire, demander à l'entreprise de payer quelqu'un d'autre pour s'en occuper, ou troisième solution préconisée par les auteurs, mutualiser des fonds et les répartir au niveau du bassin d'emploi ou d'une filière professionnelle . Répondre | Répondre avec citation |